AGRICULTURE BIO
L’enherbement, principal frein à la production de semences bio

Face à une réglementation de plus en plus stricte, plusieurs acteurs de la filière semencière tentent d’apporter de nouvelles solutions aux agriculteurs multiplicateurs en production bio.

L’enherbement, principal frein à la production de semences bio
La production de semences biologiques est un enjeu fort pour la filière.

Alors que le règlement européen de l’agriculture biologique impose l’utilisation de semences bio, les producteurs peuvent obtenir des dérogations pour utiliser des semences conventionnelles non traitées. Mais la réglementation étant de plus en plus stricte, « faire des semences bio devient un enjeu fort », selon Christel Nayet, conseillère agriculture biologique à la chambre d’agriculture de la Drôme. La journée bio du 7 juin dernier a permis de relater les efforts faits par la profession à cet égard. « Des essais sont menés depuis 2012 en agriculture biologique et en faibles intrants sur la plateforme Techniques alternatives et biologiques (TAB) », note Florian Boulisset, chargé de projet. Depuis quelques années, le site expérimental collabore avec la Fédération nationale des agriculteurs multiplicateurs de semences (Fnams) et l’Association nationale des agriculteurs multiplicateurs de semences oléagineuses (Anamso) sur des essais analytiques. « L’objectif est d’essayer de répondre à la demande sur des espèces phares », explique Christian Étourneau, ingénieur et responsable de la station régionale de la Fnams à Étoile-sur-Rhône. Ce dernier rappelle que l’accès à l’eau est souvent exigé par les contrats de semences. L’autre facteur limitant dans la production de semences bio est la maîtrise de l’enherbement. « Le suivi réglementaire de la culture impose une parcelle propre afin de pouvoir assurer une identification variétale », note Romain Filiol, animateur technique et syndical à l’Anamso. Dans ce contexte, Christian Étourneau regrette qu’il y ait « très peu de matériel spécifique en productions de semences ». « Les agriculteurs sont obligés d’utiliser le matériel des grandes cultures. Cependant, le recours au désherbage manuel est indispensable et engendre des coûts de main-d’œuvre importants. » À ce titre, la Fnams réalise un essai sur une parcelle de carotte porte-graine. 

Répondre aux besoins de la profession

« Il est important de travailler les associations de cultures pour trouver celle qui sera le plus efficace », estime Christian Étourneau. Derrière cela se cache la concurrence entre les cultures associées, la gestion de la fertilisation et de l’eau. Mais l’agronomie du sol a aussi un rôle important à jouer dans la production de semences. « Il faut considérer le sol comme un capital de production qui, par l’apport de matières organiques ou de substances utilisées en bio, peut être valorisé », poursuit-il. La Fnams travaille aussi sur les légumineuses (trèfle violet et luzerne), à la demande des agriculteurs et des éleveurs en agriculture biologique. Elle étudie notamment l’état de salissement des cultures, le contrôle des ravageurs et la fertilisation potassique et soufrée. De son côté, l’Anamso a mené en 2020 un essai analytique sur du tournesol semence bio. Les nombreux dégâts d’oiseaux à l’implantation du premier mâle au mois de mai ont été le principal facteur limitant. « Les solutions sont très limitées : les épouvantails ne présentent pas une efficacité sur le long terme, au même titre que les canons. Les oiseaux s’habituent », regrette Romain Filiol. L’Anamso étudie depuis l’effet d’une bande de pois sur les ornières qui pourrait s’avérer plus appétente pour les oiseaux, et ainsi, préserver les parcelles de tournesol. L’enherbement, quant à lui, a été plutôt bien maîtrisé, en binage mécanique sur les plantes femelles et en désherbage manuel dans les plants mâles. « Les adventices étaient développées en fin de cycle mais cela n’a pas pénalisé le rendement, contrairement aux dégâts d’oiseaux », conclut-il.

Amandine Priolet