RAVAGEURS
Évaluer et gérer le risque des principaux ravageurs d’automne du colza

Quentin Lambert et Alexis Verniau – Terres Inovia
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RAVAGEURS / Les précipitations d’août et début septembre, très disparates selon les secteurs, ont joué un rôle déterminant sur les dates de semis et les levées. Les colzas ne seront donc pas égaux à l’arrivée des principaux ravageurs d’automne : grosse altise, charançon du bourgeon terminal et larves de grosse altise. Afin d’agir de façon efficiente sur ces ravageurs potentiels qui peuvent se succéder dans les parcelles de colza, Terres Inovia fait le point sur les spécificités de chacun et la stratégie globale à mettre en œuvre.

Évaluer et gérer le risque des principaux ravageurs d’automne du colza

Reconnaître son ennemi, connaître le niveau des dégâts potentiels et la période où il peut les provoquer est la première étape de la démarche. Un colza poussant et bien développé sera plus tolérant aux attaques des ravageurs d’automne qu’un colza chétif et peu développé. Ainsi, pour chaque ravageur, le stade et la vigueur du colza seront pris en compte. Si les informations du bulletin de santé des végétaux (BSV) dressent un état des lieux à l’échelle du territoire, le suivi régulier des parcelles et l’observation des plantes sont indispensables.

 

1 - Premier rendez-vous début octobre pour la grosse altise adulte
Grosse altise adulte. Coléoptère de 3 à 5 mm, son corps est noir et brillant avec des reflets bleus métalliques.

1 - Premier rendez-vous début octobre pour la grosse altise adulte

Identifier sa présence

La période de risque pour la culture du colza s’étend de la levée au stade trois feuilles. Passé ce stade, les dégâts engendrés ne mettent plus en cause la survie de la plante. Sous forme de morsures circulaires de 1 à 2 mm sur les feuilles et cotylédons, les dégâts provoquent un retard de développement. Les vols sont souvent observés dès le début du mois d’octobre.

Prévenir le risque

La date de levée est le principal levier permettant d’éviter un traitement sur la grosse altise adulte, il faut donc viser une levée avant le 5 septembre et en amont une préparation du semis suffisamment tôt pour profiter des premières pluies efficaces du mois d’août.

Évaluer le risque

Des observations à la parcelle sont indispensables pour toute décision d’intervention. La vitesse d’accumulation des dégâts et la vitesse de croissance de la culture sont les critères à prendre enconsidération, quasiment au jour le jour.
L’intervention avec un insecticide, si elle est nécessaire, devra être réalisée de préférence en soirée ou en début de nuit car l’adulte est plus actif sur cette période que pendant la journée.

Seuil d’intervention

Le seuil d’intervention contre les altises adultes est atteint si les trois éléments suivants sont réunis : colza à moins de 4 feuilles, 8 pieds sur 10 avec morsures et 25 % de la surface foliaire consommée avant le stade 4 feuilles. Attention, en cas d’arrivée massive du ravageur, 24 à 48 h suffisent pour atteindre cette fréquence de pieds atteints. En cas de levée tardive (après le 1er octobre), la phase de croissance lente du colza dure plus longtemps et le seuil sur adulte peut être abaissé à 3 pieds sur 10 avec morsures.

Évaluation des dégâts de grosse altise sur un colza à moins de 4 feuilles :

Moins de 25 % de surface foliaire est détruite :

➨ Poursuivre la surveillance

Plus de 25 % de la surface foliaire est détruite :

➨ Si 80 % des plantes est concerné, le seuil est atteint.

2 - Second rendez-vous : mi-octobre, le charançon du bourgeon terminal
Charançon du bourgeon terminal adulte. Il mesure de 2,5 à 3,7 mm, son corps est noir et brillant, avec des taches dorsales blanchâtres, tache latérale rousse et extrémité des pattes rousses. Les larves mesurent de 4,5 à 6,5 mm et sont dépourvues de pattes. Leur corps est de couleur blanche, la tête est brune au stade jeune puis jaunâtre.

2 - Second rendez-vous : mi-octobre, le charançon du bourgeon terminal

Les adultes pondent dans les pétioles à l’automne. Les dégâts sont causés par les larves issues de ces pontes. Au printemps, les plantes ont alors un « port buissonnant », il sera trop tard pour agir.

Identifier sa présence

L’observation de ce ravageur, plutôt discret, se réalise grâce à la cuvette jaune placée en haut de végétation. La période de risque pour le colza est comprise entre le début du vol et la reprise de végétation au printemps. Le début du vol est généralement observé mi-octobre (pic de vol : fin octobre-début novembre).

Évaluer le risque

La nuisibilité des larves sera fortement conditionnée par la dynamique de croissance du colza. Ainsi, Terres Inovia propose une évaluation simplifiée du risque vis-à-vis du ravageur à partir de deux indicateurs principaux : le niveau de risque historique et le niveau de risque agronomique. Cette analyse, à faire fin octobre, nécessite de se rendre au champ pour évaluer l’état de croissance et faire un prélèvement pour une mesure de biomasse. Cette donnée est indispensable car c’est un indicateur quantitatif, propre à chaque parcelle et nécessaire pour raisonner l’intervention insecticide (voir grille d’évaluation). Cette grille permet de se situer en fonction du risque historique et agronomique.
En fonction du résultat de la colonne « indication globale de risque », on pourra se situer sur le niveau de risque potentiel et déclencher ou non une protection insecticide (8 à 10 jours après les premières captures dans la cuvette jaune).

Prévenir le risque

Là encore, la date de semis a une grande importance sur l’atteinte du seuil de biomasse de 25 g/plante. La fertilisation au semis, une structure du sol favorable à un bon enracinement du pivot jouent également sur la capacité du colza à faire face aux larves de charançons du bourgeon terminal.

Grilles d’évaluation du niveau du colza vis-à-vis du charançon du bourgeon terminal

3 - Troisième rendez-vous : les larves de grosse altise dès mi-novembre

Les dégâts de larves de grosse altise peuvent entraîner la destruction du bourgeon terminal (expression de la nuisibilité) et provoquer des ports buissonnants au printemps. Ce troisième rendez-vous fera l’objet d’un prochain article, cependant le risque potentiel doit être pris en compte dans la stratégie globale.

Quelle stratégie insecticide adopter en fonction des risques identifiés ?

Les insecticides sont complémentaires à une conduite qui place les leviers agronomiques au coeur du système : implantation soignée, conditions favorables à une croissance dynamique du couvert (fertilisation, association légumineuses). Les solutions proposées dans le schéma ci-dessus tiennent compte des spécificités de la région Rhône-Alpes (niveau de résistance aux pyréthrinoïdes) et des modalités d’usage des produits autorisés.

Perspectives

Depuis 2017, Terres Inovia et ses partenaires en région travaillent sur le caractère des variétés à l’implantation puis à l’automne. L’objectif est de disposer d’éléments sur la vigueur au départ et la croissance automnale par variété pour mesurer les interactions avec les ravageurs d’automne. La caractérisation des variétés sur ces critères a montré qu’il existe des différences variétales significatives. Attention toutefois, ces comportements variétaux ne sont pas efficaces s’ils ne sont pas combinés à d’autres leviers agronomiques (date de semis, fertilisation, couverts, implantation, désherbage précoce des repousses de céréales etc.). Ces travaux, qui sont toujours en cours pourraient prochainement déboucher sur l’ajout de critères de décision lors du choix variétal.

Quentin Lambert et Alexis Verniau – Terres Inovia

Le bulletion de santé des végétaux est téléchargeable en accès libre sur www.terresinovia.fr