INTERVIEW
Laurent Wauquiez : « Financer un comptage objectif du nombre de loups dans la région »

Sortie du beaujolais nouveau, gestion de l’eau, loi Egalim 2, loup… à l’approche de la fin d’année, les sujets agricoles occupent une place centrale dans l’agenda de Laurent Wauquiez, président de la région Auvergne-Rhône-Alpes. Tour d’horizon.

Laurent Wauquiez : « Financer un comptage objectif du nombre de loups dans la région »
Laurent Wauquiez, président de la Région Auvergne-Rhône-Alpes. ©Charles Pietri

Le beaujolais nouveau est sorti ce jeudi 18 novembre. Quelle est l’importance de cet évènement pour la filière viticole régionale ?

Laurent Wauquiez : « La sortie du beaujolais nouveau est un beau signe d’espoir en cette période difficile. Je suis convaincu du talent de ce vignoble qui sait allier tradition festive et qualité. La Région a investi 15 millions d’euros pour la filière viticole depuis 2019 et nous commençons à en récolter les fruits, notamment pour le beaujolais. Je souhaite désormais un plan beaujolais 2 pour accompagner la partie haute du vignoble qui apparaît plus vulnérable. Chaque vignoble est différent mais il faudra à l’avenir, dans le Beaujolais comme ailleurs, s’appuyer sur l’œnotourisme et investir dans la modernisation des exploitations pour continuer de monter en gamme. »

Le soutien à l’investissement représente un défi plus global pour l’ensemble des filières régionales. Quelle est l’implication de la Région sur le sujet ?

L.W. : « Depuis que je suis à la Région, le budget agricole a doublé et le volume d’investissement s’élève aujourd’hui à plus de 100 millions d’euros. Nos agriculteurs ont connu trop d’instabilité ces dernières années. Notre philosophie est donc de maintenir un budget identique, de simplifier les dossiers et de privilégier les aides directes. En matière d’adaptation au changement climatique, nous sommes d’ailleurs la première Région à avoir mis en place un budget spécifique à ce sujet. À la Région, nous sommes également déterminés à mettre en valeur nos productions, c’est le sens de nos investissements dans notre marque régionale. »

L’un des enjeux majeurs du changement climatique est la gestion de l’eau. Êtes-vous d’accord avec la FRSEA Aura qui qualifie les actions menées contre des projets de retenue d’eau de « terrorisme environnemental » ?

L.W. : « Le terme « terrorisme » est fondé. Certains se sont auto-décrétés du côté du bien et font de la critique des agriculteurs un sport national. L’exemple de l’eau est symbolique : on trouve formidable qu’un particulier stocke de l’eau pour prendre sa douche mais l’agriculteur, on le jette en pâture. Moi, j’assume de défendre tous les projets de retenues collinaires. Aujourd’hui, 150 projets individuels et 40 projets collectifs sont soutenus avec une enveloppe de 8 millions d’euros/an. Sur ce sujet, j’ai d’ailleurs décidé que si l’Agence de l’eau Loire-Bretagne continue de nous mettre des bâtons dans les roues, nous suspendrons notre soutien. »

En matière de soutien justement, quel est votre avis sur la loi Egalim 2 censée soutenir la rémunération des agriculteurs ?

L.W. : « Il faut d’abord féliciter le syndicalisme agricole et certains parlementaires qui se sont beaucoup mobilisés. Dans cette loi, il y a des avancées comme la contractualisation obligatoire qui va permettre plus de contraintes et de transparence. Mon point de vigilance est que cela ne devienne pas une énième usine à gaz dans laquelle les grandes surfaces y gagnent et non les agriculteurs. Ma deuxième inquiétude est de ne s’occuper que des prix en oubliant les coûts de revient et la hausse des prix de certaines matières premières comme le carburant ou les intrants. À l’arrivée, les faibles bénéfices pour les agriculteurs risqueraient de ne pas compenser leurs coûts de production. »

Une autre actualité en cette fin d’année est le comptage du loup, crucial pour la profession. De quelle manière la Région compte-t-elle s’impliquer ?

L.W. : « Au congrès des élus de la montagne les 21 et 22 octobre, le ministre de l’Agriculture, Julien Denormandie, s’est contenté d’annoncer la création d’une nouvelle commission sur le loup. Il faut le dire : on nous trompe sur le nombre de loups, au détriment du pastoralisme et des agriculteurs. Par conséquent, j’ai décidé de financer un comptage objectif du nombre de loups dans la région pour jeter un pavé dans la mare. Ce comptage ne passera pas par l’OFB (Office français de la biodiversité), un organisme totalement décrédibilisé, mais par des organismes indépendants et des lieutenants de louveteries en lien avec les agriculteurs. Nous travaillons sur ce projet qui devrait voir le jour début 2022. »

Propos recueillis par Pierre Garcia