Boucher, Jérémy Pisseau ne rêvait pas de l’être. En découvrant ce métier un peu par hasard, à 21 ans, le jeune ardéchois en est devenu passionné. Animé par la soif de défi, c’est l’occasion pour lui de revaloriser un métier souvent mal aimé par le grand public, à travers le concours du Meilleur apprenti de France.

Jérémy Pisseau, en route pour la finale nationale du Meilleur apprenti de France
Jérémy Pisseau, représentera l'Ardèche à la finale nationale du meilleur apprenti de France

Casquette vissée sur la tête, regard rivé sur la pièce de viande à découper, Jérémy Pisseau est concentré. De retour du marché de Bourg-Saint-Andéol avec la boucherie mobile tenue par ses beaux-parents Didier et Valérie Aubenas, l’apprenti boucher est affairé. S'initiant à la boucherie, un peu par hasard, par le biais de sa compagne Mélina et des parents de celle-ci, le jeune homme de Lavilledieu s’est découvert une véritable passion, lui qui a commencé une carrière dans la vente. « Si on m’avait dit que je deviendrais boucher il y a trois ans, je ne l’aurai jamais cru », révèle-t-il. Suite à un été passé dans les chambres froides et sur les marchés de cette boucherie familiale, et face à l’implication du jeune homme, Didier Aubenas lui propose d’obtenir son CAP en alternance. En septembre 2021, il s’inscrit donc au CFA André-Fargier de Lanas. Ce qu’il affectionne avant tout, c’est de pouvoir valoriser la viande en la sublimant. « J’aime partir d’un produit brut, la carcasse, jusqu’à un produit fini. » La viande qu’il préfère travailler, c’est l’agneau. Car « il faut être précis, il y a un vrai savoir-faire à acquérir ».

Revaloriser l’image de son métier à travers les concours

Repéré par ses formateurs qui confient aux cinq meilleurs apprentis les pièces les plus difficiles à travailler, Jérémy s’offre une première expérience réussie dans l’univers des compétitions. En participant au concours du Meilleur apprenti au festival du bœuf à Charolles (71). Le jeune homme gagne en confiance. Minutieux et désormais paré pour participer au concours annuel du Meilleur apprenti charcutier boucher de son département, organisé par la Fédération régionale des artisans bouchers d’Auvergne-Rhône-Alpes, Jérémy dit apprécier se mettre au défi. « Ça me motive pour avancer, toujours faire au mieux pour aller le plus loin possible, et puis les concours donnent une bonne image du métier », assure-t-il. L’élégant apprenti souhaite, à travers sa participation aux concours, contribuer à une double réhabilitation de son métier, d’abord en revalorisant son image.

« Quand je prépare, je veux donner envie au client de manger cette pièce »

« C’est important de montrer la diversité : charcutier, traiteur, vente, préparation des pièces de viande, on touche à tout », énonce t-il. « Les jeunes qui ne savent pas quoi faire, il faut leur montrer que ce métier n’est pas le bain de sang qu’on s’imagine. Nous n’abattons pas les animaux, ce n’est pas l’horreur. Moi-même, j’avais une mauvaise image du métier avant de me lancer. Quand je prépare, je veux donner envie au client de manger cette pièce : c’est un défi. Car un produit cru, c’est compliqué pour donner envie de le manger, donc en le préparant comme il faut, je veux y arriver. » Il rajoute : « C’est un métier manuel, physique, j’aime faire les choses de A à Z, et puis le contact clientèle me plaît ». En effet, pour lui, les qualités pour devenir un bon boucher, c’est avant tout de savoir « sélectionner des bêtes de qualité, prendre soin de la viande, en travaillant et revalorisant les morceaux nobles et moins nobles. Être très bon commerçant. C’est quelqu’un qui va faire son métier avec passion. Pour moi, c’est ça un bon boucher ! », exulte-t-il.

De plus, l’apprenti est conscient des enjeux actuels autour du bien-être animal. « En tant qu’artisan, le bien-être animal est important. On se soucie de comment a été élevé l’animal, on sait exactement ce qu’on vend au consommateur. » Justement, il souhaite également participer à revaloriser la viande locale afin de « redonner envie aux gens de manger de la qualité et de savoir ce qu’ils ont dans leur assiette ». Pour Mélina, la compagne de Jérémy c’est un métier d’avenir : « On aura toujours besoin de boucher, c’est un métier alimentaire et ça fait partie de la chaîne de la vie », résume-t-elle.

Un rêve : devenir meilleur ouvrier de France

Puisque la boucherie se déplace au grès des marchés du département, l’après-midi, le jeune homme a du temps pour s’entraîner. « J’ai vu une réelle évolution de mon travail au fur et à mesure des concours. » En effet, à l’issue de sa victoire au concours départemental du meilleur apprenti, il s’est vu offrir une semaine de stage à l’Ecole Nationale Supérieure des Métiers de la Viande.  Depuis sa victoire régionale, il enchaîne les déplacements à Paris pour préparer la finale nationale auprès des meilleurs ouvriers de France : « Ma qualité de désossage s’est améliorée », précise-t-il.

Confiant, face au concours national du meilleur apprenti qui se déroule le 14 et 15 mai 2023 à Avignon (84), son projet serait de reprendre l’entreprise familiale, d’ici quelques années, avec sa compagne, Mélina. Celle-ci se dit fière du parcours accomplit : « Voir son évolution, c’est fou ». Didier Aubenas renchérit : « Je n’aurai absolument pas parié qu’il fasse ce métier-là : il n’aimait pas le sang, le gras… Mais je l’ai vu doué dans ce qu’il faisait. En plus, il présente bien, il aime la vente, c’est bénéfique ».

Le rêve du jeune apprenti serait de participer au concours du meilleur ouvrier de France. En attendant, il se tient prêt pour l’ultime étape de la compétition qui emmènera le jeune ardéchois à représenter ce métier, avec toute la passion qui l’anime.

Marine Martin