VENDANGES
Une récolte très précoce et relativement prometteuse

Pierre Garcia
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VENDANGES / La précocité des vendanges est généralisée sur l’ensemble des vignobles de Rhône-Alpes, du Jura et de Saône-et-Loire. Si le temps sec et chaud a permis de maintenir un état sanitaire globalement satisfaisant, le stress hydrique a pu par endroits impacter les volumes et la concentration des raisins. Tour d’horizon.

Une récolte très précoce et relativement prometteuse
La précocité des vendanges sur la majeure partie des vignobles est le marqueur de la campagne 2020. Les épisodes climatiques, grêle ou gel, ont été très localisés cette année. À la faveur d’une météo sèche et chaude, les vignes présentent un bon état sanitaire.

En vallée du Rhône, le coup d’envoi officiel des vendanges a retenti le 24 août pour la récolte des blancs, tandis que les rouges dans le nord comme dans le sud du vignoble devraient être vendangés à partir de début septembre. La météo estivale a confirmé la précocité du millésime sans pour autant la renforcer : les températures relativement élevées en journée ont été équilibrées par la fraîcheur des nuits et quelques épisodes pluvieux ont apporté l’eau nécessaire à une bonne progression des maturités. L’état sanitaire des vignes est globalement bon à excellent. Si les conditions météorologiques restent favorables, cette situation laisse présager d’un très beau millésime 2020 pour l’ensemble des AOP de la vallée du Rhône.

Lyonnais : une année très précoce

« Cette année est très précoce par rapport aux précédentes. On peut la rapprocher de 2003 qui avait été marquée par une canicule tardive. La différence, c’est que cette fois toute la saison s’est faite en avance », confie Nina Chignac, conseillère viticulture à la Fédération des vins des coteaux du Lyonnais. Sur ce secteur, les vendanges ont commencé au 15 août et devraient durer deux à trois semaines. Les quantités produites devraient être globalement bonnes même si la situation du vignoble est marquée par une forte hétérogénéité suivant les secteurs. L’état sanitaire étant optimal, la qualité devrait être au rendez-vous et le millésime 2020 se caractérisera sans doute par une faible acidité.

Beaujolais : état sanitaire excellent

Dans ce secteur, les vendanges se révèlent aussi particulièrement précoces. Les premiers coups de sécateurs ont été donnés le 20 août pour les beaujolais rouges et rosés et le 22 août pour les beaujolais blancs, ce qui fait de 2020 le millésime le plus précoce depuis 2003. Cette année, l’état sanitaire du vignoble apparaît excellent. Sur le plan climatique, la sécheresse due aux températures élevées de l’été est venue concentrer les raisins. D’après les derniers relevés, l’acidité se maintient à des niveaux moyens et le potentiel anthocyanique (ndlr pigments naturels du raisin qui procurent, lors de la cuvaison, leur couleur aux vins rouges et rosés) continue à bien progresser. En volume, la récolte 2020 devrait se situer dans la moyenne des cinq dernières années malgré une forte hétérogénéité d’une parcelle à l’autre.

Jura : une année normale

Même si la sécheresse a engendré une hétérogénéité importante, les vendanges qui ont démarré le 17 août invitent à l’optimisme. « Nous n’avons connu aucun gros coup dur cette année. Nous avons frôlé le gel mais sans être impactés et, après un mois d’avril particulièrement chaud, le reste de la saison s’est déroulé normalement. L’état sanitaire est très bon, la forte pression de l’oïdium a été bien contenue en début de campagne et le mildiou et la pourriture sont quasiment absentes chez nous. Nous avons aussi eu à gérer des attaques de guêpes mais globalement, nous avons de nombreuses grappes avec de belles architectures », explique Gaël Delorme, conseiller viticole à la Société de viticulture du Jura.

Bugey : les effets de la sécheresse

Dans le secteur du Bugey, les vendanges ont commencé le 17 août pour les raisins destinés à la production de vins pétillants. Pour tous les autres, les vendanges ont démarré au 24 août et devraient s’étaler jusqu’au 15 septembre. « Au niveau sanitaire, nous avons été plutôt épargnés par les maladies habituelles, ce qui nous a permis de bien travailler. La sécheresse a dans certains cas pu bloquer la maturité du raisin mais elle a aussi permis à d’autres d’obtenir des raisins plus sucrés. Pour le moment, il est impossible de dire si le millésime 2020 sera bon mais les premiers signaux sont en tout cas positifs », se réjouit Sandrine Bartolini-Bois, responsable du Syndicat des vins du Bugey.

Savoie : une année hors du commun

« Par sa précocité, cette année est d’ores et déjà hors du commun », fait remarquer Michel Quenard, président du syndicat des vins de Savoie. Si la plupart des vendanges ont démarré cette semaine, les premiers coups de sécateurs ont en effet déjà été donnés par les producteurs de pinot. « Nous n’avons pas subi d’épisodes de grêle, le printemps a été sec et chaud, juin a été plus humide mais nous avons ensuite connu un bel été ce qui devrait donner d’excellentes vendanges », se réjouit-il malgré tout. Côté sanitaire, la situation est tout aussi bonne. Si une sensibilité à l’oïdium s’est fait ressentir au printemps, les producteurs sont parvenus à protéger efficacement leurs vignes.

Ardèche : épisodes de grêle et sécheresse

Dans ce secteur, les vendanges ont déjà débuté par la récolte de chardonnay et se poursuivront jusqu’à la mi-septembre. En termes de quantité, le millésime 2020 devrait faire bonne figure et atteindre les 350 à 400 000 hl habituels pour l’IGP Ardèche et les 9 à 12 000 hl pour l’AOC côtes-du-vivarais. « Quelques épisodes de grêle très localisés ont affecté certains cépages comme le chardonnay mais globalement la météo a été bonne pendant cette campagne même si la sécheresse a engendré de la précocité. Malgré quelques cas de coulure, la situation sanitaire est bonne et la qualité sera au rendez-vous », explique Philippe Dry, directeur de la coopérative viticole ardéchoise Uvica.

Drôme : degrés plus élevés

Dans le Diois, le gros des vendanges a démarré autour du 19 août. « Sur le plan climatique, la campagne a été bonne avec une bonne pluviométrie au printemps et aucun incident de gel ou de grêle. Cela a permis d’être plutôt épargnés par les problèmes sanitaires comme le mildiou ou l’oidium », explique Nicolas Fermond de la Cave de Die. Comme partout, le secteur du Diois a malgré tout été impacté par la vague de chaleur qui pourrait avoir une incidence sur le millésime 2020. « Nous devrions déplorer quelques pertes de volume dues au stress hydrique qui est un vrai problème ces dernières années. La sécheresse devrait aussi faire perdre un peu d’acidité aux vins effervescents », confirme Nicolas Fermond.

Sur le secteur des crozes-hermitage, la récolte des blancs a débuté le 24 août, celle des rouges suivra. Si l’état sanitaire est bon, le potentiel de production reste « difficile à évaluer», indique Margot Huet, conseillère viticole à la chambre d’agriculture de la Drôme. La végétation était en avance et la vigne a souffert du sec après véraison. Résultat : « Les baies sont plus petites, les degrés plus élevés et les acidités plus basses cette année aux mêmes dates par rapport à 2019 », constate la technicienne.

Mâconnais : une vendange incertaine

Sécheresse oblige, l’estimation des vendanges 2020 est cette année plus incertaine que d’habitude. Grâce à une très bonne situation sanitaire, elles devraient malgré tout s’établir dans la moyenne habituelle. Pour les crémants, les premières vendanges ont dû être déclenchées au 12 août ce qui, de mémoire de producteur, est du jamais vu. « Cette année est très déroutante. La qualité est au rendez-vous mais on constate de grosses disparités entre parcelles. La pluviométrie a été bonne au printemps mais la sécheresse pendant la période de maturité a provoqué des phénomènes de concentration qui ont parfois impacté les rendements », confie-t-on du côté de la chambre d’agriculture de Saône-et-Loire.

Pierre Garcia

ROANNAIS - FOREZ / Pas si pressés de récolter

Les vignerons du Forez et du Roannais espèrent encore qu’une pluie vienne relancer la maturation et rééquilibrer les vignes « qui souffrent du sec, notamment les jeunes plantations de moins de 15 ans », signale Anne-Catherine Léger, technicienne viti-oeno de la chambre d’agriculture de la Loire. « Peut-être cette fin de semaine. » Quelques épisodes de grêle ont été signalés dans le sud Forez en juillet et dans le Nord du roannais en août mais pour les vignerons concernés « pas de remise en cause de la qualité, juste une perte sèche de volume ».

À noter aussi quelques cas isolés d’oïdium sur des parcelles sensibles mais globalement, l’état sanitaire est très sain ce qui permet aux vignerons de ne pas se précipiter. « La fleur nous annonçait une récolte au 25 août, elle n’est finalement pas si précoce. » Ce sont d’abord les raisins destinés à produire des effervescents qui seront récoltés dès cette fin de semaine, suivront une semaine plus tard, les vins tranquilles : rosés, rouges puis blancs. Anne-Catherine s’attend à un volume de récolte de l’ordre de 45 à 50 hl / ha, aussi bien en rouge qu’en blanc. « Nous étions partis sur une récolte proche de 2018 mais avec la sécheresse, elle s’est réduite. » Pour la vinification, la technicienne appelle à la vigilance sur le taux d’acidité, qui baisse rapidement, mais s’attend à des profils « avec bien plus de fraicheur que 2003 ».

David Bessenay