Ravageurs : pièges et caméras connectés, les outils de demain ?

RAVAGEURS / Dans un objectif de lutte contre les bioagresseurs, l’équipe d’Arvalis Lorraine a testé différents outils connectés sur sa station expérimentale Digiferme de Saint-Hilaire-en-Woëvre.

Ravageurs : pièges et caméras connectés, les outils de demain ?
Arvalis a étudié le potentiel du dispositif TrapView par rapport à un piège classique.

Le numérique au service de la lutte contre les ravageurs. C’est l’un des axes de travail de l’équipe d’Arvalis Lorraine depuis plus de deux ans. Parmi les essais réalisés, l’un d’entre eux étudie les ravageurs vecteurs de viroses : les  pucerons (Rhopalosiphum padi et autres espèces) ou les cicadelles (Psammotettixalienus). « Les potentiels de rendement peuvent être impactés à hauteur de 80 % pour une parcelle d’orge, et de 30 % sur du blé », prévient Justin De  Rekeneire, ingénieur régional. Dans ce contexte, une surveillance accrue est nécessaire. En effet, le changement climatique entraîne des périodes de risque de contamination plus longues, la chaleur étant favorable à la colonisation des parcelles  par des cicadelles et des pucerons, puis au développement des infestations sur les plantes. La surveillance est contraignante, du fait de colonisations irrégulières dans une parcelle et d’insectes parfois peu visibles.

Ainsi, l’utilisation de pièges connectés peut être un précieux soutien à l’agriculteur, pour le suivi de sa parcelle en détectant l’arrivée des ravageurs ailés. L’équipe d’ingénieurs d’Arvalis Lorraine s’est donc intéressée à l’outil E-gleek (Advansee), dès l’automne 2018. Il comporte une plaque jaune engluée sur laquelle viennent se poser les insectes ailés,
associée à une caméra pour la prise d’images et le comptage des ravageurs.

Des outils à améliorer

Cet outil permet le transfert web et une analyse précise des images en fonction de certaines caractéristiques des insectes. Il présente un système d’alerte pour informer, en temps réel, l’exploitant agricole de la présence ou non, d’insectes ailés sur la plaque. Pour autant, la qualité des photographies s’est parfois révélée médiocre (flou, ombre, éléments physiques venant fausser l’analyse, etc.). « Dans notre essai, 46 % des photographies se sont montrées peu exploitables. Par  ailleurs, l’analyse de l’algorithme de reconnaissance des pucerons est amenée à être améliorée », avoue l’ingénieur. Le
capteur de données peut surestimer le nombre des pucerons ailés piégés. Vis-à-vis des pucerons, ces capteurs  permettent d’alerter sur la colonisation des parcelles et donc sur la nécessité qui en découle d’aller suivre les infestations
directement sur les plantes pour positionner le traitement insecticide au bon moment. La recommandation établie sur les cultures est d’intervenir à partir de 10 % de plantes habitées par des pucerons, ou à partir d’une présence sur une durée supérieure à 10 jours.

En revanche, vis-à-vis des cicadelles, les recommandations sont en lien direct avec les captures comptabilisées sur piège englué : le traitement est recommandé quand le total hebdomadaire de captures atteint trente cicadelles par semaine. Leur identification précise est donc nécessaire, et attendue.

Des caméras pour observer le comportement des ravageurs

Il existe d’autres outils de surveillance connectés, comme les pièges. L’équipe a étudié le dispositif TrapView pour  observer la présence de ravageurs. L’expérimentation a porté sur les distinctions entre les différents pièges utilisés. Il
s’est avéré que le pic de vol était décalé avec l’utilisation du piège connecté par rapport au piège classique. Sur certaines
espèces, les ingénieurs ont également remarqué des différences de comptage. Ces outils restent donc à améliorer.
Les caméras connectées, quant à elles, permettent d’observer les ravageurs et prédateurs au champ, et d’en apprendre
davantage sur leur rôle au sein même de la parcelle. Elles ont donc entre autres un fort potentiel académique.
Un essai a d’ailleurs été réalisé sur les limaces, grâce au capteur Limacapt (De Sangosse). Ce capteur permet de
calculer le nombre de limaces qui se déplacent la nuit sur 1 m². Par ailleurs, l’observation des relations prédateurs / proies au champ est étudiée par le biais de l’outil PiScope. D’autres dispositifs de ce type sont en développement, comme la caméra Beecam, la caméra FaunaPhotonics, etc. Enfin, d’autres types de capteurs sont travaillés en recherche  fondamentale : analyser la fréquence sonore de vol des insectes, la fréquence sonore de chant ou les composés  organiques fondamentaux. « Le monde des insectes est très vaste et se baser sur l’analyse d’images est un véritable challenge. En effet, il existe une diversité considérable d’insectes et cela suppose d’avoir des algorithmes de détection très poussés », conclut François Brunisholz, spécialiste ravageurs à Arvalis.


Amandine Priolet

Le système E-gleek

Le système E-gleek