ENVIRONNEMENT
Connaître les pôles de production émetteurs de GES

Pauline De Deus
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Le projet Carbon, mené par Astredhor Auvergne-Rhône-Alpes dans le Rhône, a été développé afin de comptabiliser les émissions de gaz à effet de serre des productions horticoles.

Connaître les pôles de production émetteurs de GES
David Vuillermet, responsable d’expérimentation d’Astredhor Auvergne-Rhône-Alpes. ©LR_Apasec

Mené dans le cadre du dispositif Pepit, le projet Carbon Auvergne-Rhône-Alpes a rendu les résultats de sa troisième et dernière année d’exécution. Cette étude, menée par Astredhor Auvergne-Rhône-Alpes, en partenariat avec le bureau d’études Agrithermic et le CFPPA de la Côte-Saint-André (Isère), vise à développer un outil de comptabilisation des gaz à effet de serre (GES) adapté au secteur horticole. La tourbe représente 86 % des composants des substrats et est à l’origine d’une majorité de ces émissions de gaz à effet de serre.

L’impact du changement de substrat

L’objectif des essais menés était de réduire la proportion de tourbe présente dans les substrats, tout en maintenant un apport d’eau similaire par rapport à un témoin, ainsi que la qualité de production. Mais l’utilisation d’un substrat avec une teneur réduite en tourbe doit s’accompagner d’un changement de pratiques culturales comme le volume et la fréquence d’arrosage. Les essais menés en 2022 ont finalement démontré qu’un substrat réduit en tourbe ne signifie pas nécessairement une augmentation des volumes d’arrosage. Néanmoins, la conséquence est une baisse de la qualité de production. L’étude réalisée au printemps 2022 a utilisé trois plantes modèles : labelia, diascia et verveine. L’arrosage étaitautomatisé avec un déclenchement en fonction de la perte en eau indiquée par une balance connectée. Le volume d’arrosage était, quant à lui, spécifique par rapport aux caractéristiques du substrat. L’essai de la modalité M4, dans lequel les plantes étaient cultivées avec le substrat 1NP (Klasmann) sans tourbe, a impliqué un arrosage inférieur au témoin, mais a démontré une baisse de la qualité de production. Les diascias menées avec la modalité M4 ont connu une diminution de développement marquée de la biomasse aérienne, tandis que la modalité M3, dotée de 50 % de tourbe, avait des résultats intermédiaires. Dernier élément constaté : la modalité M4, sans tourbe, provoque un système racinaire plus faible. Cet essai a ainsi démontré que la diminution de l’empreinte carbone de la culture par le changement du substrat pourrait avoir un impact négatif sur le développement des plantes.

Estimer son bilan carbone

Parallèlement à ces évaluations d’itinéraires de productions, un outil destiné à diagnostiquer les émissions de gaz à effet de serre a vu le jour. Dix entreprises de production horticoles et pépinières l’ont utilisé, afin de connaître le poids que représente l’énergie, le substrat et le plastique, dans les émissions. « Le diagnostic m’a permis de faire unbilan global chiffré de nos émissions de gaz à effet de serre pour la production de nos plants d’aromatiques », a témoigné Sophie Loetscher, de l’entreprise Les Herbes Champenoises, qui a estimé que 45 % de ses émissions provenaient du substrat, contre 12 % pour le poste énergie, malgré une production hivernale. « Ces résultats “contre-intuitifs” nous donnent des axes d’amélioration pour réduire notre empreinte carbone. » Thierry Jarorsson, horticulteur dans la Loire, a par exemple fait le choix de diminuer la teneur en tourbe du substrat. D’autres producteurs s’intéressent davantage à l’utilisation de la fibre de laine intégrée en petits morceaux et déjà pratiquée en Suisse.

Astredhor Aura et Léa Rochon

Une méthode de comptabilisation multi postes

L’estimation du bilan d’émission de GES commence par la description de l’itinéraire de culture : identification, quantification des intrants et des équipements de production, dont les supports de culture. Pour la consommation énergétique, l’outil prend en compte la modélisation du climat en fonction d’une consigne de température, mais également l’énergie prise par les constructions et les matériaux. Pour chaque activité, le facteur d’émission (kg CO2e) correspondant lui est associé. Les postes d’émission recherchés sont l’énergie, le pot, la plaque, la fertilisation et le substrat. Néanmoins, le facteur transport ne fait pas encore partie du calcul. L’outil est construit sur un schéma dynamique, via un tableau Excel, qui permet de faire des simulations en amont de la production. Le périmètre étudie peut-être la plante, le m² ou l’entreprise.

L’Atheta, un auxiliaire pour un traitement de fond
Isalyne Gatheron. ©LR_Apasec
LUTTE BIOLOGIQUE

L’Atheta, un auxiliaire pour un traitement de fond

L’institut technique Astredhor Auvergne-Rhône-Alpes a expérimenté l’élevage et l’utilisation du prédateur Atheta contre les ravageurs des cultures sous serre. Le point avec Isalyne Gatheron, conseillère horticole du site.

Pourquoi introduire des Athetas dans les cultures sous serre ?

Isalyne Gatheron : « Les Athetas sont des coléoptères auxiliaires qui se nourrissent des ravageurs présents uniquement dans le sol, et donc dans le terreau. En horticulture, l’Atheta se nourrit des mouches des terreaux, des thrips et des chenilles terricoles. Néanmoins, lorsque les ravageurs sont adultes et évoluent dans les feuilles, l’Atheta ne remonte pas jusque-là. Son but est bien de manger des larves dans le sol. C’est un traitement de fond, il faut donc l’associer à d’autres auxiliaires qui cibleront les feuilles des plantes. »

Quelle quantité d’Athetas est nécessaire en fonction de la surface ?

I.G. : « Nous conseillons d’introduire 500 individus à 15 jours d’intervalle, soit 1 000 individus, pour une surface de 500 m². Réintroduire 500 individus au bout de 15 jours permet d’éviter d’avoir des périodes creuses, car les premiers individus introduits vont faire leur descendance et ne vont pas aller explorer les plantes dès le début. Il est également important de protéger l’élevage d’Atheta du soleil direct, en plaçant le seau en plastique sous une tablette en plein été. Sa température d’efficacité est comprise entre 12 et 33 °C. »

Quels sont les avantages et les contraintes de l’utilisation des Athetas ?

I.G. : « Les Athetas permettent de réduire l’utilisation d’insecticides, ainsi que les coûts des auxiliaires en misant sur une installation longue. Mais il faut pouvoir surveiller l’élevage, contrôler l’humidité du terreau (100 à 300 ml par semaine selon le climat), nourrir les Athetas (150 à 200 ml de flocons d’avoine ou du broyat de céréales) et déplacer les contenants à différents endroits de la culture, au minimum une fois par semaine. »

Propos recueillis par Léa Rochon

Astredhor Auvergne-Rhône-Alpes est un institut technique et d’expérimentation disposant de 2,7 ha de cultures sous abri ou en plein champ à Brindas, dans le Rhône. ©LR_Apasec
Démocratiser l’utilisation de sondes tensiométriques
La société française Weenat commercialise des tensiomètres, vendus en kit de six sondes, présentant deux dimensions différentes. ©Weenat
IRRIGATION

Démocratiser l’utilisation de sondes tensiométriques

Astredhor Auvergne-Rhône-Alpes a testé l’utilisation de sondes tensiométriques qui permettent de mesurer la disponibilité en eau du sol en cultures de plein champ et en pot.

Les sondes tensiométriques mesurent la force nécessaire pour extraire l’eau du sol par les racines. Les valeurs données auront la même signification entre différents types de sol ou de substrat. Chaque tensiomètre est composé d’une bougie poreuse en céramique surmontée d’un tube. À l’intérieur, se trouve un capteur, dont le but est de traduire les variations de courants électriques en tension exprimée en centibar (cb). Selon l’institut technique Astredhor Aura, cet outil est facile d’utilisation et présente un bon rapport qualité-prix. Les sondes tensiométriques seraient idéales pour s’assurer que les programmes d’irrigation sont bien adaptés aux cultures.

Pour les cultures de plein champ

En culture de plein champ, Astredhor Aura recommande de répartir les sondes sur la parcelle, afin de couvrir l’ensemble des disparités du sol. L’objectif est ensuite de les implanter entre deux goutteurs, à la limite des bulbes d’irrigation. Afin de les installer correctement, il est nécessaire de les immerger dans 10 cm d’eau, cinq minutes avant l’implantation, puis de les implanter à la même profondeur que les racines des cultures. Pour fonctionner correctement, la bougie doit être en contact avec la terre. Les valeurs affichées, de 0 centibar (sol saturé) à 150 centibars (réserve en eau du sol presque épuisée), définissent l’état hydrique du sol. Le confort hydrique se situe entre 20 et 50 centibars, tandis que le seuil de déclenchement correspond à une valeur comprise entre 50 et 90 centibars.

Pour les cultures en pot

Les tensiomètres sont encore peu développés pour être utilisés en cultures en pot, qui sont des petits contenants. Astredhor Aura conseille donc d’implanter les sondes sur les cultures les plus exigeantes en eau. Leur installation nécessite d’enlever un peu de terre pour ne pas tasser le substrat, de positionner le tensiomètre entre le collet de la plante et le bord du pot et d’enfoncer la bougie à mi-hauteur du pot. Si l’irrigation est localisée, le tensiomètre ne doit pas être trop proche du goutteur. En culture hors-sol, la zone de confort hydrique se situe entre 1 et 10 centibars.
À partir de 30 centibars, les cultures sont en léger stress hydrique. Actuellement, deux sondes tensiométriques font référence sur le marché : les sondes WaterMark et les sondes Weenat. Les prix des kits varient de 276 € à 1987 € pour WaterMark. Les kits Weenat coûtent 1 650 € ou 2 190 €, selon la taille des sondes. Weenat propose également un abonnement à 168 € par an.

Astredhor Aura et Léa Rochon