ENTRETIEN
« Je veux que les agriculteurs se sentent au Département comme à la maison »

Mylène Coste
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Olivier Amrane, président du conseil départemental de l'Ardèche, et Matthieu Salel, vice-président du Département en charge de l’Agriculture, de l’Environnement et du Tourisme, répondent à nos questions.

« Je veux que les agriculteurs se sentent au Département comme à la maison »
De gauche à droite : Matthieu Salel et Olivier Amrane.

Une même délégation rassemble Agriculture, Environnement et Tourisme : est-ce déjà un message ?

Olivier Amrane : « Nous avons voulu marquer une rupture par rapport à ceux qui, parfois, ont pu opposer agriculture et environnement. C’est un marqueur fort. Nous voulons renouer avec le bon sens paysan.  

Matthieu Salel : « Les problématiques agricoles et environnementales ne peuvent pas être cloisonnées. Il faut en finir avec l’agribashing, et je crois que nombre d’élus locaux, de tous bords, l’ont compris. Les agriculteurs sont les premiers artisans de l’environnement, de nos paysages. Si l’Ardèche a le visage qu’elle a aujourd’hui, et qu’elle attire autant les touristes, c’est grâce à eux ! Agriculture, environnement et tourisme sont interconnectés, et ce sont surtout nos principaux atouts économiques. »

Plus globalement, quelle place accorderez-vous à l’agriculture durant ce mandat ?

O.A. : « Dès la première assemblée plénière, l’agriculture a été au cœur des discussions et ce n’est pas un hasard. C’est l’une de nos priorités. Nous voulons que les agriculteurs se sentent au Département comme à la maison, et renouer avec une confiance mutuelle, qui avait pu se distendre avec l’ancienne majorité. Nous voulons là marquer un vrai changement. »

Le plan régional « châtaigneraies traditionnelles » touche à sa fin et la filière travaille à son renouvellement. Serez-vous du rendez-vous ?

M.S. : « Nous allons poursuivre et amplifier le soutien aux filières dans le cadre des plans de filière régionaux. Cela vaut évidemment pour la châtaigne, qui est notre emblème et l’un de nos atouts touristiques. La Région souhaite renouveler le plan châtaigneraies traditionnelles et nous en serons évidement les partenaires. Nous souhaitons également faire coïncider les calendriers de ce plan avec celui de la revalorisation de la filière bois de châtaignier, afin d’optimiser notre soutien. »

Et les autres filières ?

O.A. : « Nous serons aux côtés de la Région pour soutenir et valoriser chacune des filières, et ce n’est pas la loi NOTRe [qui, en 2015, a transféré la compétence « économie agricole » des Départements vers les Régions NDLR] qui nous en empêchera ! Nous allons également nous pencher sur d’autres filières comme la myrtille : nous y travaillons actuellement avec les professionnels et Jean-Pierre Taite, vice-président de la Région à l’Agriculture, viendra prochainement en Ardèche pour annoncer le lancement d’un nouveau plan pour les myrtilleraies. »

Comment accompagner l’approvisionnement local, notamment dans les cantines des collèges et Ehpad ?

O.A. : « Nous allons sortir de « Mon collège s’engage », qui avait été mis en place par l’ancienne majorité. Le repas « alternatif » hebdomadaire imposé aux élèves, on n’en veut pas ! Les élèves doivent avoir le choix de manger de la viande ou non. »

M.S. : « Pour promouvoir les produits locaux dans ces établissements, il faut avant tout convaincre les cuisiniers, car il n’est pas toujours facile de cuisiner ces produits. C’est pourquoi nous allons proposer des primes à ceux qui acceptent de jouer le jeu du local. Il faudra aussi mettre le prix : on ne peut pas faire un repas ardéchois à 2 € ! »

Comment accompagner le renouvellement des générations en agriculture ?

M.S. : « À l’échelle régionale, la dotation jeunes agriculteurs (DJA) a déjà été doublée durant le dernier mandat. La profession et les Jeunes agriculteurs JA de l’Ardèche, sont déjà très bons sur ce sujet : nous n’allons pas nous mettre au milieu ! Toutefois, nous pouvons être des relais et des facilitateurs auprès des maires et des services de l’État, sur des questions foncières par exemple. »

Les enjeux climatiques sont au cœur des préoccupations du monde agricole. Comment accompagner la résilience de notre agriculture ?

O.A. : « C’est un enjeu majeur. La question de l’eau en particulier est un sujet central, et je m’engage à prendre personnellement le dossier de l’eau sous mon épaule. Cela vaut pour les enjeux d’eau potable et de qualité des réseaux, en lien avec les communes, comme pour l’irrigation agricole. Avec les hausses des températures, l’agriculture va avoir besoin de plus en plus d’eau. C’est pourtant un discours qui n’est pas compris partout, certains parlent même de reconversion des vignes… C’est aberrant ! Sur ce sujet, on veut faire de la pédagogie, être un relais entre les agriculteurs et l’Etat mais aussi la population. Il faut absolument pouvoir stocker l’eau l’hiver ! L’Espagne stocke près de 13 % des pluies hivernales, quand la France n’en retient pas même 0,05 % ! On ne peut pas s’y résigner. Nous avons déjà pris contact avec le préfet pour évoquer ce sujet, car nous ne pourrons rien faire si les services de l’Étatne sont pas avec nous. »

M.S. : « La Région et le Département soutiendront la création de retenues collinaires. Le 6 août prochain, nous serons sur le terrain à Arlebosc et le Crestet pour inaugurer les premières autorisations. Dans mon canton (Cévennes ardéchoises), des retenues collinaires ont d’ailleurs permis de recréer des milieux aquatiques là où il n’y en avait plus ! Nous allons aussi travailler sur le classement des cours d’eau. »

Propos recueillis par M.C.