PPAM
Une campagne « satisfaisante mais insuffisante »

Anaïs Lévêque
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La production de plantes aromatiques et médicinales est satisfaisante dans l’ensemble du département, excepté en cueillette où la récolte est faible et très hétérogène. Zoom sur l’actualité d’une filière en plein essor qui bénéficie d’un marché porteur, mais exigeant et spéculatif.

Une campagne « satisfaisante mais insuffisante »

La vague de froid printanière a retardé le développement de certaines cultures de plantes aromatiques et médicinales et la levée des semis, endommageant aussi les premiers bourgeons naissants. Mais les pluies abondantes sont arrivées à temps pour assurer une belle campagne. Sur certains secteurs, le gel d’avril a entraîné des dégâts, touchant des cultures peu avancées qui sont bien reparties. Tardive, la récolte semble satisfaisante en Ardèche. « Nous arrivons à respecter nos engagements de volumes et de qualité vis-à-vis de nos clients », indique Guillaume Balay de PAM Ardèche, qui regroupe une trentaine de producteurs et autant de cueilleurs. Même constat pour les producteurs de Vivacoop : « C’est satisfaisant mais insuffisant », nuance toutefois Marc Mirabel, président de Viva Plantes qui compte un peu moins d’une centaine d’adhérents. « La météo n’aura pas été favorable à la cueillette, la récolte est faible et très hétérogène, sauf pour le sureau, le thym, le romarin. Les pluies aléatoires ont laissé une fenêtre de tir beaucoup plus courte que d’habitude pour la cueillette, donc compliqué la récolte, abimé rapidement les plantes… Les volumes de bourgeons restent faibles également. » L’arnica, qui présentait une très faible récolte en 2020, apporte une meilleure production mais encore insuffisante par rapport à son potentiel : 3 tonnes cette année pour Viva Plantes, contre 5 à 6 t habituellement. Les pluies ont aussi contrarié le développement de la teneur en huile des plantes, laissant présager une baisse des rendements en huiles essentielles.

Une filière exigeante sur la qualité et traçabilité des plantes

Les entreprises de plantes aromatiques et médicinales ne cessent de se développer en Ardèche. On compte une centaine de producteurs et des cultures de petites surfaces principalement, à destination d’une production de plantes sèches, en frais ou congelé, mais aussi de distillation en huiles essentielles.

Trois groupements de collecte et de commercialisation sont présents dans le département : la coopérative Vivacoop (Saint-Sernin), la Sarl PAM Ardèche (Vals-les-Bains) et la Sica Viva Plantes (Vals-les-Bains). Ils se démarquent grâce à la qualité et la traçabilité de leur production. PAM Ardèche a opté pour le label bio Ecocert et Biopartenaire qui défend des engagements équitables entre partenaires économiques. Viva Plantes s’inscrit sous le label « Bio. Français. Equitable » qui garantit des échanges commerciaux équilibrés et durables. Viva Coop assure une grande partie de sa production en AB.  

Ces engagements répondent aux attentes du marché et des consommateurs, de plus en plus soucieux de connaître l’historique complet des plantes, qu’elles soient issues de cultures ou de cueillette, ainsi que de leur transformation. Pour Viva Plantes qui commercialise sa production avec les secteurs agroalimentaire et médical « le marché est de plus en plus complexe, exigeant sur les analyses qualitatives. Il faut rassurer et assurer le bien-être des personnes avec des plantes calibrées à la demande des clients, explique Marc Mirabel. Nous sommes submergés de demande d’informations sur nos plantes, nos conditions de travail et d’organisation de la coopérative. Obtenir le label « Bio. Français. Equitable » nous a permis de mettre à plat toute notre démarche et nos savoir-faire (cueillette, collecte, séchage, expédition) et répondre avec moins d’appréhension à ce que nos clients nous demandent. » 

Un marché porteur mais spéculatif

Face à ces exigences, « il est important que les producteurs qui ne possèdent pas de marché d’écoulement travaillent avec des groupements de collecte et de commercialisation pour s’en sortir », signale Isabelle Boulon-Chanut, conseillère Ppam à la Chambre d’agriculture de l’Ardèche. Un constat partagé par le président de Vivacoop, Daniel Vernol : « Le monde des plantes est particulier et compliqué. Il y a beaucoup moins d’opérateurs français que dans les filières de fruits et légumes, et ils travaillent sur des quantités assez limitées. Il y a tout un travail important à faire en amont pour s’assurer que la production soit vendue, pour garantir un prix correct aux producteurs... »

D’autant plus que la filière bénéficie d’un marché très porteur mais spéculatif, marqué par une balance commerciale française déficitaire et une progression spectaculaire de mise en cultures sur le territoire national. « Espérons que cela dépoussière la filière française et ouvre des perspectives, il faut sortir de ces monopoles d’importations », estime Marc Mirabel.

Pour se démarquer et prévenir l’avenir, divers essais de mise en culture sont engagés sur des espèces encore inexistantes en France et très recherchées par les secteurs de l’herboristerie, la cosmétique, l’agroalimentaire et la pharmacie. Parmi elles figurent l’arnica, implanté depuis plusieurs années en Ardèche, mais aussi la rhodiola et le sisymbre. Des réflexions sont aussi en cours sur les cultures de sureau dans le but de gagner du temps sur la cueillette. « Ces nouvelles productions de niche peuvent être très intéressantes pour nous car il n’est pas certain que nous soyons assez compétitifs sur les plantes que nous produisons ou cueillons habituellement et qui arrivent massivement sur le marché français », ajoute Didier Blache.

ZOOM / Conjoncture et commerce extérieur

Après une année 2020 marquée par des difficultés d’écoulement, les ventes de Ppam à la production ont repris leur rythme, indique FranceAgriMer en juin dernier. Les exportations des plantes aromatiques et médicinales (plantes entières, parties de plante ou graine séchées) ont légèrement augmenté en 2020, évaluées à 13 622 tonnes et 96 millions d’euros, notamment celles des plantes médicinales (+10% en volume, principalement vers l’Allemagne, des Etats-Unis et la Pologne). Les importations, quant à elles, ont augmenté de 24% en volume (+5% par rapport à 2019) et 35% en valeur (+13%), évaluées à 49 420 tonnes et 212 millions d’euros. Les principaux fournisseurs sont des pays européens (Allemagne, Espagne, Pays-Bas), mais aussi asiatiques (Chine et Inde) ainsi que le Maroc et la Turquie. 

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