PRÉVENTION
Mise à l’herbe : Un exercice à hauts risques sanitaires

La mise à l’herbe est une période attendue par les éleveurs laitiers. Cette étape décisive doit être bien anticipée, tant au niveau de la transition alimentaire, de la prévention du parasitisme interne et externe que des maladies transmissibles entre animaux. 

Mise à l’herbe : Un exercice à hauts risques sanitaires
En premier lieu, il faut veiller à opérer une transition alimentaire lente sur trois à cinq semaines.
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Le docteur Sébastien Mouillard, vétérinaire conseil au GDS de l’Ain. ©MB

Ces dernières années de sécheresse et de canicule ont pesé sur les volumes de fourrages. Aussi, les éleveurs laitiers peuvent être tentés, si les conditions sont propices, tôt dans la saison, d’avancer la mise à l’herbe afin d’économiser les stocks. « S’il faut bien être opportuniste, cette étape décisive mérite d’être préparée sérieusement pour ne pas s’exposer à des problèmes sanitaires très pénalisants », insiste le docteur Sébastien Mouillard, vétérinaire conseil au GDS de l’Ain. 

Une transition alimentaire longue et progressive

En premier lieu, il faut veiller à opérer une transition alimentaire lente sur trois à cinq semaines. Elle a pour but d’acclimater la flore du rumen à la nouvelle ration et éviter ainsi une mauvaise assimilation, voire des phénomènes d’acidoses. Plus la mise à l’herbe est précoce, plus la transition alimentaire pourra être longue et progressive. Dès que la portance des sols le permet, même si la pousse de l’herbe est encore rare, les vétérinaires conseillent de sortir le troupeau par petites étapes. Au début, quelques heures dans la journée, l’après-midi de préférence. 

Dans le même temps, dans la ration, il faudra tenir compte de la teneur azotée élevée de l’herbe, en diminuant graduellement les concentrés azotés à l’auge. Cette herbe jeune, gorgée d’eau, est pauvre en cellulose et en amidon. Cette carence demandera à être compensée avec du foin ou de la paille, des céréales, de l’ensilage de maïs. Et pour corriger sa faible teneur en magnésium sodium et sélénium, il sera important de mettre à disposition du troupeau des blocs de sel enrichis en minéraux et oligo-éléments afin d’éviter des pathologies, comme la tétanie d’herbage, la maladie du muscle blanc. 

Parasitisme interne et externe

Le parasitisme, interne et externe, est l’autre grand risque sanitaire engendré par la mise à l’herbe. Ce sont les jeunes de l’année, lors de leur première sortie, qui sont les plus exposés aux strongles digestifs. « En concertation avec son vétérinaire, l’éleveur va faire en sorte de développer chez les génisses, au cours des deux premières années de pâture, une immunité forte tout en préservant leur croissance », explique Sébastien Mouillard. « La stratégie consiste à traiter préventivement avec un vermifuge avant la mise à l’herbe initiale. Puis les bêtes vont au pré afin d’être exposées brièvement aux parasites. Elles reçoivent ensuite une nouvelle dose de vermifuge. »

Pour la deuxième année de mise à l’herbe, le vétérinaire du GDS 01 explique que l’on laisse les animaux se contaminer. Comme leurs systèmes immunitaires ont déjà été confrontés au parasite, leurs organismes sont en capacité de développer leur immunité. Il faudra bien entendu déparasiter les bêtes, avant le retour à la stabulation. Grâce aux coproscopies (examens des excréments), on pourra administrer un traitement raisonné. Selon lui, en suivant ce protocole, les adultes ne doivent pas avoir besoin de traitement.

Douve : veiller à clôturer les mares

Autres parasites dangereux, la grande et la petite douve et les paramphistomes. Ils sont positionnés au pied de l’herbe dans les zones humides et inondables, en bordure des rigoles et des ruisseaux. La grande douve a un hôte intermédiaire, une limnée, un petit mollusque gastéropode d’eau douce. La petite douve est également propagée par une limnée puis une fourmi. La prévention passe par la gestion des pâtures en éliminant les facteurs à risque comme les zones humides qui favorisent le développement des douves et du paramphistome. « Il est important de clôturer largement les mares afin que le troupeau ne soit pas exposé », conseille Sébastien Mouillard. Prévoir aussi un traitement insecticide externe pour prévenir les tiques porteuses de nombreuses maladies, les mouches, les taons…

Garder une bonne conduite

Le vétérinaire du GDS rappelle qu’il faut continuer d’être vigilant, et procéder à une surveillance importante, même lorsque les bêtes sont au pâturage. Mettre à disposition du foin, même si elles en consomment peu. Afin qu’elles disposent d’une eau de qualité en quantité suffisante, il est conseillé de procéder à une analyse bactériologique du puits, de la source ou du forage … Penser au parage des onglons et des pieds, pour éviter les boiteries et préserver de bons aplombs. Pour éviter la propagation de la BVD (diarrhée virale bovine), prévoir de doubler les clôtures pour freiner les éventuels contacts, mufle à mufle, en cas de voisinage avec d’autres troupeaux. 

Magdeleine Barralon

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