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Sécheresse : « On ne veut plus revivre ça »

Le préfet et les élus se sont rendus sur l’exploitation de Dylan Chirouze à Vernoux. L’occasion d’échanger avec de jeunes agriculteurs déjà confrontés à la sécheresse.

Sécheresse : « On ne veut plus revivre ça »
Nicolas Garcin et Dylan Chirouze

Mêmes profils, même passion : Dylan Chirouze et Nicolas Garcin, la vingtaine, sont tous les deux jeunes éleveurs de vaches laitières à Vernoux. Le premier élève une cinquantaine de montbéliardes et leurs suites, avec 75 ha de SAU dont 7 ha de céréales et 5 ha de châtaigniers, le reste en prairies naturelles. « J’irrigue le maïs grâce à un lac collinaire que mes parents ont construit dans les années 1990, mais qui connait des problèmes de fuites et n’est plus suffisant aujourd’hui, explique-t-il. Lorsque je me suis installé l’an dernier, j’avais pour projet de le rénover mais je me suis buté à l’administration qui considère qu’il est situé sur un cours d’eau... Les frais d’études m’ont coûté cher, environ 20 000 € ! » S’il a pu irriguer ses maïs une partie de l’été, le lac s’est asséché dès le début du mois d’août : « J’aurais eu besoin du double d’eau pour tenir. Du coup, j’ai du acheter du maïs dans la Drôme… » Son voisin Nicolas Garcin, dont l’exploitation est similaire à la sienne, n’a pas eu les mêmes soucis. Alimenté par un lac privé et une retenue collective, il a pu irriguer 12 ha de maïs pour nourrir son troupeau de montbéliardes. Une preuve supplémentaire, de l’importance de l’accès à l’eau.

Des fruitiers arrachés, des animaux vendus

Tous les éleveurs n’ont toutefois pas eu la possibilité d’irriguer. « Nombre d’entre eux ont dû rentrer les animaux au bâtiment dans l’été et puiser dans les stocks de fourrage, insiste Nathalie Soboul. C’est du fourrage en moins pour l’hiver, qu’il va falloir aller chercher ailleurs. C’est du transport et des frais en plus ! » 

Le lac de Dylan Chirouze s'est asséché au milieu de l'été

Le lac de Dylan Chirouze s'est asséché au milieu de l'été
Le lac de Dylan Chirouze s'est asséché au milieu de l'été

L’élevage est loin d’être la seule activité touchée. Toutes les productions ont souffert de la canicule et du manque d’eau. « La récolte des fruits d’été a été catastrophique et les arboriculteurs s’inquiètent déjà des conséquences du stress thermique sur la mise à fruits 2023, affiche Edith Cabello, agricultrice à Saint-Marcel-d’Ardèche. Ce n’est guère mieux dans les vignes. On a même des plantiers qui crèvent ! Elle affirme : il y a des éleveurs qui décapitalisent, et nous on arrache des arbres fruitiers. Il faut réagir ! »

« Il faut une aide d’urgence pour passer l’hiver !»

Devant l’ampleur des dégâts, Benoit Claret en appelle à un soutien des services de l’État : « Nous demandons que toute l’Ardèche soit reconnue dans le dispositif des calamités agricoles pour pertes de récoltes. Il y aura aussi des pertes de fonds en arbo et en vigne. Nous demandons également une aide d’urgence pour les éleveurs qui vont devoir acheter du fourrage cet hiver. » 

M.C.

Alain Benoit, jeune éleveur sur le plateau ardéchois, avait fait le déplacement depuis Saint-Cirgues-en-Montagne : « Même en montagne, la sécheresse a lourdement sévi. Il me manque 120 t de fourrage pour passer l’hiver, et je suis venu acheter du foin tout près d’ici, au Crestet, sur une exploitation qui a une retenue collinaire ! Il faut vraiment qu’on puisse multiplier les retenues, dans tous les territoires

Ils ont dit...

Nathalie Soboul, présidente de JA : « Si on ne veut pas demain manger des cailloux, il va falloir se bouger sur la question de l’eau ! »

Benoit Claret, président de la Chambre d’agriculture : « Depuis 15 ans, on fait des efforts pour limiter nos consommations d’eau, mais on ne peut pas faire mieux. Aujourd’hui nous devons, territoire par territoire, réaliser des ouvrages pour sécuriser la ressource en eau. »

Hervé Saulignac, député : « La question de l’eau est déterminante pour l’avenir de l’Ardèche. Il faut aussi se poser la question des moyens financiers qu’on lui accorde, et peut-être revoir nos priorités : construire un peu moins de routes et de salles polyvalentes, mettre plus dans les projets hydrauliques. »

Mathieu Darnaud, sénateur : « Il nous faut revoir le financement des Agences de l’eau pour que les fonds aillent davantage vers des projets d’irrigation agricole. »

Pour Olivier Dussopt , « il faut se donner les moyens de stocker l'eau l'hiver »

Pour Olivier Dussopt , « il faut se donner les moyens de stocker l'eau l'hiver »

En déplacement en Ardèche vendredi 2 septembre, le ministre du Travail Olivier Dussopt s'est montré favorable au stockage de l'eau l'hiver. « En France, on stocke à peine 1% des eaux de pluie l'hiver, contre plus de 10 % en Espagne. Il faut qu'on se donne les moyens et la possibilité de stocker l'eau l'hiver. »