Le 29 mai, l’économiste Pascale Hebel a animé une conférence lors de l’événement régional « Sourçons local » qui se déroulait dans le Rhône. L’experte a délivré ses analyses à propos des évolutions et attentes de la population française en matière de consommation alimentaire.
« Cela fait 30 ans que j’observe la consommation des Français et je n’aurais jamais imaginé qu’ils allaient moins manger du fait de leur incapacité à payer leur alimentation plus chère ». Pascale Hebel est directrice associée de la société de conseil spécialisée en data sciences C-Ways. Invitée par les organisateurs de l’évènement « Sourçons local », qui s’est déroulé dans le Rhône (lire encadré), l’économiste a partagé son analyse devant un public religieusement attentif. « Cette hausse des prix sur l’alimentation en un temps aussi court est inédite, les consommateurs ont donc diminué leur volume d’achat. En 2023, 37 % de la population française se déclarait être en insécurité alimentaire, contre 11 % en 2015. » Selon l’experte, cette baisse de la consommation a de fortes chances de se poursuivre durant le second semestre 2024. « Le poste alimentaire est une variable d’ajustement, car les Français font face à des dépenses contraintes, comme le logement qui pèse 25 % sur le budget total. Parallèlement, les dépenses liées à la santé augmentent, tandis que leurs remboursements s’amoindrissent. » Autant de facteurs qui laissent présager que cette hausse des dépenses contraintes est loin d’être terminée. Conséquences ? Les personnes en insécurité alimentaire ont augmenté la consommation de produits qui comportent des calories moins chères (produits céréaliers et conserves), au détriment de la viande, du poisson, des produits laitiers, des fruits et légumes et des aliments de qualité (bio ou labellisés).
« Le poste alimentaire est une variable d’ajustement »
Malgré ce contexte plutôt défavorable pour une certaine catégorie de consommateurs, la professionnelle note un regain d’intérêt pour l’achat de produits régionaux et la tendance du « one health ». « Les consommateurs qui achètent du local veulent faire changer les choses, ils se sentent proches des préoccupations des agriculteurs et veulent mieux manger pour leur santé. » D’un autre côté, la grande distribution perd progressivement du terrain, tandis que la restauration type « fast-food » en gagne auprès des jeunes et au détriment des restaurants traditionnels. Dans les grandes agglomérations, les magasins spécialisés en produits locaux et de proximité connaissent également une hausse de leur fréquentation. « Les populations âgées de 25 à 44 ans sont les plus en attente de ces produits-là », assure l’experte. Cette dernière appuie son propos avec une étude réalisée en avril 2024 qui évoque les freins à la consommation d’un produit. Le manque de transparence quant à l’origine apparaît en première position, tandis que le fait qu’il ne soit pas de saison apparaît en seconde position. Selon Pascale Hebel, regagner des volumes d’achat passera par la mise en avant de produits locaux qui « racontent une histoire et qui vont vers une juste rémunération des producteurs, tout en prenant en compte la question du genre et la transparence ».
Léa Rochon
Une quatrième édition réussie
Le 29 mai, l’événement « Sourçons local » a permis aux producteurs, transformateurs et distributeurs de produits régionaux de se rencontrer à Villefranche-sur-Saône, dans le Rhône. Cette quatrième édition, organisée par l'association des industries agroalimentaires (Aria) Auvergne-Rhône-Alpes, La Coopération agricole et le Comité Auvergne-Rhône-Alpes Gourmand a réuni 50 entreprises exposantes, 35 acheteurs, 7 coopératives agricoles et a totalisé 310 rendez-vous planifiés. Des chiffres en constante augmentation, depuis la création de l’événement en 2021.