Les présidents de la FNSEA et JA, Arnaud Rousseau et Arnaud Gaillot, ont rencontré le Premier ministre Gabriel Attal le 13 février pour faire un point d’étape sur l’application des annonces gouvernementales des 26 janvier et 1er février. Les dossiers avancent… doucement.
Dire que les relations entre l’exécutif et les représentants agricoles se sont normalisées serait exagéré. Elles se sont plus plutôt tassées. De l’aveu des deux présidents de la FNSEA et JA, la réunion qui s’est tenue à Matignon et qui a duré près de deux heures s’est plutôt « bien passée ». « Une bonne réunion de travail », a estimé Arnaud Gaillot, président de JA. Les deux responsables agricoles voulaient inviter le gouvernement à accélérer le tempo dans l’application des annonces, car « il y a un décalage entre d’une part la parole publique et de l’autre la réalité concrète et l’administration sur le terrain », a souligné le président de la FNSEA. « La communication avec le ministère de l’Agriculture n’a pas été optimisée ces dix derniers jours » a-t-il concédé, regrettant de ne pas avoir « obtenu de compte rendu cadencé » de sa part. Il semble que le message ait été « reçu 5/5 » par le chef du gouvernement. Pour les deux leaders syndicaux, il est important de « s’assurer que ça va percoler, que ça va ruisseler ». Les dossiers évoqués sont connus et divisés en deux : ceux du court terme et ceux du moyen et long terme. Pour les premiers, il reste encore quelques ajustements sur les mesures d’urgence : MHE, tempêtes, paiement PAC… Les deux responsables agricoles, satisfaits de l’avancée de Bruxelles sur la dérogation jachère estiment que le gouvernement peut aller plus vite, en particulier sur l’élaboration du Plan élevage.
Nombreux chantiers
Sur ceux du moyen et long terme, le projet de loi d’orientation agricole qui sera axé sur l’installation et la transmission devra contenir des éléments de compétitivité et inscrire « la souveraineté alimentaire comme étant d’intérêt général », a dit le président de la FNSEA. Les deux syndicats agricoles demandent aussi que le principe « pas d’interdiction sans solution » soit clairement écrit dans le texte. Arnaud Rousseau a insisté sur les intentions des agriculteurs qui s’inscrivent dans la démarche de réduction des intrants : « Il n’y a pas d’opposition entre agriculture et écologie. Mais nous ne souhaitons pas d’interdictions sans solutions et encore moins de surtranspositions ». Dans le dossier phyto, il y a un indicateur européen et il faut y travailler et utiliser toutes les potentialités du Parsada1, a souligné Arnaud Rousseau. Il reste cependant de nombreux chantiers français et européens à défricher comme le ratio prairies, la directive émissions industrielles, la loi Égalim, celle sur le calcul des retraites agricoles au meilleur des 25 années, le zonage, les prêts bonifiés, le paiement de certaines DJA. « Certains jeunes agriculteurs attendent depuis un an », a expliqué Arnaud Gaillot, invitant les régions à ne plus tarder. La proposition de loi relative aux troubles du voisinage devrait être examinée par les parlementaires dans les prochaines semaines.
Le discours de Rungis a vécu
Le chef du gouvernement et les responsables agricoles ont convenu d’un rendez-vous mensuel pour faire le point sur l’avancée des travaux. Il sera initié après le Salon de l’agriculture et portera notamment sur le volet de la simplification réglementaire. « Il faut assurer la conduite du changement jusque dans les soutes », a répété Arnaud Rousseau. D’autant que sur le terrain, « les attentes sont toujours aussi élevées ». Arnaud Rousseau et Arnaud Gaillot seront reçus le 20 février par Emmanuel Macron à l’Élysée. L’occasion pour eux de lui demander d’ajuster son discours de Rungis2, car « ce discours a vécu », a tranché Arnaud Rousseau. « Il lui reste trois ans de mandat », a-t-il ajouté. Les agriculteurs veulent « des perspectives, une vision (…) pour que ça marche dans nos fermes françaises, avec des résultats probants ». Le président de la FNSEA demande au chef de l’État de venir au Salon avec « un message fort et clair ». Après le coup de semonce du mois de janvier, les agriculteurs restent mobilisés et n’excluent pas de revenir sur le terrain de l’action syndicale. « De notre part, il n’y a ni défiance, ni complaisance », a résumé Arnaud Rousseau.
Christophe Soulard
1- Le Plan d’action stratégique pour l’anticipation du potentiel retrait européen des substances actives et le développement de techniques alternatives pour la protection des cultures (Parsada) est doté d’une enveloppe de 250 millions d’euros.
2- Discours du 11 octobre 2017 prononcé aux États généraux de l’alimentation (https://www.elysee.fr/emmanuel-macron/2017/10/11/discours-du-president-de-la-republique-aux-etats-generaux-de-l-alimentation)