ENSEIGNEMENT
" Immerger nos étudiants vétérinaires dans le métier "

L’Institut polytechnique UniLaSalle a reçu, en mars 2022, l’agrément ministériel pour ouvrir une formation vétérinaire permettant d’obtenir le diplôme d’État de docteur vétérinaire. Interview de la directrice, Caroline Boulocher, vétérinaire.

" Immerger nos étudiants vétérinaires dans le métier "
Caroline Boulocher, vétérinaire et directrice de L’Institut polytechnique UniLaSalle à Rouen. ©CS_Actuagri

Vous avez accueilli, à la rentrée de septembre 2022, votre première promotion de futurs vétérinaires sur le campus UniLaSalle de Rouen en Normandie. Êtes-vous satisfaite ?

Caroline Boulocher : « Oui, naturellement, et je ne vous cache pas un certain soulagement. Cette première promotion concrétise l’aboutissement de quatorze années de travail et de négociations avec l’État. Le manque de vétérinaires est devenu chronique et s’accentue, en parallèle, l’offre de formation est numériquement insuffisante en France. En 2021, plus de la moitié (54 %) des vétérinaires qui se sont inscrits à l’ordre des vétérinaires ont eu leur diplôme à l’étranger, soit en dehors du contrôle du ministère de l’Agriculture. Il existe en Espagne ou en Roumanie des formations spécialement dédiées aux étudiants français, avec des cours dispensés à 100 % en français. Sans remettre en cause ces formations, il faut donner une alternative aux étudiants français qui partent à l’étranger non par choix mais en raison d’absence d’alternative en France. Notre formation participe donc à répondre au besoin croissant de vétérinaires en France. »

Combien manque-t-il de vétérinaires en France ?

C.B. : « Pour le seul secteur privé libéral, plus de 550 vétérinaires manquent par an si l’on se base sur les données du 7e Atlas démographique de la profession vétérinaire publié à l’été 2022 et sur les perspectives analysées au sein de l'Observatoire national démographique de la profession vétérinaire. C’est sans compter le secteur privé non libéral et le secteur public. Une donnée inquiétante est l’augmentation importante de sorties du tableau de l’ordre des vétérinaires (donc une sortie de l’exercice vétérinaire) chez les moins de 40 ans qui, en 2021, représentaient près de la moitié des vétérinaires sortants (697 sortants). Dans le même temps, les statistiques de l'Insee ont montré une croissance moyenne annuelle globale du marché vétérinaire de 7,7 %. »

Comment s’effectue la sélection pour intégrer votre Institut ?

C.B.  « L’entrée en première année passe par un examen du dossier scolaire et d’une lettre de motivation, puis d’un concours d’admission en présentiel. Les résultats du concours sont connus avant ceux du bac. Celui-ci se compose de quatre épreuves dont trois orales. Parmi ces trois épreuves orales, l’une d’elles sera effectuée en groupe, mais notée individuellement. Nous serons particulièrement attentifs à leur motivation et à leur perception du métier. Notre ambition est aussi d’élargir la diversité sociale des profils pour répondre aux besoins du territoire. »

En quoi votre formation se différencie-t-elle des écoles publiques ?

C.B. : « La formation que nous dispensons s’effectue en six ans contre sept et demi en moyenne pour les écoles publiques. Notre objectif est d’immerger nos étudiants le plus tôt possible dans le métier. Pour cela, ils ont notamment des cours d’anatomie, de microbiologie, de parasitologie… et des sorties sur le terrain dès la première année. Durant leur formation, les étudiants partent au total 36 semaines en stages-terrain répartis de la première à la sixième année. Il est capital qu’ils évoluent dans différents milieux professionnels et dans différents territoires. Au bout de la cinquième année, les étudiants obtiennent leur certificat d'études approfondies vétérinaires puis la sixième année, ils décrochent leur diplôme d’État de docteur vétérinaire, après la soutenance de leur thèse d’exercice, comme dans le public. »

Qui dit école privée dit un coût plus important que dans le public. À combien s’élève la scolarité ?

C.B. : « Il faut compter 13 000 euros par an sur les trois premières années et 17 500 euros par an de la 4e à la 6e année. Nous souhaitons que ces frais ne soient pas un élément bloquant à la candidature des étudiants. Aussi nous travaillons pour proposer différents dispositifs dont un système de prêts d’honneur (décote de 75 % des frais de scolarité pour 8 boursiers mention TB au bac). Tous nos étudiants boursiers titulaires d’une mention très bien bénéficient d’une décote de 25 % sur les frais de scolarité des trois premières années. De plus, notre enseignement clinique s’effectuera dans un cadre professionnel proche de la réalité du terrain à travers le système semi-distribué, unique en France, que nous développons. C’est un système où l’enseignement clinique s’effectue dans un cadre très académique au sein du Centre hospitalier de l’école vétérinaire UniLaSalle et d’un réseau de cliniques vétérinaires partenaires. »

Propos recueillis par Christophe Soulard