REPAS DE NOËL
Repas de famille : éléments d’autodéfense intellectuelle

Ah ! Les fêtes de fin d’année… Elles sont, pour beaucoup, synonymes de rassemblement. Repas de famille et soirées entre amis sont autant de situations propices à la discussion… et aux polémiques. Bien entendu, il est possible de rester seul chez soi pour les éviter. Le mieux reste tout de même d’arriver avec quelques arguments en poche. En voici quelques-uns pour vous aider. Second degré exigé !

Repas de famille : éléments d’autodéfense intellectuelle
Pour se préserver des embrouilles durant les repas de fête, évitez autant que possible les sujets délicats comme la coupe du monde au Qatar, la politique ou le foie gras !

« Quoi ? T’as pas encore vu [la dernière série à la mode] ? »

Dans le sillage de Netflix, le développement des plateformes de streaming a fait des séries un incontournables des conversations. Difficile d’y couper lors des fêtes de fin d’année… Chacun va citer ses œuvres préférées ou les dernières qu’il a vues et, à un moment, la discussion évoquera la série événement du moment. Si vous n’avez pas eu le temps ou l’envie de la regarder, plusieurs échappatoires vous attendent : avoir rattrapé votre retard avant ces retrouvailles (pas évident), dire que cela ne vous intéresse pas (ça jette un froid) ou que votre chien a mangé votre télécommande…

« Bah alors, le bébé, c’est pour quand ? »

Mesdames, si vous avez dépassé les 30 ans, vous avez forcément déjà entendu cette question indiscrète. Pourtant, qui, à part vous, est concerné par ce qu’il se passe à l’intérieur, si ce n’est votre partenaire (et encore…)  ? Santé, carrière, stabilité, bien-être, partenaire ou simplement manque d’envie, les raisons de ne pas vouloir procréer sont multiples et toutes légitimes. Eh oui, faire un enfant c’est être prêt à s’en occuper tous les jours pendant les 18 années suivantes (minimum). Alors bien sûr, ce n’est pas donné à tout le monde. Et puis on est déjà 8 milliards d’êtres humains sur terre, alors un de plus, un de moins…

Mesdames et messieurs, si vous posez cette question, sachez qu’elle est très indélicate… et on n’est plus au XVIIIe siècle : les femmes font (en général) ce qu’elles veulent.

Enfin, si vous êtes en plein projet bébé, que vous voulez rester discrète ou que vous avez des difficultés à concevoir, vous pouvez changer radicalement de sujet. Simple et efficace !

« Tu es sûr de vouloir te resservir ? »

Pour que les choses soient claires, cette question relève de la grossophobie (discrimination des personnes en surpoids ou obèses) ordinaire : elle ne se pose pas. D’abord parce que ce qu’il se passe dans votre assiette ne devrait pas être scruté par une autre personne que vous. Ensuite, parce que si vous avez encore faim, si vous vous sentez bien dans votre corps, si vous êtes en bonne santé, il n’y a pas de raison de se priver… surtout en cette période de fêtes. Vous pouvez donc remercier la personne de s’inquiéter et lui proposer de garder ses conseils nutritionnels pour elle car, jusqu’à preuve du contraire, vous êtes toujours le/la plus apte à connaître vos besoins. Les plus sanguins répondront : « Oui, et utiliser ma fourchette m’empêche de te tuer avec. »

Clara Serrano

Vous n’échapperez sans doute pas aux idées-reçues sur l’agriculture… 

« Non merci, la viande est bourrée d’antibio »

L'utilisation d’antibiotiques en élevage vise principalement à traiter les animaux malades, et non de manière systématique comme on l’entend trop souvent. Leur administration se fait sous le contrôle d’un vétérinaire, et le lait ou la viande d’un animal traité doit respecter un délai d’attente strict pour pouvoir être commercialisé. L’achat d’antibiotiques a également un coût, et les éleveurs ne les administrent pas à la légère !

Dégainer des chiffres reste le plus efficace. Selon un récent rapport de l’Anses, l’exposition globale des animaux aux antibiotiques a baissé de 47% entre 2011 et 2021, avec la mise en place du plan Ecoantibio. Et la baisse se poursuit : entre 2020 et 2021, cette exposition a reculé de 0,9% pour les bovins, 7,2% pour les porcs, 8,6% pour les volailles et 12,7% pour les lapins. Si cela ne suffit pas à convaincre votre interlocuteur, sortez la réplique fatale : « Mais au fait, tu n’avais pas donné de l’amoxicilline à ton chien, lorsqu’il était malade ? » Toujours selon l’Anses, les chats et les chiens ont reçu 10% d'antibiotiques de plus en 2021 qu'en 2020. Certes, on ne mange pas nos animaux de compagnie, mais les risques d’antibiorésistance sont renforcés… Et peuvent se transmettre à l’Homme.

« Vous, les éleveurs, vous polluez plus que les transports » 

C’est un raccourci qui circule souvent dans le débat public : l’élevage émettrait 14,5 % de gaz à effet de serre (GES), tandis que le transport ne dépasserait pas les 14 %. Et tonton René se fera un plaisir de vous ressortir ces chiffres, qu’il a entendu dans les médias ! Sauf que, pour le coup, ces deux chiffres ne sont pas comparables. Et pour cause : ils ont été obtenus par des méthodes différentes, comme l’a souligné l’Inrae. Pour l’élevage, le chiffre de 14,5 % émane de la FAO, qui utilise pour ses calculs le modèle des analyses de cycle de vie. Ce modèle englobe les GES produit par l’élevage au sens large, comprenant la production des aliments et intrants, la transformation des aliments, les transports, la consommation d’énergies... Pour les transports en revanche, le chiffre de 14% émane du Giec1, qui prend en compte uniquement les émissions de GES des véhicules en circulation, mais pas celles induites par la leur fabrication, ni les GES produits par l’extraction, le raffinage et le transport du pétrole. Avec la méthode utilisée par la FAO, il y a donc fort à parier que le chiffre pour les transports serait beaucoup plus élevé !

Sans nier les émissions engendrées par l’élevage, vous pouvez aussi rappeler tous les efforts fournis par les éleveurs pour réduire leurs emprunte carbone !

1.    Climate Change 2014 Synthesis Report - IPCC