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Le réchauffement climatique déjà perceptible dans les pays en développement

Depuis plusieurs années, le réchauffement climatique a des conséquences météorologiques majeures dans le monde entier. Les populations des pays en développement comptent parmi les premières victimes, notamment en matière d’accès à l’alimentation.

Le réchauffement climatique déjà perceptible dans les pays en développement
Comptant parmi les pays les plus pauvres d'Afrique, Madagascar est aussi l'un des premiers touchés par le réchauffement climatique. ©Claude Ollivier

Avec plus de 1,3 milliard d’habitants, l’Afrique est derrière l’Asie le deuxième continent le plus peuplé. Mais surtout, il est le plus pauvre et l’un de ceux qui sont les plus touchés par le réchauffement climatique. Très impliquée en Afrique aux côtés des agriculteurs, l'association de solidarité internationale, Agriculteurs français et développement international (Afdi) est un témoin précieux de l’impact du réchauffement climatique sur la vie des populations. Travaillant en lien avec le Sénégal depuis 1989, Bernard Rivoire, de l’Afdi Auvergne-Rhône-Alpes, raconte : « Depuis les années 1980, les températures moyennes ont augmenté de 3 °C ici. Mais surtout, la saison des pluies qui commençait vers le 15 juin pour se terminer fin septembre commence aujourd’hui fin juillet voire début août et les locaux font face à des phénomènes de pluies très intenses ».

Un impact direct sur l’activité agricole

En lien avec les organismes de météorologie, les cultivateurs tentent de s’organiser face à cette nouvelle donne. Car chaque année le même scénario se répète : ils sèment, sans vraiment savoir s’ils auront droit à des pluies diluviennes ou à plusieurs semaines de sécheresse. En parallèle, ils subissent une autre conséquence directe du réchauffement climatique : la hausse du niveau de la mer de près de 30 cm qui cause régulièrement des inondations. Une situation qui fait écho à celle vécue par Claude Ollivier à Madagascar, où ce chargé de mission pour l’Afdi Aura s’est installé il y a huit mois avec son épouse. « Le changement climatique, on en parle presque tous les jours ici à Manakara, au Sud-Est du pays. Au quotidien, il y a moins d’eau, plus de sécheresses et un dérèglement de la saison des pluies qui peut se décaler de plusieurs mois. Les producteurs de riz ont par exemple dû retarder leurs plantations et quand ils ont repiqué, les plantes étaient trop développées. Le décalage de la floraison a également impacté les producteurs de miel, nombreux ici », alerte-t-il. A Madagascar comme dans de nombreux pays en développement, le réchauffement climatique se conjugue à une montée endémique de la violence et des vols d’animaux ou de vanille. Ce qui se traduit par un accès plus difficile des populations à l’alimentation et un niveau de malnutrition inquiétant.

Des populations prises en otage

Observateur attentif du Burkina Faso, pays d’Afrique de l’Ouest qui vit à 80 % de l’agriculture, le vice-président de l’Afdi Aura, Joël Magne, observe quant à lui un autre phénomène que l’on retrouve dans plusieurs pays du Nord de l’Afrique : l’inexorable avancée du désert. « Le fait que le désert progresse rend l’activité agricole de plus en plus compliquée. Beaucoup de jeunes burkinabés de moins de 15 ans, qui représentent plus de la moitié de la population locale, peuvent être tentés de tomber dans les bras des groupes terroristes qui leur offrent plus d’argent que ce qu’ils pourraient gagner en travaillant la terre », explique-t-il. Développement de cultures de contre-saison, expérimentation de nouvelles variétés de fourrages, mise en place de systèmes agroécologiques… au Sénégal, à Madagascar, au Burkina Faso comme dans d’autres pays en développement touchés par le réchauffement climatique, des solutions existent. Mais leur accès n’est pas encore assez rapide pour répondre aux enjeux. « On parle beaucoup de migrants mais la question à se poser, c’est pourquoi des gens décident de partir de leur pays. Aux problèmes de violences ou de corruption s’ajoute dans ces pays le changement climatique, alors ils ne voient pas d’autre issue. Le phénomène de réfugiés climatiques deviendra majeur dans les années à venir », conclut avec fatalisme Joël Magne.

Pierre Garcia