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Éric Imbert : les fruits de l’Eyrieux n’ont pas dit leur dernier mot !

Mylène Coste
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Après avoir connu son heure de gloire dans les années 1980, l’arboriculture de la vallée de l’Eyrieux a entamé un long déclin. Aujourd’hui, Éric Imbert est l’un des rares producteurs de fruits du territoire, mais n’a rien perdu de sa passion.

Éric Imbert : les fruits de l’Eyrieux n’ont pas dit leur dernier mot !
Éric Imbert cultive une dizaine de variétés de pommiers dans la vallée de l'Eyrieux. Cette année, le gel a toutefois compromis sa récolte, avec près de 100 % de pertes sur certaines variétés.

Éric Imbert s’est installé en 1982 à Dunière-sur-Eyrieux, en plein âge d’or de l’arboriculture dans la vallée de l’Eyrieux. La pêche de l’Eyrieux, reconnue pour sa qualité, vivait ses meilleures heures. C’est d’ailleurs avec des pêchers, et uniquement des pêchers, qu’Éric Imbert a commencé sa carrière. « J’ai repris l’exploitation familiale à Dunière, et rapidement j’ai eu l’opportunité d’acquérir des terres à Saint-Laurent-du-Pape. Petit à petit, j’ai commencer à planter des pommiers. »

Entre 1970 et 1990, se produit un réel engouement pour la pêche de l’Eyrieux, sur fond de renouvellement variétal et de nouvelles techniques. Les arboriculteurs de la vallée jouissent de conditions climatiques idéales pour la production, d’une eau à portée de main, et d’un savoir-faire en matière de sélection, de greffe et de taille, la fameuse taille en « parapluie renversé ». Mais la chute des prix dans les années 2000, combinée aux aléas climatiques et à la concurrence, ont conduit au déclin progressif de la pêche sur le territoire. Il ne reste plus aujourd’hui que quelques traces de ce passé : « Il y a 40 ans, la plaine des Avallons - une trentaine d’hectares en bord de rivière à Dunière – était recouverte de vergers de pêches, se souvient Éric Imbert. Aujourd’hui, il n’y en a quasiment plus. »

Les cessations d’activité ou les départs en retraite sans reprise d’exploitation précipitent la chute de l’arboriculture dans la vallée de l’Eyrieux. De nouvelles activités agricoles voient le jour, le maraîchage notamment, avec les pommes de terre primeurs qui acquièrent bientôt une belle notoriété. Mais Éric Imbert, avec une poignée d’autres, perpétue la tradition arboricole. « Je suis passionné d’arbo ! J’aime travailler dans mes vergers, je ne pourrais pas faire autre chose ! »

Moins de pêches, plus de pommes

Dès ses premières années, Éric Imbert décide de planter des pommiers. « J’ai progressivement augmenté mes surfaces de pommes, et je continue dans cette voie aujourd’hui. La pomme craint moins le gel et résiste bien mieux que les pêchers dans les parcelles les plus gélives. Même si les cours des la pêche sont un peu remontés ces deux dernières années, nous avons subi une succession d’aléas climatiques… » La pomme présente un autre avantage : « On peut faire plus de volumes avec moins de surface. »

Aujourd’hui, Éric cultive environ 20 ha de vergers à cheval sur Dunières et Saint-Laurent-du-Pape. « J’ai 7500 m2 de cerisiers, 11 ha de pêchers avec une quinzaine de variétés et 8,5 ha de pommiers pour une dizaine de variétés, dont la principale reste la Pink Lady. Il poursuit : la saison de la pêche s’étale de juin à la fin août, puis j’enchaîne avec la pomme de mi-septembre à fin novembre. Tous mes vergers sont travaillés en agriculture raisonnée et certifiés Global gap. » Côté débouchés, l’arboriculteur livre l’ensemble de sa production à Rhoda-coop.

Pour lui, l’arboriculture a encore un bel avenir dans la vallée de l’Eyrieux. « Aujourd’hui, les jeunes qui s’installent ici sont davantage attirés par le maraîchage. Mais je suis persuadé que l’arbo, et notamment la pomme, sont tout à fait viables. Nos terrains sableux et filtrants se prêtent très bien aux pommiers et la pomme de l’Eyrieux est reconnue pour sa qualité et son goût ! » Lui-même devrait prendre sa retraite dans les prochaines années, mais n’a pour l’heure pas trouvé de successeur. « J’espère pouvoir trouver quelqu’un pour prendre la suite, j’aimerais beaucoup pouvoir installer un jeune et lui transmettre mon savoir-faire et ma passion ! »

Mylène Coste

Les abricotiers ont quasiment gelé à 100 %. Les pommiers, qui étaient en fleurs quelques jours avant le gel, ont également été fortement touchés et ne donneront guère de fruits.

« En 40 ans, jamais mes pommiers n’avaient autant gelé »

GEL / En quarante ans de carrière, Éric Imbert a connu des hauts et des bas. Mais jamais il n'avait subi un épisode climatique d'une telle violence que le gel d'avril dernier.

« L'an dernier déjà, nous avions eu des dégâts de gel sur pêchers. Mais cette année, c'est quasiment toute la récolte qui est partie en fumée, soit 100 % de pertes sur un potentiel de 200 t, déplore Éric Imbert. Je devrais ramasser 50 kg de cerises, au lieu des 5 à 6 tonnes que je peux faire habituellement. Quant à la pomme, les pertes sont énormes : 100 % de pertes en Pink Lady, ma principale variété ! La Golden a un peu mieux résisté, mais je ne devrais pas dépasser les 20 % d'une récolte normale. Sur un potentiel total de 350 t de pommes, c'est à peine si je ramasserai 20 t... En 40 ans, je n'avais jamais vu ça : d'ordinaire, la pomme résiste mieux au gel, mais cette année, c'est une vraie catastrophe. » Aussi compte-t-il sur les aides de l'État, sans lesquelles beaucoup d'arboriculteurs auront du mal à passer l'année : « J'ai un salarié avec lequel je travaille depuis 28 ans et pour la première fois, je n'aurais pas de travail pour lui ; c'est très difficile. J'attends de pouvoir recourrir au chômage partiel. » En temps normal, l'arboriculteur embauche une dizaine de saisonniers tout l'été pour les récoltes. Cette année, il n'y aura personne dans les vergers...