GAEC
Droit à l’essai : s’associer sur de bonnes bases

Très investies dans la structure Gaec et Sociétés, les deux agricultrices Brigitte Troucellier et Maryse Font militent pour le droit à l’essai pour la constitution d’un Gaec. Un an ponctué d’accompagnements humains réguliers pour savoir si le projet est viable.

Droit à l’essai : s’associer sur de bonnes bases
En 2021, une expérimentation sur le droit à l'essai a été lancée dans neuf départements pilotes. ©SC

Parce que travailler ensemble c’est une chose, mais travailler H24 ensemble en est une autre, depuis plusieurs années, les élus de Gaec et Sociétés défendent le principe du droit à l’essai. Ce « droit » existe depuis une trentaine d’années en Haute-Savoie pour les Gaec. Couplé à un suivi relationnel, il affiche de bons résultats. Concrètement, il donne la possibilité à deux personnes ou plus de tester un projet en commun sur une année, en vue de fonctionner au sein d’un GAEC. « Il s’agit de se poser, d’être accompagné pour confronter nos projets, nos modes de vie, nos visions de l’avenir. Pendant un an, on regarde si ça colle ou pas. Il y a trop d’enjeux pour prendre le risque de se tromper. Donc avant de s’engager, on se donne le temps pour savoir si ça va marcher ou non », résume Brigitte Troucellier, secrétaire adjointe de Gaec et Sociétés. Des fiançailles en somme, avant de convoler en justes noces sur des bases humaines forcément plus solides, mais qui requièrent un arsenal juridique et financier non négligeable.

Statut et financements en question

Récemment, le ministère de l’Agriculture a accepté le principe de droit à l’essai. Désormais, « il faut arriver à trouver un statut pour cette personne à l’essai et des financements car tout le monde n’a pas forcément les moyens de prendre un salarié pendant un an », explique Maryse Font, agricultrice en Haute-Loire également membre du bureau de Gaec et Sociétés. Si toutes les pistes sont actuellement à l’étude, neuf départements testent ce droit à l’essai, notamment la Haute-Loire, la Savoie, l’Ain, le Jura ou la Saône-et-Loire. « Chez nous en Haute-Loire, la chambre d’agriculture, le conseil départemental et le centre de gestion participent au financement aux côtés de l’agriculteur. Aujourd’hui, techniquement, nous pouvons monter des dossiers. Maintenant, il faut que nos institutions, les conseillers chambres mais aussi les Jeunes agriculteurs s’en emparent pour promouvoir le dispositif », poursuit Maryse Font.

L’humain au centre

Pour elle, tout comme pour Brigitte Troucellier, mettre en évidence l’importance des relations humaines dans les exploitations agricoles à travers un accompagnement juridique et social, ce n’est en aucun cas « faire du social ». Bien au contraire, « il s’agit d’un dispositif humain. Nous avons mis en place des formations aux relations humaines au niveau national avec Gaec et Sociétés. Nous avons fait labelliser cette formation et un réseau est en train de se créer. Ce ne sont pas des assistantes sociales, ce sont des gens habilités pour aborder ces sujets-là. Il s’agit d’amener chacun à affronter les difficultés de travail et surtout à les résoudre, avec pour fil rouge de ne pas s’oublier les uns les autres. On s’assoit, on discute, pas de l’achat du tracteur mais plutôt de la manière de travailler ».

S’entendre et s’écouter

En effet derrière les chiffres, les modes de production, le parc de matériel ou les circuits de commercialisation, il y a des femmes et des hommes dont la bonne entente conditionne la réussite du projet et l’épanouissement de chacun. Une dimension qui compte de plus en plus. « Le renouvellement des générations est une nécessité. Plus de la moitié des associés sont à moins de cinq ou dix ans de la retraite. Le Gaec est une bonne solution pour faire venir des gens d’ailleurs, car il est porteur d’une charge financière acceptable, d’un partage de la charge de travail et d’une viabilité plus faciles à obtenir. Le Gaec est le modèle qui se rapproche le plus des autres professions. La charge psychologique et économique est moins lourde que si on s’installe seul, à condition de s’entendre », résume Brigitte Troucellier. Le congrès de Gaec et Sociétés se déroulera les 23 et 24 juin prochains à Saint-Jorioz en Haute-Savoie. Si au niveau national, les travaux ont bien avancé avec les GDS notamment sur les questions sanitaires liées aux regroupements de troupeaux, restent les problématiques du statut et du financement. « Cela fait deux ans que nous y travaillons, nous espérons que les choses vont avancer ». 

Sophie Chatenet