DOSSIER SPÉCIAL RENTRÉE AGRICOLE
Les distributeurs de matériel agricole ont fait face à la crise

AGROÉQUIPEMENT / Malgré l’effondrement de leur chiffre d’affaires qui a tendu leur trésorerie, les distributeurs de machinisme agricole ont assuré la continuité du service auprès des agriculteurs pour les dépannages et la fourniture de pièces détachées.

Les distributeurs de matériel agricole ont fait face à la crise
La Foire de Beaucroissant (photo d’archive), rendez-vous régional des acteurs du monde agricole, qui devait avoir lieu du 11 au 13 septembre, fait partie de ces événements de rentrée qui ont été annulés en raison de la crise sanitaire. Le Sedima (distributeurs) table sur un repli du chiffre d’affaires annuel de la profession compris entre 7% et 15%, alors que les ventes étaient plutôt bien orientées avant l’arrivée de la pandémie.

Comme tous les secteurs d’activité, les entreprises de services et de distribution du machinisme agricole et des espaces verts ont payé un lourd tribut à la crise. Ainsi, elles ont vu leur chiffre d’affaires s’effondrer de 29% pour le matériel agricole neuf et de 52% pour les espaces verts en avril par rapport au même mois en 2019, selon le Syndicat national des entreprises de service et distribution du machinisme agricole, d’espaces verts et des métiers spécialisés (Sedima). Même si la situation s’est redressée au mois de mai, le chiffre d’affaires est resté encore en retrait de 9% pour le machinisme agricole et de 34% pour les espaces verts pour le matériel neuf. Sans parler de l’impact provoqué par les retards de livraison pour le matériel et les pièces détachées. Conséquence immédiate, de nombreuses entreprises doivent faire face à des difficultés de trésorerie, notamment dans le secteur des espaces verts, davantage sinistré. En effet, les entreprises de vente et de distribution de matériel d’espaces verts ont particulièrement souffert de la fermeture des magasins, de l’annulation de nombreuses commandes de la part des entreprises du paysage et des collectivités. À la crise de la Covid-19 s’est ajoutée la suspension des projets d’investissements dans les collectivités territoriales liée au report du deuxième tour des élections municipales, quand le maire n’avait pas été élu au premier tour, observe Pierre Prim, le président du Sedima.

Perspectives incertaines

Au final, la crise devrait se traduire par un repli du chiffre d’affaires annuel de la profession compris entre 7% et 15%, alors que les ventes étaient plutôt bien orientées avant l’arrivée de la pandémie. La fin de la saison, en septembre et octobre, pourrait rattraper l’effondrement du printemps. En tout cas, le président voudrait le croire, la conjoncture du machinisme agricole étant fortement dépendante de celle des productions agricoles. Depuis quelques mois, à l’exception du maïs, le prix des céréales est orienté à la hausse et celui des intrants s’inscrit en baisse. Dans le secteur de l’élevage, la production de viande porcine est repartie à la hausse et elle s’accompagne d’un repli du prix des aliments. En production laitière, la crise est intervenue alors que le prix et les volumes étaient plutôt soutenus. La pandémie a entraîné un fléchissement volontaire de la production qui pourrait repartir, une fois la crise terminée. Seule ombre au tableau, la viande bovine qui enregistre simultanément une diminution des prix et de la production. Quant aux grandes cultures, les rendements de la moisson 2020 et donc sur les volumes ont été en net retrait. Le secteur viticole, quant à lui en pleine récolte, subit de plein fouet les surtaxations américaines. En tout cas, « la visibilité est nulle et les perspectives ne sont pas extraordinaires » pour la fin de l’année, corrige Pierre Prim.

Relations tendues

Quoiqu’il en soit, les entreprises de distribution du machinisme agricole, comme d’ailleurs toutes celles de l’agrofourniture, ont assuré la continuité du service auprès des agriculteurs, notamment pour les dépannages et la fourniture de pièces détachées pendant la période du confinement, sans trop de conséquences sanitaires négatives sur les salariés. Grâce à la diffusion d’un guide sanitaire dès le début du confinement auprès de ses adhérents, le Sedima n’a observé que 31 cas de Covid-19 dans 27 entreprises, sans qu’on sache vraiment si la maladie a été contractée à l’intérieur ou à l’extérieur de l’entreprise. « En tout cas, il n’y a pas eu de propagation au sein d’une même entreprise », se félicite le président. Cet épisode a tendu les relations entre les constructeurs et les distributeurs de machinisme agricole. Ces derniers accusent notamment les constructeurs de les avoir encouragés à surstocker du matériel, au besoin en leur accordant des crédits fournisseurs à des taux usuraires. Une situation que le président considère comme « inadmissible et immorale ». « Ils ont profité de la crise en bénéficiant de dispositifs d’évasion fiscale parfaitement légaux », s’insurge-t-il. En effet, les constructeurs et leurs banques, dont la plupart ont leur siège aux Pays-Bas ou au Luxembourg (c’est-à-dire dans des paradis fiscaux), ont bénéficié de flux financiers importants, bref de revenus complémentaires soumis à une imposition allégée de 3 à 5% sur les bénéfices, alors que ce taux est de l’ordre de 30 % en France.