ÉVÉNEMENT
La myrtille sauvage, une valeur sûre

Le marché de la myrtille sauvage, qui se tiendra le samedi 6 août à Mézilhac, constitue un rendez-vous incontournable, qui met en avant la vitalité de ce petit fruit emblématique de l’Ardèche.

La myrtille sauvage, une valeur sûre
Cette année, la récolte de la myrtille sauvage a eu trois semaines d’avance

Compte tenu des conditions climatiques et sanitaires, la production est hétérogène. « Au départ j’étais pessimiste. Suite à un gel précoce dans la saison, les plantes sont devenues rouges, mais finalement sur le secteur du Champ de Mars (entre le col des 4 Vios et Mézilhac, NDLR), la cueillette sera correcte alors que sur la zone de Lachamp Raphaël elle sera moyenne », explique le président de l’association « La myrtille sauvage d’Ardèche », François Blache. Agriculteur à Marcols-les-Eaux, il élève des ovins, des bovins viande et possède 15 ha de myrtilles entre 1 000 et 1 300 m d’altitude. Chez Francis Giraud, éleveur de lapins et castanéiculteur à Saint-Julien-du-Gua, la récolte sera un peu plus importante que l’an dernier, mais encore insuffisante. « Sur 6 ha à 1 250 m d’altitude, j’ai ramassé 400 kg. Cela représente le quart de la récolte. Les mauvaises conditions climatiques avec des gelées précoces, une floraison assez tôt suivie d’un manque de chaleur et maintenant la sécheresse n’ont pas favorisé le rendement. » En revanche, cette année, la drosophila suzukii a été discrète. « Nous n’avons pas eu ce problème sinon un peu en début de saison. » Même constat chez François Blache : « Pas de drosophila cette année, on récolte très tôt pour l’éviter. Pour autant, le problème existe et nous n’avons pas de parade sinon des solutions naturelles. » 

Cette année la récolte de ce petit fruit a eu trois semaines d’avance. « Habituellement la cueillette a lieu en août, cette année elle a débuté fin juin pour les landes à 600 m d’altitude et le 14 juillet pour celles situées à 1 500 m », explique Richard Bonin, chargé de l’agriculture au PNR. Et fin juillet elle était terminée. Pour le marché de la myrtille du 6 août, « les volumes prévisionnels sont contraints par l’époque de la cueillette », mais il y aura de quoi satisfaire les amateurs.

Un produit qui a la cote

La perle bleue d’Ardèche bénéficie d’une bonne promotion et d’une vraie reconnaissance. Ce fruit naturel, « sauvage » est recherché par le consommateur. Ses multiples vertus pour la santé cardio-vasculaire, la vision nocturne, sa richesse en vitamines et minéraux en font un produit de choix. Elle se vend bien, autour de 12 € le kilo. L’association « La myrtille sauvage d’Ardèche » valorise la vente directe aux grossistes (Ets Pontier à Prades, Seyte Fruits à Vals-les-Bains), aux transformateurs comme les pâtissiers (pâtisserie Guillet à Valence), aux glaciers. Pour la responsable des achats de fruits à Terre adélice, Emma Caschetta : « La myrtille sauvage locale est prisée pour son arôme particulier qui ressort bien dans le sorbet. Nous proposons aux cueilleurs un contrat tri-annuel avec un prix et un volume si les quantités le permettent. » Le prix fixé à 7 € est peut-être un peu bas par rapport aux 10 à 12 € habituellement pratiqués. Mais pour la responsable le fait « d’acheter en vrac avec une première ventilation et pas de conditionnement constitue un avantage. »

Des myrtilleraies à reconquérir

Pour faire face à une demande plus importante que l’offre, la filière se mobilise, comme l’explique François Blache. « Nous devons relancer la filière, il existe pour cela des aides à l’ha de la Région. Nous réfléchissons à la mise en place d’une marque. La structure existe depuis une quinzaine d’années, il est important de recréer du dynamisme à l’intérieur de notre association de 45 adhérents où il y a beaucoup de transformateurs et pas assez de producteurs. Nous cherchons des territoires d’altitude autour du Mézenc dans le périmètre du PNR ». Avec l’aide de l’Inra de Clermont-Ferrand, le Parc planche sur la transmission des techniques et savoir-faire ancestraux. « Il est important d’inciter les gens à se remettre à la myrtille avec un meilleur conseil technique possible mais pour l’instant on ne le maitrise pas trop. D’où ce travail à l’échelle du Massif central pour étudier la myrtille du point de vue historique et lancer une étude ethnographique, explique Richard Bonin. Ce protocole d’étude permettra de connaître les conditions favorables pour développer la lande et donner du fruit, notamment en tenant compte de la pression de la taille par le gyrobroyage ou le pâturage. Si le milieu se ferme, la floraison est moins présente. Une cueillette qui reste sauvage mais il faut arriver à stimuler la lande. Des essais dans ce sens ont été lancés à Loubaresse, à Saint-Pierreville et à Mézilhac. »

« Sans entretien, une lande disparaît en moins de 10 ans »

Un autre point est sensible pour le président de l’association, c’est la traçabilité. « La plupart des landes appartiennent à des privés qui entretiennent leurs parcelles et les valorisent. Or il existe des communaux où chacun peut ramasser. Il n’y a pas d’entretien et sans ce travail une lande de myrtilles disparaît en moins de 10 ans, envahie par les broussailles. Si les communaux sont loués à des agriculteurs, ceux-ci les entretiennent et permettent la traçabilité du produit. » Pour autant, François Blache reste confiant : « Quand nous avons créé l’association, la myrtille se vendait 5 à 6 €/kg, aujourd’hui c’est 10 à 12 €/kg triée. Nous avons obtenu une grosse valeur ajoutée pour cette production marginale qui représente une ressource d’appoint non négligeable de 10 à 30 %. »

Cécile Chanteperdrix