ARBORICULTURE
Le kiwi paye un lourd tribut au gel
Dans le Sud-Ardèche, les fruits à pépins comme le kiwi ont tout autant souffert du gel que les fruits à noyaux. La saison 2021 s’annonce globalement mauvaise malgré une demande forte et des prix en hausse.
Sur le bord du Rhône, tout près de la jonction avec la rivière Ardèche, la récolte des kiwis commence tout juste à l’EARL Le Bordelet. « Le taux de sucre est proche des 6,5°, c’est le bon moment », observe Christophe Guigue en passant une main sur ses fruits. Installé à Saint-Just-d’Ardèche depuis 1989, l’arboriculteur prévoit une « petite récolte » : 100 à 150 tonnes contre 300 tonnes lors d’une saison correcte. En cause, le gel du printemps qui a durement impacté ses dix-huit hectares de kiwi en variété Hayward. « La qualité n’est pas exceptionnelle pour l’instant. On espère avoir une amélioration dans les semaines à venir », reprend celui qui écoule l’intégralité de sa production auprès de grossistes. Motif de satisfaction : la maladie n’a pas touché ses précieuses lianes cette année encore. « Il y a des parcelles qu’on pensait avoir perdu il y a quelques années à cause de la bactériose et qui vont bien mieux aujourd’hui. C’est rassurant. »
« 80 % de pertes »
Silvain Laprat, de l’EARL Lap’fruits à Saint-Laurent-du-Pape, n’a pas eu cette chance. « Une partie de la production a gelé et le reste a subi la bactériose, c’est la pire année depuis mon installation en 2017, soupire celui qui cultive six hectares de Hayward en agriculture biologique. Nous allons récolter 3-4 tonnes contre une vingtaine en 2020, qui était déjà une mauvaise année. »
Le constat est similaire pour Edith Cabello, productrice à Saint-Marcel-d’Ardèche. « On a pris le gel de plein fouet. Certaines parcelles sont entièrement touchées, d’autres un peu moins. On estime nos pertes à 80 % ». L’arboricultrice est toutefois rassurée par ce qui a poussé sur ses sept hectares de Hayward. « On était soucieux sur la qualité car le calibre n’a pas évolué jusqu’au mois de septembre. C’est mieux depuis quelques semaines, les fruits seront jolis. »
« Une toute petite campagne »
« C’est une année très difficile pour le kiwi et l’arboriculture en général dans le Sud-Ardèche, résume Stéphane Allix, directeur administratif et financier à Vivacoop (Saint-Sernin). L’activité de nos adhérents s’est fortement réduite à cause du gel. Pour la variété Hayward, ça va être une très petite campagne. On s’attend à rentrer 45-50 tonnes sur les 250 habituelles. »
Les producteurs de kiwi peuvent tout de même compter sur une demande qui augmente année après année et des prix en hausse. « On nous annonce des prix corrects mais il faut préciser que le kiwi est cher à la plantation, nuance Edith Cabello. C’est un fruit qui ne demande aucun traitement mais beaucoup d’eau et d’entretien ». « Même si les prix sont supérieurs à ce qu’ils ont été, ça ne comblera pas le manque dû au gel, loin de là », appuie Christophe Guigue.
« On compte sur le fonds de garantie »
Pour s’en sortir, les arboriculteurs comptent sur le fonds de garantie des calamités agricoles. Sur ce sujet, Edith Cabello souhaite « féliciter la DDT » pour l’indemnisation des fruits à noyaux à la fin de l’été. « Les dossiers n’ont pas été trop difficiles à monter et nous avons été rapidement indemnisés. Ce n’est jamais assez à l’hectare par rapport aux coûts mais on est satisfaits. On espère que ce sera aussi bien sur les fruits à pépins. »
Pommes : des pertes, mais moins importantes que prévu
Le gel d’avril n’aura épargné aucun fruit en Ardèche. A l’image de celle qui s’annonce en kiwi, la campagne 2021 de pommes n'est pas satisfaisante pour les producteurs. « On est sur une demi-récolte, rapporte Christophe Guigue, qui cultive dix-neuf hectares en agriculture biologique à Saint-Just-d’Ardèche. Je pensais être à zéro mais les variétés précoces [Golden, Gala] ont bien réagi car leur floraison a eu lieu plus tard. En revanche, c’est assez catastrophique pour les variétés tardives [Granny, Story] ». Le producteur boucle sa saison avec 220 tonnes, soit trois fois moins qu’à l’accoutumée. La qualité ? « On est plutôt sur un petit calibre, avec des fruits pas très bien formés. »
A Saint-Marcel-d’Ardèche, Edith Cabello est moins impactée. « C’est un fruit qui a plutôt bien tiré son épingle du jeu par rapport au gel. Chez nous, on est sur une récolte à peu près normale ». L’arboricultrice fait cependant face aux conséquences d’un marché dont les prévisions étaient très basses à la suite du gel mais dont les volumes ont finalement progressé à l’échelle du pays. « Il n’y a pas une forte demande et le prix au kilo a beaucoup baissé. On ne pourra pas compter sur un effet prix. »