TROIS QUESTIONS À
Vins : « Il faut qu’on s’adapte aux nouvelles tendances de consommation »

Joël Boueilh, président des Vignerons coopérateurs de France, trace la feuille de route pour les années à venir.

Vins : « Il faut qu’on s’adapte aux nouvelles tendances de consommation »
Joël Boueilh

Quelles sont les tendances de consommations ? 

Joël Boueilh : « Depuis plusieurs années, on observe clairement une baisse de la consommation des rouges, avec des ménages qui consomment moins de vin à la maison qu’autrefois et moins souvent. Avec les conditions climatiques qui évoluent, on a des degrés d’alcool de plus en plus hauts, à l’inverse de ce que recherchent les consommateurs. Et si un bon rouge accompagne volontiers la daube de Noël, on préfère boire un rosé frais en période de canicule comme on en a connue cet été ! Le vin rouge doit aussi faire face à la concurrence d’autres boissons, comme la bière ou les cocktails, qui se consomment au bar, au restaurant, etc. Il est donc essentiel aujourd’hui de réfléchir à ce qu’on propose et de s’adapter à ces nouvelles tendances de consommation. »

Face à la baisse de consommation des rouges, que faire ?

J.B. : « Il faut repenser nos stratégies à long terme, mais d’abord réagir à l’urgence du moment et à la crise que traversent un certain nombre de bassins viticoles, grosso-modo au sud de l’axe Bordeaux-Valence. Nombre d’appellations (Côtes du Rhône Sud, Bordeaux, quelques appellations du sud-ouest) font face à une crise de surproduction ; certains ont fait plus de rosés pour éviter cette situation mais cela crée aussi des problèmes de sur-stocks en rosé. C’est pourquoi nous demandons au ministère d’apporter des solutions, comme des aides à l’arrachage ou à la distillation, mais il n’est pas sûr que cela soit accepté par nos voisins européens (Italiens et Espagnols notamment) qui voient ces aides comme une concurrence déloyale. C’est pourquoi nous sommes en discussion avec le ministère et Bruxelles. »

Quelles stratégies commerciales imaginer pour l’avenir ?

J.B. : « On va devoir proposer autre chose, repenser nos vignobles et nos encépagements, et adapter notre offre au consommateur. Par exemple, la bouteille de 75 cl est-elle toujours adaptée aujourd’hui ? C’est une question qu’on peut se poser, alors que de plus en plus de personnes vivent seules. Il nous faut aussi aller chercher des marchés à l’export, j’en suis convaincu. Outre ces défis commerciaux majeurs, il nous faudra relever les défis du renouvellement des générations en viticulture, de l’attractivité de la coopération, des risques climatiques, de la pression sociétale et bien d’autres. »

Propos recueillis par M.C.

Le vin, mal en point ?

En dix ans, la consommation de vin des moins de 50 ans a reculée de 6 %1. La consommation de vin rouge a baissé de 32 % entre 2011 et 2021. Les Français consomment moins, mais achètent des vins plus chers : en GMS, le créneau des vins à moins de 4 € est le plus pénalisé, tandis que celui des vins de 6 à 10 € est en croissance. La bière représente quant à elle la moitié des volumes de boissons alcoolisées vendues en grande surface. Les panachés et bières sans alcool contribuent à ce dynamisme.

1.       Selon une enquête Kantar publiée à l’occasion du beaujolais nouveau par RTL.