VITICULTURE
Changement climatique: comment adapter les vignobles ?

Anaïs Lévêque
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VITICULTURE / Les Jeunes agriculteurs du canton Rhône-Coiron ont animé, jeudi 30 janvier 2020, une journée technique sur la vigne au Pradel à Mirabel. Concours, ateliers, démonstrations… Une conférence sur la résilience des vignobles face au réchauffement climatique était aussi programmée.

Une cinquantaine de professionnels et d’élèves ont participé, jeudi 30 janvier à Mirabel, au traditionnel concours de taille de la vigne, désormais baptisé « journée technique de la vigne ». À l’initiative de cet évènement, les Jeunes agriculteurs (JA) du canton Rhône-Coiron, en partenariat avec JA Ardèche et le centre de formation pour adultes (CFPPA), souhaitaient cette année proposer un rendez-vous résolument technique et réunir un maximum de professionnels et de partenaires de la filière viticole en multipliant les animations.

Synergie et concurrence

Face aux aléas climatiques de 2019 et aux prévisions, une conférence sur le thème du réchauffement climatique sur les vignobles était organisée en début d’après-midi. Elle a réuni de nombreux intervenants venus partager leurs connaissances. Brieg Clodoré et Maud Bonnefoux, conseillers en viticulture à la Chambre d’agriculture de l’Ardèche, ont fait le point sur l’évolution du climat à l’horizon 2050 et 2100. « Le climat va considérablement changer. Selon les scénarios, nous avons des projections très pessimistes », a indiqué Maud Bonnefoux, avec des températures en hausse, un effet très marqué sur la période estivale, une forte disparité des précipitations annuelles… « Il faut hiérarchiser les solutions, par un travail superficiel du sol pour éviter l’évapotranspiration, l’ombrage artificiel, les densités de plantation, l’orientation des rangs, la réflexion sur le territoire viticole, la situation topographique, la maîtrise de la surface foliaire, l’irrigation, l’aspersion, le paillage, le matériel végétal… Une seule solution ne réglera pas le problème. » Brieg Clodoré d’ajouter : « Nous disposons de moyens extrêmement simples et efficaces pour faire face au réchauffement climatique, en travaillant le sol avec un apport en matière organique, en le nourrissant, en arrêtant de le travailler, en plantant des arbres et des haies, en diminuant par pertes, en privilégiant la voie de l’humus… ».

« Des solutions qui ne sont pas des utopies »

Viviane Bécart, chargée de l'activité conseil, expérimentation et développement pour le Syndicat des Côtes-du-Rhône, a évoqué le choix du matériel végétal selon les cépages, les cycles, la résistance et la tolérance de l’encépagement, les réserves d’eau disponibles au sol… Et invité les professionnels à bien réfléchir à leurs plantations. « Il y a des solutions qui ne sont pas des utopies. Il faut trouver le juste milieu avec des cépages qui ferment leurs stomates et parviennent à faire mûrir les baies, choisir les cépages les plus tardifs et qui valorisent le mieux les faibles ressources en eau, a-t-elle expliqué. Nous avons la chance, ici, d’avoir des encépagements variés qui permettront de faire front jusqu’en 2050 mais il faudra en trouver d’autres pour faire face aux
4 °C supplémentaires qui sont estimés. »

« Faire évoluer nos pratiques »

Œnologue pour les Vignerons Ardéchois, Marion Bosquet a constaté l’impact du réchauffement climatique sur le profil des vins en Sud Ardèche, notamment du taux d’alcool. Avec une année marquée par la sécheresse et la chaleur en 2019, « les maturités phénoliques ne suivent pas les mêmes évolutions, elles sont même parfois bloquées. Nous avons eu des peaux très dures, épaisses, et donc des difficultés à caler le moment optimal de la récolte et faire un compromis entre les taux de sucre qui s’envolent et les polyphenoles dont nous avons besoin pour avoir de la couleur, de la structure et du corps », indique-t-elle. Les itinéraires techniques doivent s’adapter chaque année à de nouveaux équilibres, éviter la dérive microbienne, la sur-extraction en rouge... « Le changement climatique est perceptible sur plusieurs décennies, depuis 30 ou 40 ans, ce qui laisse le temps aux vignerons et aux vinificateurs de pouvoir s’adapter et trouver des solutions. Nous avons une commission de vignobles qui travaille sur l’évolution des pratiques viticoles. Le problème qui se pose est de trouver l’adéquation avec le marché puisqu’il demande plutôt de petits degrés d’où l’importance de faire évoluer nos pratiques. »

Irrigation

Viticultrice à Valvignères, Lolita Flaugère a partagé son expérience sur l’utilisation de ses réserves d’eau, notamment celles d’un lac collinaire datant de plus de 40 ans qui permet d’irriguer 4 hectares de vigne mais qui ne se remplit pas entre juin et septembre. « Il est très important de savoir observer la vigne et répondre en fonction de ses besoins, d’avoir de l’expérience et d’utiliser des sondes tensiométriques. Nous essayons de ne pas irriguer trop longtemps afin que l’eau rentre dans les racines et serve directement la vigne. »

Le concours de taille de la vigne réunit une cinquantaine de participants
Les élèves ont suivi les recommandations données par Marie Véronique Blanc, conseillère viticole à la Chambre d’agriculture de la Drôme, lors d’un atelier sur le curetage de ceps atteints d’Esca.

Le concours de taille de la vigne réunit une cinquantaine de participants

41 étudiants ont concouru au concours de taille de la vigne dès 8h30 du matin. Rémy Vernet a terminé à la première place, suivi par Hugo Dufour puis Bastien Leveque. Du côté des professionnels, le challenge Olivier-de-Serres réservé aux salariés agricoles et viticulteurs a été remporté par Laurène Margerie de Vinezac, suivie de Régis Arlaud et Anne Enaux. Au total, 16 professionnels ont participé à ce challenge.
Les élèves ont aussi participé à des ateliers de curetage de ceps atteints d’Esca, animés par Marie Véronique Blanc, conseillère viticole à la Chambre d’agriculture de la Drôme. Des démonstrations de matériels ont aussi été effectuées par les concessionnaires de la filière viticole. Ils ont également exposé leurs tracteurs, tondeuses et autres outils de travail du sol.

Le concours en images