ÉLEVAGE
Fin Gras du Mézenc : « maintenir la dynamique et perpétuer notre savoir-faire »

Marin du Couëdic
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Devenue l’un des fers de lance du terroir d’Ardèche et de la Haute-Loire, l’AOP Fin Gras du Mézenc continue d’asseoir son ancrage local et d’étendre sa notoriété en 2021. L’assemblée générale de l’association, qui s'est tenue lundi au Béage, a permis de tirer un bilan positif de la saison passée, malgré une année encore contrariée par l’épidémie de Covid-19, et de se projeter vers un avenir pérenne.

Fin Gras du Mézenc : « maintenir la dynamique et perpétuer notre savoir-faire »
Alison Salat, technicienne salariée de l'association Fin Gras du Mézenc et Bernard Bonnefoy, président de l'appellation.

Stabilité et transmission. Voilà les maîtres-mots prononcés lors de l’assemblée générale de l’association Fin Gras du Mézenc, qui s’est tenue lundi 11 octobre au Béage, du côté ardéchois de l’aire de production en appellation d’origine protégée (AOP). Devant une salle comble, où avait pris place une centaine d’adhérents – éleveurs de Haute-Loire et d’Ardèche, bouchers, restaurateurs, élus ou sympathisants –, le président Bernard Bonnefoy s’est d’emblée tourné vers l’avenir et la jeunesse après une saison 2021 satisfaisante. « L’important aujourd’hui, c’est de maintenir cette bonne dynamique et de perpétuer notre savoir-faire. Ici, nous avons réussi à garder un peu de liberté et d’authenticité dans notre métier. On y tient et on veut transmettre ces acquis. C’est aussi ce que souhaite le consommateur, avec beaucoup d’attentes au niveau environnemental. »

Une production stable

Si les prises de parole ont vite tourné autour des perspectives de la filière, c’est que la saison 2021 s’est globalement bien déroulée, dans la droite lignée de la précédente malgré des conditions rendues encore une fois difficiles par l’épidémie de Covid-19. 1 236 animaux ont ainsi été commercialisés en AOP, soit 14 bêtes de plus qu’en 2020 (progression de 1%). En augmentation depuis 2016, la moyenne d’animaux produits par exploitation a atteint cette saison les 13,10%, un record. « Après une forte augmentation de la production à partir de 2013, on remarque depuis quelques années une stabilisation de la production autour de 1 200 animaux, a rapporté Alison Salat, technicienne salariée de l’association. L’objectif désormais, ce n’est pas forcément d’augmenter cette production mais de conserver le nombre d’éleveurs, s’assurer que les départs à la retraite soient compensés par des installations ».

Au total, 108 exploitations ont fait suivre des animaux dans le cadre du processus de production en AOP (de l’élevage à l’engraissement) durant l’hiver 2020-2021. Parmi elles, 96 avaient des animaux en cours d’engraissement, contre 97 en 2020. A noter que quatre exploitations ont été habilitées en tant que producteur en AOP Fin Gras du Mézenc tandis que trois éleveurs ont cessé cette activité. Onze autres exploitations faisaient suivre de jeunes animaux mais n’en avaient pas à l’engraissement, ce qui constitue un potentiel de production pour les saisons 2022 et 2023. 

Un développement essentiellement régional

Même stabilité affichée du côté de la commercialisation. En 2021, 138 bouchers sont adhérents de l’association, soit un de moins que l’an passé. 15 nouveaux points de vente proposent toutefois de la viande Fin Gras et huit autres boucheries se sont manifestées pour la saison prochaine. Une bonne nouvelle qui a permis de compenser avec les volumes moindres en restauration dûs au confinement et au couvre-feu. L'association compte toutefois quatre nouveaux restaurateurs pour atteindre 51 adhérents, dont le restaurant trois étoiles au Guide Michelin de Régis et Jacques Marcon à Saint-Bonnet-le-Froid, en Haute-Loire. La vente via les grossistes reste prédominante avec environ 60% du volume, devant la vente aux bouchers (35%). La vente directe reste faible (4,5%). L’analyse des prix, collectés auprès des éleveurs, indique que 93% des animaux ont été vendus à un prix supérieur ou égal à 5,50 € / kg de carcasse. Comme les années précédentes, la zone de commercialisation couvre essentiellement la région Auvergne Rhône-Alpes, avec 35% des volumes en Ardèche, 30% en Haute-Loire, 15 à 20% en Loire et 5 à 10% en Drôme et dans le Rhône. 

Une saison encore perturbée par la Covid-19

La saison 2021 a été marquée par un retour à la normale sur la période d’abattage, prolongée l’an passé jusqu’à fin juillet. « Le Fin Gras est un produit saisonnier, disponible de février à juin. Il faut que les demandes de dérogation restent exceptionnelles », a rappelé Alison Salat. L'épidémie de Covid-19 a cependant eu raison de la Fête du Fin Gras, reportée à juin prochain à Saint-Front, de l'opération pot-au-feu et de la foire du Béage, toutes deux annulées. La crise sanitaire a également impacté l'activité touristique : la Maison du Fin Gras a connu une baisse de sa fréquentation et du chiffre d’affaires de la boutique. S'il a de nouveau eu lieu, le concours virtuel de bovins a toutefois connu un succès moindre avec 365 votants. Le 1er prix a été décerné à Denis Méjean. Les balades guidées sur le massif du Mézenc n’ont rencontré qu’un faible succès, le temps n’étant pas au rendez-vous.

Au rayon des satisfactions, le tenue de la journée d’animation du 4 juillet pour marquer la fin de la saison, avec 150 personnes présentes. Le volet financier de l’association, basée sur une équipe de 3 salariés, a généré un résultat positif de 20 000 € sur la période. « L’association est montée en puissance pour devenir quasi-autonome financièrement, les subventions sont plutôt orientées vers l’activité que vers le fonctionnement ».

En fin d’assemblée générale, le président Bernard Bonnefoy a tenu a souligner « l’implication et l’investissement » de toute la filière : « J’espère que l’on va vivre de belles années avec le Fin Gras, économiquement mais aussi humainement avec le retour de la Fête du Fin Gras en 2022 et des nombreuses animations, événements et rencontres tout au long de l’année. »

Marin du Couëdic

EN CHIFFRE / 200 éleveurs réunis sous l'AOP Fin Gras

200 éleveurs produisent de la viande bovine sous le label « Fin Gras du Mézenc » sur l’aire de production définit par l’AOP, qui couvre 28 communes (14 entières et 14 en partie concernées) entre l’Ardèche et la Haute-Loire.

ANNONCE / Bernard Bonnefoy souhaite représenter les viandes AOP au niveau national

Depuis 2019, le Fin Gras du Mézenc et dix autres terroirs en appellation d’origine protégée sont réunis au sein de la fédération des AOP Viandes de France (Fevao). Bernard Bonnefoy, éleveur aux Estables en Haute-Loire et président de l’association du Fin Gras, est le trésorier de la Fevao. Lors de l’assemblée générale, il a annoncé son ambition de faire partie du comité national de la Fevao. « Je candidate pour porter un discours fort sur nos produits et leur qualité, faire entendre notre voix aux Français et défendre nos intérêts face à de nouvelles contraintes incompatibles avec nos cahiers des charges déjà contraignants. »

ABATTOIRS / « Des métiers importants pour notre filière »

Lors de l’assemblée générale, Bernard Bonnefoy a évoqué le manque de reconnaissance dont pâtissent les abattoirs et les personnes qui y travaillent. « Ce sont des métiers difficiles, très important pour notre filière, qui mérite d’être mis en valeur et soutenus. Élever un animal et le respecter, c’est aussi penser à sa mort », a défendu l’éleveur et président de l’appellation Fin Gras du Mézenc. Bernard Bonnefoy a indiqué souhaiter intégrer davantage les abattoirs dans les axes de travail de l’association et y associer restaurateurs et consommateurs notamment. Concernant le Fin Gras du Mézenc, la moyenne d’abattage est de 74 bêtes hebdomadaires sur les 17 semaines que compte la saison. En 2021, la filière a en majorité fait appel aux abattoirs d’Yssingeaux (à hauteur de 36%) et du Puy (33%). Avec 22%, l’abattoir d’Aubenas a connu une hausse significative de 15%. La filière a moins sollicité les abattoirs de Langogne (6%) et de Privas (3%).

POLITIQUE / « Notre montagne est belle quand elle est rassemblée »
Les élus locaux Bernadette Roche et Michel Villemagne ont pris la parole pour défendre les couleurs du Fin Gras lors de l'assemblée générale.

POLITIQUE / « Notre montagne est belle quand elle est rassemblée »

Bernadette Roche, conseillère départementale du canton de la Haute-Ardèche, et Michel Villemagne, maire de Saint-Agrève et conseiller départemental du canton de Haut-Eyrieux, ont pris successivement la parole pour défendre les couleurs du Fin Gras lors de l’assemblée générale au Béage, lundi 11 octobre.

« Le Fin Gras a réussi à rassembler la Haute-Loire et l’Ardèche autour d’un beau projet, s’est réjouie Bernadette Roche, conseillère départementale du canton de la Haute-Ardèche. L’agriculture comme le tourisme sont des piliers de ces deux départements qui ont perdu beaucoup d’habitants. Un projet comme celui du Fin Gras, qui créé du lien social et de l’emploi, participe au repeuplement du territoire, donne envie aux jeunes de rester au pays. Notre montagne est belle quand elle est vivante, rassemblée ! »

« Préservons ces emplois »

Michel Villemagne, maire de Saint-Agrève et conseiller départemental du canton de Haut-Eyrieux, a lui aussi loué la dynamique créée par l’appellation depuis l’obtention du label AOC, en 2006. « 15 ans, c’est un âge tout à fait adulte, a-t-il estimé. L’avenir, il faut aller le chercher avec des produits authentiques comme Fin Gras. Je rappelle aussi que l’agriculture, c’est 40% des emplois sur le Mézenc. Préservons ces emplois, préservons ce territoire, préservons cette qualité et sachons en profiter. »