ÉTUDE
Une méthodologie sur les prélèvements en hautes eaux finalisée
Une étude menée par l’OFB et l’Inrae vise à établir une méthode pour mesurer les effets des prélèvements en hautes eaux sur les écosystèmes aquatiques. Prudents, les auteurs montrent toutefois les limites de leur recherche pour évaluer les effets des retenues d’eau.
Commandée par l’ancien Premier ministre, Jean Castex, à la sortie du Varenne de l’eau en 2022, l’Office français de la biodiversité (OFB) et l’Inrae ont finalisé leur étude visant à établir une méthode d’évaluation des conséquences des prélèvements sur les écosystèmes aquatiques. Pour ce faire, l’étude vise à identifier des indicateurs écohydrologiques1 adaptés et à estimer comment ces indicateurs seraient affectés par des scénarios de prélèvements directs, dans les rivières. Pour rappel, le gouvernement s’était engagé à déterminer cette méthodologie « d’ici fin 2022 » pour fixer les volumes prélevables en hautes eaux, avant de connaître un important retard. L’objectif étant notamment d’aider les agriculteurs à faire face au changement climatique. Face à l’intensification projetée des prélèvements en période de hautes eaux, l’étude amène néanmoins à s’interroger sur les potentielles conséquences écologiques d’une telle pratique. Et ce d’autant plus que le rôle des hautes eaux a fait l’objet de moins d’attention que les basses eaux, dont les incidences écologiques ont été « très étudiées pour la définition des débits réservés ».
Une méthodologie à adapter au cas par cas
« Les hautes et moyennes eaux ne sont pas des eaux excédentaires que l’on pourrait détourner du milieu sans précautions », précisent les auteurs. Et d’ajouter que « les altérations du régime hydrologique [des écosystèmes aquatiques NDLR] s’ajoutent à d’autres stress et dégradent l’état de santé de l’écosystème, affaiblissant ses capacités de résilience ». Dans ses conclusions, l’étude retient deux valeurs seuil de débit : le Q10, soit le débit journalier dépassé 10 % du temps durant la période de hautes eaux – et le Q1 an (ou 1,5 an), correspondant au débit journalier qu’un cours d’eau dépasse ou atteint en moyenne une fois par an. Elle suggère par ailleurs de mesurer le nombre de fois où ces seuils sont dépassés, ainsi que la durée totale de ces dépassements pour chaque période annuelle de hautes eaux. « Les indicateurs hydrologiques proposés visent à estimer le degré d’altération induit par un prélèvement sur une caractéristique hydrologique identifiée comme importante pour l’écologie du cours d’eau », précisent les auteurs de l’étude. Ces derniers précisent toutefois que ces indicateurs ne présentent pas de valeurs « seuils » a priori, au-delà desquelles les effets délétères seraient nuls. Autrement dit, ces indicateurs ne constituent pas une méthode « clés en main » pour définir des volumes prélevables, prévient l’OFB.
Des facteurs environnementaux ignorés
Selon les auteurs, « l’approche diagnostique doit être nourrie d’une expertise locale, permettant de préciser le contexte et le fonctionnement écologique des cours d’eau considérés afin de bien appréhender les effets potentiels des prélèvements ». En outre, les auteurs reconnaissent certaines limites à leur étude, à savoir la non-prise en considération de certains facteurs environnementaux (qualité physico-chimique de l’eau, température, flux sédimentaires, fragmentation des habitats…) pour évaluer les effets des retenues de substitution. Dans le même ordre d’idées, les effets des prélèvements sur les bilans hydrologiques à l’échelle des bassins-versants, sur l’évapotranspiration, sur le niveau des nappes, ou les effets de prélèvement dans les nappes sur les débits de surface n’ont pas été abordés au sein de l’étude. « Des études au cas par cas seront nécessaires pour estimer plus finement les effets globaux du prélèvement », concluent-ils.
J.J.
1. C’est-à-dire des variables hydrologiques qui reflètent la qualité de l’habitat des organismes ou le fonctionnement écologique.