THÉÂTRE
Les habits de Molière sous toutes leurs coutures

Le Centre national du costume de scène a choisi de célébrer le 400e anniversaire de la naissance du célèbre auteur, comédien et chef de troupe, Molière, en présentant du 26 mai au 6 novembre 2022 une exposition intitulée « Molière en costumes ».

Les habits de Molière sous toutes leurs coutures
Du Bourgeois gentilhomme au Malade imaginaire en passant par les Femmes savantes, les pièces de Molière s’écrivent aussi en costumes. ©DR

Avec ses dix-mille costumes de théâtre, de danse et d’opéra du milieu du XIXe siècle à nos jours provenant de dépôts de trois institutions majeures - la Bibliothèque nationale de France (BnF), la Comé­die-Française et l’Opéra national de Paris), le Centre national du costume de scène (CNCS), situé à Moulins dans l’Allier, dispose d’une collection unique au monde. Quatre-cents ans après sa naissance, le centre consacre une exposition d’envergure à Molière, ce génie du théâtre. « Le choix de cé­lébrer l’auteur de L’Avare, baptisé à Paris le 15 janvier 1622, apparaissait en effet comme une évidence pour nous, tant Molière est depuis quatre siècles l’homme de théâtre complet par ex­cellence », explique Delphine Pinasa, directrice du musée. 

Costumes singuliers 

Les costumes présentés, cent-cin­quante au total, ne sont évidemment pas d’époque mais illustrent six décennies de création théâtrale. Exposés aux côtés de maquettes, de photographies et de capta­tions audiovisuelles, ces cos­tumes sont présentés dans un parcours organisé autour des thématiques qui jalonnent l’oeuvre de Molière : vices et vertus, satire de la médecine et de la religion, raillerie du bourgeois gro­tesque, condition des femmes, jalousie et infidélité. Les pièces présentées sont majoritairement issues des collections du CNCS, de la Comédie-Française et du département des Arts du spectacle de la BnF mais également de théâtres, compagnies ou institutions culturelles comme le Théâtre national populaire (Villeurbanne) ou la Maison Jean Vilar. 

Miroirs d’une époque 

Que ce soit le caftan de Louis Seigner en Monsieur Jourdain dans la production du Bour­geois Gentilhomme de 1951, la robe de Célimène (Madeleine Renaud) pour Le Misan­thrope en 1954 ou en­core le costume de Philaminte, inter­prétée par Georges Wilson dans Les Femmes savantes en 1956, les cos­tumes ont été sélectionnés parce qu’ils sont à la fois sin­guliers et emblématiques d’un metteur en scène ou d’un costumier. Les plus célèbres : Suzanne Lalique, Christian Bérard et Patrice Cauchetier. L’ensemble constitue un reflet saisissant des tendances, que ce soit en termes de reconsti­tution historique ou de mode de l’époque. Au sein de l’expo­sition, une place importante est naturellement accordée à la Comédie-Française, encore aujourd’hui appelée « Maison de Molière », fondée en 1680, soit sept ans après la mort de l’auteur dont toutes les pièces sont inscrites au répertoire. La visite se termine en apothéose par la der­nière salle, véritable scène de théâtre évoquant la comédie-ballet, genre dramatique mêlant musique, chants et danses inventés par Molière pour Louis XIV avec la complicité de Lully. Une douzaine de costumes - dont ceux du Bourgeois gentilhomme ou du Ma­lade imaginaire - sont exposés sur un immense plateau surélevé, certains mouvants, dans un décor représentant des nuages et le soleil, emblème de Louis XIV.

Sophie Chatenet

Centre national du costume de scèneet de la scénographie : Quartier Villars, Route de Montilly, 03 000 Moulins. Plus d'informations sur www.cncs.fr. Réservation en ligne vivement conseillée. Ouvert tous les jours de 10 h à 18 h. Jusqu’à 18h30 en juillet et en août.

Ce qu’il nous reste de Molière

Bourgeois bien né devenu dramaturge favori de Louis XIV, Molière n’a laissé aucune trace personnelle : ni journal intime, ni correspondance, ni même des notes qui pour­raient nous éclairer sur la personnalité du plus grand auteur comique occidental. La seule survivante de ses quatre enfants, Esprit-Madeleine, perdit ses manuscrits et sa première biographie, Vie de M. de Molière, publiée en 1705. Depuis, les légendes autour de Jean-Baptiste Poquelin, dit Molière, vont bon train. La plus célèbre d’entre elles concerne sa mort. La légende raconte en effet qu’il mourut sur scène le 17 février 1673. C’est en réalité chez lui, au 40 rue de Richelieu à Paris, qu’il périt subitement peu après avoir incarné l’hypocondriaque Argan, héros du Malade imaginaire. Outre les témoignages d’époque, il reste surtout son oeuvre, une tren­taine de comédies en vers et prose. Molière est encore aujourd’hui avec Shakespeare l’un des auteurs les plus joués. Il faut dire que son propos a transcendé les époques comme rarement en sont ca­pables des textes. En prônant la libération des femmes, en moquant l’avarice des très riches, en tournant en dérision le pouvoir religieux ou en raillant la culture de l’imposture… Molière a d’emblée fait figure d’auteur mo­derne, trouvant un écho dans les recoins de chaque époque. 

S.C.

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