EXPÉRIMENTATIONS
Réduire drastiquement les intrants dans les vergers d’abricotiers

Depuis 2020, le projet Mirad expérimenté dans la Drôme teste des leviers afin de maîtriser l’apport d’intrants et les résidus phytosanitaires au sein des productions d’abricots.

Réduire drastiquement les intrants dans les vergers d’abricotiers
Le projet Mirad a testé l’introduction de poules pondeuses au sein du verger. ©Inrae UERI Gotheron

De 2014 à 2018, le projet Capred s’était déjà attelé à trouver des leviers en vergers d’abricotiers afin de diminuer de moitié l’indicateur de fréquence de traitements phytosanitaires (IFT), tout en conservant une rentabilité pour le producteur. Dans la Drôme, sur le site Inrae de Gotheron, le greffage haut avec densification du verger était ainsi apparu comme une conduite plus rentable et plus économe en produits phytosanitaires que la référence. Par la suite, ces vergers expérimentaux ont été suivis deux années supplémentaires et ont donné naissance au projet Mirad (2020-2024). Ce dernier ajoute un objectif de réduction des IFT plus restrictif (hors produits de biocontrôle). En système conventionnel, le but est ainsi d’atteindre une diminution de 75 % de l’IFT avec zéro résidu phytosanitaire détectable dans les fruits et 100 % en agriculture biologique. Ces systèmes bio visent à utiliser des substances inscrites au cahier des charges bio et présentes sur la liste des produits de biocontrôle.

Filets alt droso et prédation par les poules

Le site expérimental de Gotheron teste actuellement deux nouveaux leviers : les filets alt droso habituellement installés sur des cerisiers, ainsi que l’implantation d’un poulailler mobile afin d’évaluer l’effet de prophylaxie sur certains ravageurs. En système bio sous filets, aucun produit phytosanitaire n’a été utilisé jusqu’en 2022. Mais l’apparition d’un puceron invasif originaire d’Asie a été observée en 2021. L’année suivante, la population de ce ravageur s’est amplifiée sous les filets alt droso fermés, causant la mortalité de nombreux arbres. Cette situation a obligé les expérimentateurs à avoir recours à des produits de biocontrôle en 2023 : huile avant la fermeture des filets, flipper après l’ouverture. Dorénavant, les filets sont réouverts à mi-hauteur à partir de la mi-avril, afin que les auxiliaires prédateurs, comme les syrphes, accèdent aux colonies de pucerons.

En 2023, du curatio a également été utilisé à la suite d’une forte pression de monilia sur le verger bio où étaient installées les poules. La présence de ces animaux dans la parcelle a pour autant démontré une diminution de la population de forficules, permettant de se passer de glu. Pour le démontrer, les responsables du site ont posé des bandes cartonnées sur les branches du 13 avril au 17 mai. « Par rapport aux autres parcelles, nous avons compté une diminution de 50 % de la population de forficules, détaille le pilote de l’expérimentation, Laurent Brun. Mais cette baisse n’est pas suffisante, puisque les morsures sur les fruits persistent. » L’utilisation de la barrière de glu sur le tronc s’avère donc plus efficace pour réduire les dégâts à la récolte.

L’impact de l’avifaune sur les poules a également rendu cette expérimentation plus difficile. « Les abricotiers formés en gobelets greffés hauts ont constitué un "toit" qui a, certes, protégé les poules des attaques de la plupart des rapaces, mais pas de l’autour des palombes, dont les attaques sont survenues en automne 2022 et 2023 », déclare Laurent Brun. Ces attaques, couplées aux diverses alertes de grippe aviaire, ont nécessité de protéger les poules avec un filet pour leur permettre de rester dans le verger.

Malgré ces aléas et une perte de production en 2021 pour cause de gel, les deux systèmes innovants ont montré de bons rendements. Les responsables techniques vont continuer l’évaluation du dispositif durant trois années supplémentaires. Restent à prendre en compte les amortissements des infrastructures, les temps de travaux ainsi que les coûts des intrants.

Léa Rochon

Des filets anti-insectes et de bâches anti-pluie ont été déposés sur les vergers, afin de tester leur protection face aux ravageurs. ©Inrae UERI Gotheron