SCRUTIN
Des élections législatives aux enjeux multiples pour le pays

Dans la continuité de l’élection présidentielle qui a vu la réélection d’Emmanuel Macron, les élections législatives des 12 et 19 juin permettront de renouveler les 577 sièges de l’Assemblée nationale. Assurant un équilibre entre les pouvoirs exécutif et législatif garant de la stabilité de l’État, les députés exercent un rôle central parmi les institutions, entre ancrage territorial et représentation nationale. Éléments de compréhension.

Des élections législatives aux enjeux multiples pour le pays
les députés siègent au Palais Bourbon à Paris, un édifice qui depuis la fin du XVIIIe siècle abrite la chambre basse du Parlement français.

Les 12 et 19 juin prochains1, les Français seront appelés aux urnes pour élire leurs députés. Au nombre de 577, les députés français sont élus au scrutin majoritaire à deux tours dans le cadre d’un découpage par circonscriptions. Chaque département est divisé en une ou plusieurs circonscriptions, en fonction de sa population. Ainsi, si le Cantal ne possède qu’une seule circonscription, le département de Paris en dispose par exemple de dix-huit. Le fonctionnement du scrutin est simple : si au premier tour, un candidat obtient plus de 50 % des suffrages exprimés
et un nombre de voix au moins égal à 25 % du nombre d’électeurs inscrits, il remporte sa circonscription et en devient député. Si aucun candidat n’est élu dès le premier tour, un second tour est organisé une semaine plus tard pour en désigner le vainqueur. Seuls les candidats ayant récolté au moins 12,5 % des suffrages exprimés au premier tour peuvent y participer. Élus pour cinq ans renouvelables, hors cas de dissolution (voir par ailleurs), les députés siègent au Palais Bourbon à Paris, un édifice qui depuis la fin du XVIIIe siècle abrite la chambre basse du Parlement français. À noter que depuis la loi du 6 juin 2000 sur la parité, l’aide publique aux formations politiques est attribuée en fonction de la part de femmes présentées parmi la liste de candidats. De 10,9 % de femmes députées aux élections législatives de 1997, leur part dans la représentation nationale a atteint 38,7 % en 2017.

Vote des lois et contrôle du gouvernement

S’il est élu dans une circonscription, le député exerce un mandat national. Son rôle, central parmi les différentes institutions de la Ve République, se décompose en six grandes missions. Tout d’abord, les députés votent les projets de lois du gouvernement, après un débat au sein de  l’hémicycle. Loin d’être cantonnés à un rôle passif, les députés peuvent également profiter de leur ancrage territorial pour faire remonter des problématiques de terrain et formuler des propositions de lois. Au terme de la navette parlementaire qui s’engage avec le Sénat et si la  commission mixte paritaire ne parvient pas à un texte commun, les députés peuvent aussi statuer définitivement sur demande du gouvernement. L’autre rôle des députés est celui de contrôle. Après le vote d’une loi, un groupe de soixante députés peut se constituer et saisir le Conseil constitutionnel afin qu’il se prononce sur la conformité d’un texte de loi à la Constitution. Le député peut aussi interroger le gouvernement et examiner son action au sein d’une commission voire, s’il est rapporteur spécial au sein de la commission des finances, contrôler l’emploi de l’argent public. Ce rôle de contrôle va jusqu’à la possibilité pour le député de signer une motion de censure, soumise au vote de l’ensemble de l’Assemblée nationale, de manière à mettre en cause la responsabilité du gouvernement. Conjointement avec les sénateurs, les députés forment également la Haute Cour, chargée de se prononcer sur une éventuelle destitution du président de la République. Notons par ailleurs qu’un député a l’obligation de siéger au sein de l’une des huit commissions permanentes de l’Assemblée nationale, chargées de préparer le débat dans l’hémicycle qui précède le vote des lois. En parallèle, un député peut également être élu par ses pairs au sein de la Cour de justice de la République composée de six députés, six sénateurs et trois magistrats et dont la fonction principale est de juger les membres et anciens membres du gouvernement.

Un équilibre des pouvoirs avec l’exécutif

Au terme des élections législatives, le groupe parlementaire qui a réussi à faire élire au minimum 289 députés devient majoritaire à l’Assemblée nationale. C’est ensuite au président de la République  que revient la charge de nommer dans les rangs de la majorité le Premier ministre. En accord avec le président de la République, celui-ci doit ensuite composer son gouvernement. Dans la foulée des élections législatives est  également élu par les députés le président de l’Assemblée nationale, quatrième homme de l’État français dans l’ordre protocolaire derrière le président de la République, le Premier ministre et le président du Sénat. Si le président de la République est chargé de nommer le chef de la majorité, il peut aussi tenter de renverser cette dernière par une dissolution de l’Assemblée nationale. La dissolution est actée après consultation du Premier ministre et des présidents des deux assemblées dont l’avis est purement consultatif. Des élections législatives doivent alors être organisées dans les vingt à quarante jours suivant la dissolution. Destinée à dénouer une crise ou un blocage institutionnel, l’arme de la destitution a été utilisée à plusieurs reprises sous la Ve République : par Charles de Gaulle en 1962 et 1968, par François Mitterrand en 1981 et 1988 et par Jacques Chirac en 1997, cette dernière tentative se soldant par un échec pour le président de la République qui a dû composer avec une cohabitation jusqu’à sa réélection en 2002.

Pierre Garcia

TÉMOIGNAGE

Jean-Marie Sermier (LR) : “ J’ai essayé de défendre la voix de la ruralité ”

Viticulteur de métier, Jean-Marie Sermier a été député de la troisième circonscription du Jura depuis 2002. À l’aube des élections législatives, il a d’ores et déjà fait savoir qu’il ne se représenterait pas pour un cinquième mandat. Retour sur son parcours.

Très investi dans la vie politique, Jean-Marie Sermier a terminé son quatrième mandat en tant que député Les Républicains (LR) de la 3e circonscription du Jura. Vingt ans passés loin de son exploitation viticole de Cramans qu’il a transmis à son épouse en 2002, au moment de prendre ses fonctions à l’Assemblée nationale. « À cette époque, j’étais premier vice-président du Département du Jura. J’avais 31 ans. S’est alors posée la question de savoir qui allait se présenter aux législatives contre Dominique Voynet, la députée sortante de la circonscription. Engagé dans les collectivités territoriales, j’ai dû répondre à la fois à l’attente de mes électeurs et de mes collègues maires et c’est à moi qu’est revenu ce challenge. » Vainqueur à l’issue des élections de 2002, il a dû mettre de côté son métier de passion, la viticulture. « Physiquement, ce n’était pas possible de concilier les deux activités, d’autant plus que je suis attaché à faire les choses bien. La fonction de député nous prend 100 % de notre temps, presque plus qu’un paysan… Je me déplaçais deux à quatre jours de la semaine à Paris, et le reste du temps, je le passais dans ma circonscription où il y a beaucoup d’activité », déclare-t-il.

Défenseur de la cause viticole

Tous les lundis, Jean-Marie Sermier a assuré une permanence à destination de ses administrés. « C’était important d’avoir ces retours du terrain », explique-t-il. Attaché à ses terres, le député LR a pu défendre des
dossiers qui lui tenaient particulièrement à coeur. « J’ai notamment travaillé au sein du groupe d’étude Vigne, vin et oenologie, ainsi qu’à l’Association nationale des élus de la vigne et du vin. Nous avons essayé de défendre,
au-delà des contingences politiques, la viticulture et la vision culturelle du vin. C’est un marqueur identitaire de la société française », s’attache à dire Jean-Marie Sermier. Défendre l’agriculture française et ses labels de qualité a été l’une des missions de l’homme politique. « J’ai pris beaucoup de plaisir durant quatre mandats, même si je n’ai pas toujours partagé les visions politiques des élus. J’ai essayé de défendre la voix de la ruralité, que ce soit la chasse, la viticulture, l’agriculture, les zones rurales dont on considère trop qu’elles sont simplement des zones où l’on brûle du gasoil et où l’on fume des clopes, comme l’aurait dit un ministre… C’est une dimension
culturelle très intéressante. »

Une liberté de vote totale

Quant à la liberté de vote, Jean-Marie Sermier indique avoir eu « une liberté totale ». En dehors des textes de société (procréation médicalement assistée, bien-être animal, etc.) où des querelles ont parfois pu éclater en fonction des arguments de chacun, il était souvent question d’une position commune. « Dans l’opposition, chacun avait sa liberté de vote, contrairement aux députés de la majorité sortante dont certains n’ont, semble-t-il, pas eu d’investiture parce qu’ils n’avaient par exemple pas voté pour le pass sanitaire » À quelques semaines des élections législatives, c’est sans regret que Jean-Marie Sermier va tourner la page d’une fonction politique qu’il
aura menée durant vingt ans. « Depuis une quinzaine de jours, je suis plus souvent sur l’exploitation qu’ailleurs », avoue-t-il. Jean-Marie Sermier avait annoncé mi-janvier qu’il ne briguerait pas un cinquième mandat lors des prochaines élections législatives des 12 et 19 juin.

Amandine Priolet