BIEN-ÊTRE ANIMAL
Le référendum pour les animaux fait parler de lui

Sébastien Duperay
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BIEN-ÊTRE ANIMAL / Le journaliste de France 2, Hugo Clément et plusieurs chefs d'entreprise ont lancé le 2 juillet un projet de « référendum pour les animaux ». Plus de 750 000 personnes, dont 140 parlementaires, soutiennent déjà l’initiative, soumise à la procédure du référendum d'initiative partagée. Politiques et représentants de la profession agricole réagissent.

Le référendum pour les animaux fait parler de lui
Dans une vidéo postée sur la plateforme referendumpourlesanimaux.fr, le journaliste de France 2, Hugo Clément, à l’origine du projet, énonce les six mesures portées par le RIP. Le projet doit recueillir les signatures d’au moins 185 parlementaires et 4,7 millions de personnes (10% des personnes inscrites sur les listes électorales) pour permettre le dépôt d’une proposition de loi au référendum.

L'idée serait née au cours d'un déjeuner entre Xavier Niel (Free) et Jacques-Antoine Granjon (Veepee), rapportait le journal Le Parisien le 6 juillet sur son site. Le journaliste Hugo Clément et plusieurs chefs d'entreprise ont lancé le 2 juillet un projet de « référendum pour les animaux ». La procédure est celle du référendum d'initiative partagée (RIP) et la finalité est d’améliorer les conditions de vie des animaux en France. Le projet de RIP porte six mesures : interdiction de la chasse à courre, du déterrage et des chasses dites traditionnelles ; interdiction des élevages à fourrure ; interdiction de l’élevage en cage ; fin des spectacles avec des animaux sauvages ; arrêt des expérimentations sur les animaux lorsqu’il existe une méthode de recherche alternative et fin de l’élevage intensif.

« Le RIP est un outil qui permet aux citoyennes et aux citoyens, s’ils sont suffisamment nombreux et soutenus par des parlementaires, de soumettre une proposition de loi au référendum », explique Hugo Clément dans une vidéo publiée sur la plateforme en ligne referendumpourlesanimaux.fr, sur laquelle se sont déjà engagées 755821 personnes, dont 140 parlementaires (au 22/09/2020, ndlr).

Pour être valable, le RIP doit cependant recueillir les signatures de 185 parlementaires, députés ou sénateurs, et de 4,7 millions de personnes, représentant 10% du nombre des inscrits sur les listes électorales. De nombreuses personnalités de la vie publique et médiatique soutiennent aussi l’initiative, parmi lesquelles Nicolas Hulot, Alessandra Sublet, Yann-Artus-Bertrand, Sonia Rolland ou encore Alain Bougrain-Dubourg.

« Pas le bon véhicule »

Interrogé au Space de Rennes, le 16 septembre, sur le RIP animaux, le ministre de l'Agriculture Julien Denormandie a répondu que, tout en respectant « le processus démocratique », il ne s'agissait pas du « bon véhicule » politique. D'une part, estime le ministre, « on ne sait même pas ce qu'est un élevage intensif ». De plus, ajoute-t-il, « si la production porcine passe en extérieur, on ne dit pas aux Français qui paie la transition. Si nous avons demain uniquement des poules en plein air, a-t-on dit aux Français que dans les champs il y aura plein de poules », évoquant d'éventuelles nuisances sonores.

Pour Julien Denormandie, le débat sur le bien-être animal « ne doit pas être celui d'une société qui voudrait du bien-être animal face à des éleveurs qui n'en voudraient pas. Le débat nécessite un financement des transitions et un aménagement du territoire ».

Dans une tribune parue le 17 septembre, les start-ups agricoles de la Ferme digitale se sont, elles, adressées notamment aux trois PDG du numérique signataires, Jacques-Antoine Granjon, Marc Simoncini (Meetic) et Xavier Niel, les appelant à « écrire un récit commun » autour de l’élevage : « Nous devons faire progresser ensemble cette filière nourricière, ce terreau économique, sans que cela ne passe par l’unique et constante surmédiatisation de pratiques intensives ou de la fin annoncée de l’élevage dans sa globalité ».

« Pas à la hauteur de l’enjeu »

Du côté de la profession, le président de la FRSEA Auvergne Rhône-Alpes, Michel Joux, estime que l’ « on pourrait trouver des solutions de dialogue beaucoup plus constructives qu’un référendum. […] On risque d’avoir des résultats qui ne seront pas à la hauteur de l’enjeu. Nous sommes loin d’être contre le bien-être des animaux, on s’en occupe tous les jours sur nos exploitations. Et tout le monde sait qu’un animal dont on prend soin est aussi un animal qui produit plus ».

L’éleveur s’interroge sur la finalité réelle du RIP : « si la question est de savoir ce que l’on peut faire pour encore améliorer le bien-être animal, on peut toujours mieux faire. Mais la question est plutôt de savoir si l’on doit continuer d’élever des animaux pour les abattre ». Inquiet de ce que pourrait être le résultat du RIP, Michel Joux en appelle au corps politique et à ses élus, « qui captent les enjeux et avec lesquels on puisse travailler pour savoir ce que l’on veut faire de l’agriculture et comment améliorer encore les pratiques ».

Sébastien Duperay