Fourrages : malgré les pluies, l'inquiétude perdure

Mylène Coste
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FOURRAGES / Très précoce cette année, la campagne de fourrage bat son plein dans plusieurs territoires. Malgré les pluies du mois de mai, la récolte s’avère très hétérogène et pas toujours à la hauteur des attentes.

Fourrages : malgré les pluies, l'inquiétude perdure
Brice André, éleveur bovin à Villeneuve-de-Berg, craint que le sec ne reprenne le pas, après les pluies de mai.

Quelques jours après les pluies du mois de mai, André Brice a démarré la deuxième coupe des fourrages dans ses prairies temporaires. Éleveur de vaches salers en bio au Domaine du Serre de Villeneuve-de-Berg, à près de 340 m d'altitude, il observe : « Malgré les pluies récentes, il manque environ 20 % d'une année normale sur les fourrages. En cause : Un hiver sec et doux, suivi d'une vague de froid et de gelées en février-mars, et quasiment aucune pluie jusqu'à la fin avril. J'ai donc été contraint de faucher les premières coupes exceptionnellement tôt, dès début avril. Le sainfoin et la luzerne étaient alors déjà envahis par le perce-sac, signe d'une mauvaise année. » Et les premières coupes ont été bien décevantes pour le jeune éleveur, avec un rendement d'environ 5 balles rondes / ha.

Une situation contrastée dans le Sud

« Les pluies du mois de mai ont été de qualité et bénéfiques, estime Brice André. Malgré tout, la végétation avait beaucoup souffert auparavant et il va manquer du fourrage. D'autant plus que ces derniers jours, le vent du nord a énormément soufflé et que les températures ont facilement dépassé les 30°C. » C'est pourquoi dès le jeudi 22 mai, l'agriculteur villenevois a fauché ses parcelles en méteil, à  l'aide du matériel emprunté à la Cuma du Sud Coiron (Saint-Pons). « J'ai andainé et pressé le jour même : c'était bien assez sec pour l'enrubannage ! » Il observe un belle qualité sur ces deuxièmes coupes.

Vendeur de fourrages à Lagorce, plus au sud, Patrice Eldin constate : « Les fauches ont été plutôt mauvaises pour les prés précoces, mais sur les prés plus tardifs, la qualité et la quantité sont là : on pourrait faire le double de l'année dernière (qui était catastrophique) et une qualité bien meilleure qu'il y a deux ans pour les fourrages en sec. » Il achève tout juste la première coupe en luzerne, et augure une belle deuxième coupe mi juin, tout en se disant confiant quant à une troisième coupe dans l'été.

De faibles quantités pour le Haut-Vivarais

Sur le secteur de Tournon, Grégory Baud a commencé les premières coupes dès le 15 avril sur ses prairies temporaires, là où la végétation était prête et afin d'éviter le risque de sec : « On a eu une belle qualité mais une petite quantité. Il poursuit : Cette semaine, nous faisons une deuxième coupe sur ce que l'on a pu ramasser, et c'est déjà une bonne chose, car ce n'est pas tous les ans qu'on peut faire un second passage ! Les fourrages sont de qualité, mais on ne fera pas de gros volumes », déplore-t-il.

La situation au Nord de l'Ardèche est cependant préoccupante. Éleveur caprin à Préaux, Jean-Philippe Fourel déplore un déficit de récolte, malgré les pluies. « La situation est constrastée selon la nature et la situation du terrain. Sur les terres les plus séchantes, on aura pas plus de 25 % d'une récolte normale, tandis que sur les terrains plus profonds, on peut avoir jusqu'à 75 % de récolte. La pluie est arrivée trop tard, la chaleur et le sec d'avril avaient déjà fait beaucoup de mal. »

Des fourrages précoces mais jolis en altitude

Sur la Montagne ardéchoise, la végétation est très en avance cette année : « J'ai fait les premières fauches dès le 6 mai dans mes prairies de ray grass, avant même le début de l'épiaison : un mois d'avance par rapport à la normale, je n'avais jamais vu ça de ma vie ! » affiche Pascal Courtial, éleveur laitier à Coucouron. « Il y a une belle qualité, et j'ai réalisé environ 17 boules/ha. Il poursuit : J'ai refauché les prairies artificielles dès le 18 mai. Côté quantité, ce n'est pas très épais mais ce n'est tout de même pas trop mal. » Et d'espérer : « On n'est pas à l'abri d'un été sec et chaud, mais j'espère qu'on pourra faire une belle saison. Et que les vaches pourront pâturer plus longtemps que l'an dernier. Nous les avons sorties dès le 1er mai, espérons que nous n'aurons pas à les faire rentrer avant la fin de l'été ! »

Plus au Sud de la Montagne, à Sainte-Eulalie, l'Earl Peyronnet devrait commencer les foins en prairies naturelles dans les prochains jours. « Après les pluies des dernières semaines, les prairies sont plutôt jolies, et nous permettent d'être plutôt optimistes. Il nuance : Toutefois, on nous annonce un été très chaud; espérons qu'il ne sera pas aussi sec que les trois dernières années, qui ont été très difficiles pour les éleveurs. L'an dernier, nous avions dû acheter pour 15 000 € de fourrages pour compenser le manque. Pourvu que la météo soit plus clémente cette année et permette une repousse pour les mois d'août, septembre et octobre. »

Mylène Coste

Les agriculteurs ardéchois se pressent pour la récolte des fourrages