ENTRETIEN
Damien Greffin : « Notre souveraineté alimentaire est menacée »

Damien Greffin, agriculteur dans l’Essonne et membre du bureau de la FNSEA, est l’invité du congrès de la FDSEA de l’Ardèche qui se tiendra le 13 mars à Vesseaux. Il interviendra autour de la question : « comment rester en capacité de produire ? »

Damien Greffin : « Notre souveraineté alimentaire est menacée »
Damien Greffin

Pouvez-vous vous présenter en quelques mots ?

Damien Greffin : « Je suis agriculteurs dans l’Essonne, associé avec mon frère. Nous cultivons près de 400 ha de SAU en grandes cultures, notamment blé (pour la meunerie), orge de printemps (pour la brasserie), betterave sucrière, pois protéagineux (pour l’alimentation animale) et maïs, le tout commercialisé en coopérative. Nous avons un salarié. Je suis également président de la FDSEA et FRSEA Ile-de-France et membre du bureau de la FNSEA. Notre exploitation est installée dans une zone périurbaine, nous sommes donc très concerné par les questions de relations avec les riverains et les ZNT, l’aménagement foncier, les déplacements parfois compliqué car il nous faut traverser des zones urbaines pour aller d’un site à l’autre de l’exploitation… »

Vous êtes producteur de betterave et mobilisé contre l’interdiction des néonicotinoïdes. En quoi cela concerne les agriculteurs ardéchois ? 

D.G. : « Ce qu’on vit en betterave, vous le vivez en Ardèche pour d’autres productions, en fruits et légumes et notamment en cerise avec l’interdiction du Phosmet qui a déjà provoqué une vague d’arrachages. Il en va de même dans certaines régions où des filières tout entières sont menacées, comme l’endive, le maïs... Tout cela pose la question de notre capacité à produire et menace notre souveraineté alimentaire. Entre 2020 et 2021, on a observé une hausse de 21 % des produits alimentaires, ce qui doit nous interroger. La question de la souveraineté alimentaire est d’autant plus importante que la guerre est à nos portes. »

Que faut-il faire ?

D.G. : « Se battre pour en finir avec la sur-transposition1 des normes européennes en droit français ! Il faut en finir avec les distorsions de concurrence au sein même de l’Union européennes, qu’elles soient sur le coups de la main d’œuvre ou bien sur les pratiques : par exemple, on interdit les néonicotinoïdes en France mais pas en Allemagne. Nous n’avons de cesse de mettre la pression sur le gouvernement et avons encore évoqué ces sujets lors du salon de l’agriculture avec Emmanuel Macron, mais entre les paroles et les actes, il y a un fossé et un double discours qui ne peut pas durer. »

Le combat est-il perdu ?

D.G. : « Non, il y a des raisons d’espérer. Nous avons réussi à imposer dans le débat public et auprès des politiques la question de la souveraineté alimentaire et de notre capacité à produire, en France. Les moyens pour y parvenir sont encore flous mais nous avons sensibilisé les élus sur ces enjeux. Selon moi, cela passera par la recherche, en particulier génétique et variétale, sur laquelle il faut être beaucoup plus ambitieux. En attendant, on ne peut pas interdire la chimie du jour au lendemain. »

Comment rester positif ?

D.G. : « Nous faisons le plus beau métier du monde, et l’agriculture française est la plus vertueuse, la plus diversifiée et la plus saine du monde. Il faut tout faire pour la conserver ! »

Propos recueillis par M.C.

1. La surtransposition désigne toute mesure nationale de transposition instaurant une norme plus contraignante que celle qui résulterait de la stricte application de la directive.

La FDSEA en congrès le 13 mars

Le 77e congrès de la FDSEA de l'Ardèche se tiendra le 13 mars à Vessaux (espace Séraphin Gimbert). Après une séance à huit-clos le matin, l'après-midi sera consacrée à une table-ronde suivie d’un débat avec la salle sur le thème : « Être agriculteur en France en 2023 ; comment rester en capacité de produire ? ».