CONGRÈS
L’eau, au cœur des débats des maires ruraux

Le 28e congrès de l’association des maires ruraux d’Ardèche (AMR07) s’est tenu début juillet à Coucouron, fief de son ancien président, Jacques Genest. L’occasion de revenir sur presque 30 ans de défense de la ruralité, mais aussi sur les enjeux auxquels sont confrontés les maires des communes.

L’eau, au cœur des débats des maires ruraux
Environ 150 maires ont fait le déplacement pour assister au congrès. Crédit photo AAA/MMartin

L’association des maires ruraux d’Ardèche (AMR07), qui a vu son nombre d’adhérents grimper de près de 45 % depuis 2019 (174 communes en 2019 contre 263 en 2023) , prouve la solidarité qui peut exister dans le monde rural quand il s’agit de défendre un territoire.

Gestion de l'eau

Le thème principal du congrès a été l’eau et sa gestion, au travers notamment de l’urbanisme et des modalités de refus de permis de construire suivant l’état du réseau d’eau de la commune. Il a également été question de la sécurité incendie, avec l’intervention du président du Sdis et conseiller départemental, Pierre Maisonnat. Pour le président du Sdis, les citernes enterrées afin de récupérer l’eau de pluie, sont une solution qui pourrait servir aux communes lors d’incendies. Le colonel du Sdis 07, Vincent Honoré, renchérit : « En effet, c’est une ineptie de mettre de l’eau potable pour éteindre un feu ». Concernant le débroussaillage, le Sdis rappelle la responsabilité des maires qui sont « les garants de l’application des règles à leurs administrés. C’est une obligation légale de débroussailler à moins de 200 mètres d’un massif. La maison doit être débroussaillée 50 mètres autour », détaille le colonel.

Des compétences retirées aux maires

Le congrès est revenu sur les violences qui ont agité la France, début juillet, et qui ont visé le maire de Fontaine, en Isère, afin de demander un véritable statut pour les élus. Par ailleurs, ce rassemblement aura été l’occasion d’adresser aux interlocuteurs de l’État le sentiment d’abandon, ressenti par les maires ruraux, qui regrettent une centralisation des compétences. Le président d’AMR07, Sébastien Pradier, attend « des actes forts de la part de l’État. Les subventions ne suffisent pas, nous perdons en compétence ! Par exemple, celle de la gestion de la ressource en eau, qui sera confiée à la communauté de communes à partir de 2026. Il faut que l’État joue son rôle de législateur, pour conserver la compétence de ce que nous avons de plus cher sur le territoire : l’eau », affirme le maire du Cros-de-Géorand. De son côté, le préfet de l’Ardèche, Thierry Devimeux, soutient qu’il est essentiel de consolider la gouvernance sur l’eau. « Pour qu’elle soit efficiente, cela passe par un regroupement afin d’avoir une assise financière plus forte et être capable de supporter un investissement coûteux. »

Le système de santé est lui aussi pris en exemple afin d’illustrer le sentiment d’abandon que partagent les maires ruraux. Sébastien Pradier, rappelle que les zones rurales sont sous-dotées en système de santé. « On vit 2 ans de moins en campagne que dans les villes, faute de moyens hospitaliers à proximité », scande-t-il. Sur sa lancée, le nouveau président se fait porte-parole des agriculteurs de son territoire. « Ce sont eux qui forgent les paysages, la ruralité. Grâce à eux, nous avons des zones humides protégées. Il faut nous battre pour aider les agriculteurs qui voient le loup décimer leurs troupeaux. » Jacques Genest reconnaît, lui, une baisse des activités agricoles dans les communes rurales au profit d’une hausse de l’activité touristique.

« L’avenir sera sobre ou il ne sera pas »

Le préfet de l’Ardèche observera à ce propos : « Il n’y a pas de loups en Ardèche, il y a le passage de deux loups. De plus, ils sont comptés chaque année. Par ailleurs, l’Ardèche est un des départements qui accueille le plus d’installations de jeunes agriculteurs ». Il reviendra sur les griefs contre l’État, entendu tout au long du congrès, en rappelant l’implication de l’institution. « l’État est là pour vous accompagner, notamment pour faire de l’Ardèche un territoire de pointe face au changement climatique en cours, à travers la sensibilisation des élus et du public. Le défi est devant nous : il faut une certaine résilience. Trois actions sont mises en place : la réduction des gaz à effet de serre, la gestion de l’eau, et la protection de la biodiversité. Le CRTE1 du département est financé à travers le fond vert pour mettre en avant une stratégie énergétique. Cette année, 50 % du DETR2 a été destiné pour financer des projets sur l’eau. » Le préfet prévient : « L’avenir sera sobre en eau, énergie, en consommation d’espace et de ressource ou il ne sera pas ».

Marine Martin

1. Contrat de relance et de transition écologique.

2. Dotation d’équipement des territoires ruraux.

Sébastien Pradier, nouveau président de l'AMR07
Sébastien Pradier.
ASSOCIATION

Sébastien Pradier, nouveau président de l'AMR07

En 2022, le président et fondateur de l'AMR07, Jacques Genest, annonce son retrait à mi-mandat. Sébastien Pradier, natif du Cros-de-Géorand qui en est devenu le maire en 2020, en devient le nouveau chef de file. Il explique ce choix par « une envie de continuité, mais aussi de donner à quelqu’un de plus jeune la présidence. Puis, c’est une fierté que la commune la plus rurale garde la présidence ! », Jacques Genest.

DÉBATS

Le programme France Ruralité et le ZAN

Parmi les sujets évoqués lors du congrès, le ZAN (Zéro artificialisation nette) et le programme France Ruralité.

Le programme France Ruralité adopté le 15 juin vise à répondre aux besoins des territoires ruraux. Un programme, lancé par l’agence nationale de la cohésion des territoires (ANCT) « villages d’avenir » permettra le recrutement de 100 chefs de projets répartis dans les préfectures et sous-préfectures de territoires ruraux pour permettre aux mairies de les accompagner dans leur projet. « Un accompagnement qui sera financier, juridique, pour une meilleure cohésion des territoires », détaille Michel Fournier, président de l’AMRF. II ajoute : « La deuxième reconnaissance est celles des aménités : vis-à-vis des actions que l’on va entreprendre pour préserver les lacs, forêts, rivières. Par exemple, par la mise en place d’éolienne ou de méthanisation. 40 à 100 millions sont apportés pour les actions que l’on va entreprendre pour les communes, pour la taxe carbone ».

Le ZAN (Zéro artificialisation nette) qui prévoit la réduction de 50 % du rythme d’artificialisation et de consommation des ressources d’ici 2030, a également été abordé au cours du congrès. Source de questionnement du côté des maires, qui voient en ce plan, une réduction de l’activité économique, la sénatrice de l’Ardèche, Anne Ventalon, a apporté des précisions, en attente du texte voté le 13 juin. « La commission mixte paritaire a retenu la mesure de garantie universelle de construction, en conférant à chaque commune 1 hectare de construction quelle que soit la densité de sa population comme l’a souligné le sénateur Mathieu Darnaud, les communes qui sont au RNU (règlement national d’urbanisme), ne sont pas concernées par le ZAN », explique la sénatrice.

M.M.

Le président de l’AMRF, Michel Fournier, le nouveau président AMR07, Sébastien Pradier et l’ancien président et fondateur de l’association Jacques Genest.