JEUNES AGRICULTEURS
En Ardèche, « que la montagne est belle » !

Mylène Coste
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JEUNES AGRICULTEURS / Du 5 au 7 janvier, une quarantaine de jeunes agriculteurs de toute la France étaient réunis à Sagnes-et-Goudoulet, sur le plateau ardéchois, à l’occasion de la session Montagne du syndicat.

En Ardèche, « que la montagne est belle » !
37 jeunes agriculteurs de tous les massifs français étaient réunis à Sagnes-et-Goudoulet les 5, 6 et 7 janvier pour la session nationale Montagne de JA.

Les prairies enneigées du plateau ardéchois ont constitué un décor idéal à la session Montagne des Jeunes agriculteurs (JA), les 5, 6 et 7 janvier. « Presque tous les massifs français étaient représentés, se félicite Benoit Breysse, président de JA Ardèche. Cela nous tenait à cœur d’organiser cet événement en Ardèche, pour pouvoir mettre en avant nos spécificités. » Des spécificités qui n’ont pas échappé aux participants, à l’instar de Justine Fusi, éleveuse de vaches laitières en Haute-Savoie et responsable nationale du dossier Montagne chez JA : « On ne s’attendait pas à rencontrer un tel climat en Ardèche, avoue-t-elle. Le climat de la Montagne ardéchoise est très rude. Avec les sécheresses à répétition, on prend la mesure des difficultés engendrées ici par le réchauffement climatique. »

Prédation, patous et promeneurs au cœur des discussions

La prédation a, cette année encore, fait l’objet de vives discussions. La fédération nationale des communes pastorales, créée il y a tout juste un an, est intervenue sur ce sujet lors de la session. « Nous avons notamment parlé des chiens de troupeaux et randonneurs, et de la manière dont on peut communiquer auprès du grand public pour éviter toute situation de danger », explique Benoit Breysse. Justine Fusi d’ajouter : « Cette année, avec la crise sanitaire, la fréquentation touristique des zones de montagne a explosé. Or, les randonneurs ignorent parfois qu’ils peuvent se retrouver confrontés à des chiens de troupeau, ce qui peut conduire à des attaques. Nous avons émis l’idée de nous doter d’outils de communication uniformes (panneaux de signalisation etc.) au niveau de tous les massifs français, afin de sensibiliser et d’informer au mieux les promeneurs. »

Le renouvellement des générations, un défi pour la Montagne ardéchoise

Véritable enjeu sur tout le territoire, et particulièrement marqué sur la Montagne ardéchoise, le renouvellement des générations a fait l’objet de nombreux échanges. « Sur le plateau, peu de jeunes prennent la succession de leurs parents, et les installations hors cadre familial sont encore moins nombreuses, observe Benoit Breysse. Nous avons débattu de certaines initiatives visant à redynamiser les installations sur ces territoires. Les JA de Savoie, en lien avec la MSA, expérimentent par exemple un système de dégrèvement des cotisations sociales pour les cédants qui s’engagent dans un dispositif de transmission. Pourquoi ne pas généraliser ce dispositif ? »

M.C.

Signes de qualité et circuits courts : la recette gagnante du Gaec Montfol
Patrick et Guillaume Marcon.

Signes de qualité et circuits courts : la recette gagnante du Gaec Montfol

PORTRAIT D’EXPLOITATION / Durant la session Montagne, les participants ont pu découvrir l’exploitation familiale des frères Patrick et Guillaume Marcon, à Sainte-Eulalie.

Créé en 1997, le Gaec Montfol, comprend aujourd’hui 170 ha de prairies naturelles (prés et pâtures). « Nous avons un atelier allaitant avec 49 vaches de race aubrac, et commercialisons la viande en AOP Fin Gras du Mézenc de février à juin, et au sein de la boucherie de notre frère Nicolas au Béage pour les génisses et veaux de boucherie. L’appellation Fin Gras nous est précieuse, elle apporte une meilleure valorisation de nos produits, souligne Guillaume Marcon. Il poursuit : Nous avons également 24 vaches laitières (montbéliardes et abondances) et commercialisons notre production en lait traditionnel via la laiterie Carrier. Mais l’avenir de la collecte étant incertain, nous pourrions être amenés à cesser l’activité laitière dans quelques années. » 

Justine Fusi
Justine Fusi

Nouvelle PAC : « Il faut limiter la course à l'hectare ! »

QUESTIONS À / Justine Fusi, membre du bureau national de JA et responsable du dossier Montagne.

Une demi-journée d’échanges a été consacrée à la future PAC. Qu’en retirez-vous ?

Justine Fusi : « Afin de préparer cette demi-journée, les JA de chaque département avaient été invités à remplir un questionnaire. Nous avons ainsi pu débattre des positions de chacun afin d’élaborer des propositions communes pour la future PAC. Ces propositions seront soumises au conseil d’administration de JA, puis débattues lors de notre session PAC qui aura lieu en février à Langres (Haute-Marne). »

L’ICHN végétale a été vivement débattue. Qu’en est-il ressorti ?

J.F. : « Lors de la précédente session montagne, il avait été question de demander la suppression de l’ICHN végétale, car nous craignions qu’elle soit élargie et diluée à d’autres zones (zones défavorisées, intermédiaires). Mais lors des discussions, nous avons réalisé qu’elle était très importante pour des territoires de montagne sèche comme les Alpes-de-Haute-Provence, pour des productions telles que la lavande, l’arboriculture, ou encore les céréales pour l’autoconsommation. Nous avons donc acté le maintien de l’ICHN végétale, mais uniquement pour les zones de montagne sèche. »

Le foncier est un enjeu important pour les JA. L’est-il plus encore en montagne ?

J.F. : « En effet, l’élevage de montagne se définit par des systèmes extensifs, pâturants avec un besoin de terres. La quasi-totalité des cahiers des charges (AOP, signes de qualité) imposent le pâturage. Par ailleurs, avec l’essor du tourisme, les zones de montagne subissent une importante pression foncière, d’où l’importance de cette question. Dans la future PAC, nous proposons d’ailleurs des surprimes sur les 25 premiers hectares et un plafonnement à 52 ha. Il faut limiter la course à l’hectare ! »

Que proposez-vous concernant les conditions d’accès à l’ICHN ?

J.F. : « Pour éviter que certains ne profitent des aides alors qu’ils n’ont pas d’animaux l’hiver, mais seulement durant l’estive, certains départements proposaient d’inclure des UGB hivernaux parmi les critères de l’ICHN. Mais nous nous sommes finalement rendu compte que cela excluait trop de monde, notamment dans des départements comme la Savoie où bon nombre d’éleveurs n’ont pas la possibilité de garder leurs bêtes en altitude durant l’hiver et sont contraints de les hiverner en bas. Nous souhaitons aussi que l’ICHN soit réservée aux agriculteurs actifs n’étant pas en capacité d’avoir une retraite à taux plein, pour limiter les abus. Nous proposons aussi une dégressivité des aides pour ceux touchant d’autres revenus que le revenu agricole, voire une suppression de l’ICHN au-delà de deux Smic non-issus de l’activité agricole. L’exploitation doit également avoir au minimum 80 % de SAU en zone de montagne ou défavorisée pour accéder à l’ICHN. »

Propos recueillis par M.C.