EAU
L'irrigation pour les zones agricoles au cœur du Plan Eau du Département

Dans le Cadre du Plan Eau (2024-2026) présenté par le Département lors du vote primitif du budget 2024, celui-ci a choisi d’accompagner deux mesures en faveur de l’irrigation pour l’agriculture.

L'irrigation pour les zones agricoles au cœur du Plan Eau du Département
De gauche à droite : Marc Antoine Quenette, vice-président en charge des finances, Oliver Amrane, président du Département, Benoit Claret, président de la chambre d'agriculture de l'Ardèche, et Matthieu Salel, vice-président en charge de l'agriculture de l'environnement et du tourisme. ©AAA_MMartin

Face au changement climatique abrupt qui s’opère, entre pluies diluviennes aléatoires et périodes de sécheresse intense, l’eau se raréfie. Un défi majeur auquel est confronté particulièrement le monde agricole.

Pour aider les agriculteurs à s’adapter, le Département de l’Ardèche multiplie ses champs d’action. D’abord, avec la signature d’un protocole d’accompagnement de projet de retenues collinaires en 2021 en partenariat avec les acteurs de l’eau et de l’agriculture du territoire. Puis, avec la création des Assises de l’eau, instance de concertation collective mise en place par la préfecture et le Département en 2022 et qui pose un cadre, avec 31 mesures pour un usage économe de l’or bleu. En cette fin d’année, le Département a présenté un Plan Eau où deux mesures concernent des aides pour l’irrigation destinées aux agriculteurs. « Nous avons une des agricultures les plus vertueuses au monde, donc nous souhaitions appuyer l’accompagnement aux agriculteurs », souligne Olivier Amrane, président du Département. Un engagement apprécié par Benoit Claret, président de la chambre d’agriculture de l’Ardèche, qui a salué « le budget considérable », alloué au volet agriculture du Plan. « Nous sommes ravis d’avoir pu participer, en additionnant nos forces, à la construction de ce Plan Eau, dans lequel nous retrouvons une stratégie qui vient concrétiser, matérialiser l’ensemble des mesures prises, pour accompagner les porteurs de projets », avance-t-il. Ces mesures s’inscrivent dans le cadre du Plan Stratégique National 2023-2027. Les subventions proviennent pour une majeure partie du Fonds européen agricole pour le développement rural (Feader). La Région, le Département et l’Agence de l’eau en sont les co-financeurs principaux.

Accompagner les agriculteurs pour une meilleure irrigation

205 et 206 sont les numéros des deux mesures à retenir pour agriculteurs ou collectifs. L’objectif de ces mesures est de participer à l’adaptation des exploitations et des territoires agricoles à la raréfaction de la ressource en eau, tout en la préservant et en participant à une gestion équilibrée. Un dispositif permettant l’accompagnement à un changement de pratique, par un soutien financier pour l’achat de matériel de distribution de l’eau (mise en place de goutte à goutte, pivots, ou encore rampes.) Ces deux mesures contribuent également à la gestion de l’eau par un accompagnement pour s’équiper en matériel de contrôle. Avec des outils de pilotage de distribution de l’eau, des tensiomètres, compteurs, ou encore des sondes.

La mesure 205 s’adresse à des exploitants individuels, tandis que la mesure 206 est destinée à un projet d’irrigation collectif à l’instar des ASA (Association syndicale autorisée en hydraulique agricole.) « Les aides peuvent être de différentes formes : de la création de retenue, à l’agrandissement, en passant par la mise en place d’outils de pilotages des systèmes d’irrigations afin d’en optimiser la gestion », précise Matthieu Salel, vice-président du Département, en charge de l’agriculture, de l’environnement et du tourisme.

Pour effectuer les démarches et monter les dossiers de projets : un guichet unique via le portail de la Région ou les questions autour de l’éligibilité de ces aides est détaillé.

Du stockage, mais une politique d’économie d’eau avant tout

Il ne s’agit pas avec ces aides, de créer des retenues à tout va. Dans le cadre du dispositif Feader, les projets sont soumis à une condition d’économie d’eau. Si le projet est une rénovation de retenue, avec une augmentation du volume d’eau disponible, l’objectif n’est pas d’accroître le prélèvement dans le milieu. Les dossiers doivent démontrer qu’il y a une récupération des eaux de ruissellement, déconnectée de la rivière.

Pour la mesure destinée aux projets d’irrigation collective, l’économie en eau doit atteindre les 25 %. Elle peut se traduire par la modernisation des réseaux par exemple. Concernant les agriculteurs individuels, dépendant de la mesure 205, il est demandé une économie d’eau, a minima de 5 %. La difficulté majeure rencontrée à la constitution des dossiers, réside dans le recueil des données. Car pour valider l’économie d’eau effective, il faut disposer d’un compteur, ce qui n’est pas toujours le cas de toutes les exploitations disposants de retenues.

Plus spécifiquement, le projet doit être compatible au Sdage (Schéma d’aménagement et de gestion de l’eau) et doit avoir obtenu toutes les autorisations nécessaires au préalable, en démontrant qu’il respecte les conditions de prélèvement dans le milieu. Pour accompagner les agriculteurs, des bureaux d’études permettent au porteur de projet d’obtenir un soutien financier pour la réalisation des études de faisabilités préalables aux investissements.

Une fois le dossier complet déposé, la Région l’instruit. Il passe ensuite entre les mains du comité technique constitué des principaux financeurs. Enfin, le projet est présenté en commission permanente. Une fois validé, l’agriculteur est informé. Pour les dossiers individuels, les taux d’aide varient de 40 % à 70 % maximum (avec modulations), pour les dossiers collectifs, les taux sont de 70 % à 80 % maximum. Concernant la réalisation, le porteur de projet peut demander des acomptes. Le solde sera versé une fois les travaux terminés. L’agriculteur dispose de trois ans pour réaliser son projet.

Pour l’instant, ces mesures viennent tout juste de rentrer en fonction, début 2023. « Nous avons six dossiers en individuel et un en collectif », note Matthieu Salel. Optimiste, il ajoute « ce n’est que le début ».

M.M.

Le mot de Matthieu Salel, vice-président du Département
Matthieu Salel, en charge de l'agriculture, de l'environnement et du tourisme. ©AAA_MMartin
IL A DIT

Le mot de Matthieu Salel, vice-président du Département

« Les agriculteurs ardéchois sont déjà vertueux. En effet, ils irriguent peu. Nous nous devons de les accompagner afin de leur garantir un accès à l’eau tout en les encourageant à modifier leurs pratiques », avance Matthieu Salel, vice-président du Département en charge de l’agriculture, de l’environnement et du tourisme.

« On est parti d’un constat : par rapport à certains territoires, il y a une pression importante autour de l’eau, comme dans la Vallée du Doux. Dans ce territoire, il y a une capacité de stockage de 4 millions de m3. Lors de précédents orages, il est passé près de 20 millions de m3 d’eau en 24 heures, donc nous aurions eu la possibilité de stocker. L’important aujourd’hui, est d’aider les agriculteurs de manière significative à stocker de l’eau quand elle est disponible, pour éviter de pomper dans les milieux naturels, notamment en période d’étiage. Le Département accompagne et soutien des systèmes plus économiques en eau. Certes, dans la création de retenues pour stocker la ressource, mais au-delà, en accompagnant une démarche d’adaptation des pratiques, des cultures et de modernisation des réseaux. Concrètement, nous avons renforcé notre participation financière au sujet du stockage de l’eau de 100 000 € par an, soit 33 % de plus. »

Réseau en réflexion

Le Département a engagé une étude de faisabilité concernant un projet d’optimisation de la gestion de l’eau. En faisant remonter l’eau du Rhône à l’intérieur des terres, jusqu’à Aubenas. « C’est une réflexion en cours où l’eau aurait une vocation multi-usage : elle aurait une utilité pour la lutte contre les incendies, elle servirait à sécuriser l’eau potable si elle est retraitée pour être potabilisée, mais aussi pour l’irrigation agricole », précise Matthieu Salel.

Et le protocole ?

Davantage de retenues sont en étude grâce au protocole d’accompagnement des projets de retenues d’eau en Ardèche, mis en place conjointement par les acteurs de l’eau, et le monde agricole. Bien qu’en 2023, une seule exploitation a bénéficié d’un agrandissement de sa retenue d’eau, lors de la dernière session des Assises de l’eau, la préfète de l’Ardèche, Sophie Elizéon, a indiqué que « 22 projets de retenues de création ou d’agrandissement pour un volume total de 190 000 m3 sont en cours ».

Chiffres clés

Budget

10 millions d’euros. C’est le budget alloué au Plan Eau du Département sur la période 2024-2026. Pour le volet agricole, cela représente 1,2 M€ sur trois ans. « Soit 400 000 € par an dont 300 000 € dans le cadre des cofinancements des mesures Feader », précise Matthieu Salel.

Irrigation

  • 8 000 hectares irrigués (6 % de la surface agricole de l’Ardèche).
  • 1 400 agriculteurs irriguant.
  • 13 millions m3 d’eau/par an sont utilisés pour l’irrigation.

Source Département

Le barrage de l'ASA Jointine à Saint-Victor, à la suite des crues fin octobre 2023. ©CBoyer
La retenue collinaire de Camille Chamblas, au Crestet, dans la vallée du Doux, seul projet d'agrandissement à voir le jour en 2023. ©CBoyer