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« Les crises agricoles fédèrent les consommateurs autour du local »

La 4e édition de l’évènement « Sourçons local » arrive à grands pas, le 29 mai. Dédié à l’approvisionnement local, il permettra de précieux échanges entre producteurs, transformateurs, acheteurs et entreprises. Au cours de cette journée dédiée au local, Pascale Hebel, analyste des comportements de consommateurs, apportera son point de vue sociologique sur cette manière de consommer. 

« Les crises agricoles fédèrent les consommateurs autour du local »
Pascale Hebel, directrice de la prospective chez C-Ways, docteure en statistique et analyste du comportement alimentaire des Français. ©Pascale Hebel

En partenariat avec la Région, Auvergne-Rhône-Alpes Gourmand, l’Aria et La Coopération agricole s’allient pour réunir les acteurs régionaux de la production locale. D’après Pascale Hebel, cette dynamique s’accentue fortement à la suite d’évènements particuliers, comme la crise agricole que l’on traverse actuellement.

Des évènements qui changent la donne

« Depuis trente ans, j’analyse le comportement des consommations des Français. J’observe le contenu des assiettes, les critères d’achat. Il est certain que certaines périodes sont plus propices à dynamiser le "consommer local" et le "Made in France" », explique Pascale Hebel, directrice de la prospective chez C-Ways, docteure en statistiques. La crise actuelle est une raison supplémentaire pour les Français de se tourner vers le local, d’après l’analyste. Et cet évènement n’a pas été le seul à modifier les modes de consommation. « La crise économique de 1994, ou encore la crise agricole de 2008 ont fédéré les consommateurs autour de ces sujets. Il y a une appétence des consommateurs à se tourner vers le local, vers les produits issus du circuit court », ajoute Pascale Hebel. La crise sanitaire du Covid-19 a également pesé dans la balance : « Les difficultés d’approvisionnement ont ouvert les yeux à de nombreux Français. Ils ont compris l’importance d’avoir des producteurs autour de soi », explique-t-elle. Un sentiment également encouragé par une politique en faveur de la souveraineté alimentaire. Et même si l’intérêt des consommateurs pour le local en période post-Covid a semblé retomber, elle a, en réalité, permis de convaincre une nouvelle palette de consommateurs plus modestes.

Choisir le local malgré un budget restreint

« Cette nouvelle manière de consommer local s’est élargie aux catégories de personnes plus modestes. Les classes aisées ne sont plus les seules à avoir des préoccupations de consommation liées aux circuits courts », explique Pascale Hebel. « Ces nouveaux consommateurs choisissent des produits plus onéreux, par souci d’éthique, et une volonté de privilégier la relation avec le producteur. Ils vont même jusqu’à sacrifier d’autres postes de consommation, pour consommer local ». Une conclusion rassurante pour les agriculteurs, dans un contexte d’inflation qui fait peser de nombreuses tensions sur les porte-monnaie des Français. Par ailleurs, les dernières années ont montré que ces derniers gaspillaient beaucoup moins : une prise de conscience supplémentaire sur la valeur des aliments. La population s’est tournée, ces dernières années, vers une alimentation en laquelle ils ont davantage confiance, aux qualités gustatives supérieures, mais également en soutien à une économie de territoire destinée aux producteurs locaux. Les scandales sanitaires ont également joué un rôle dans cette transition : « La confiance en ce que l’on consomme a beaucoup reculé ces vingt dernières années. Les populations cherchent donc à se rassurer en consommant local », affirme l’analyste.

Cette dernière sera présente à l’évènement « Sourçons local » pour apporter son analyse du comportement alimentaire sur le territoire français.

Charlotte Bayon