Le conseil d’administration de Vivacoop (Saint-Sernin) a voté la dissolution de la coopérative, vendredi 12 avril, en assemblée générale extraordinaire.

Clap de fin pour Vivacoop
Les comptes de la coopérative, établis sur la base des valeurs liquidatives par anticipation, ont affiché une baisse de résultat de l’exercice 2023 de près de 266% malgré toutes les provisions faites. ©AAA_AL

Fondée en 1949 par des agriculteurs du sud de l’Ardèche, le conseil d'administration de la coopérative Vivacoop (Saint-Sernin) vient de procéder à sa dissolution, marquée par une forte dégradation de son chiffre d’affaires ces dernières années. En 2023, les volumes d’activité de la châtaigne et du kiwi, qui représentent ses plus grandes productions commercialisées, ont été très faibles, et les apports des adhérents et achats auprès de tiers associés en nette diminution globalement, ce qui n’a pas permis de dégager de marge pour faire face aux charges de structure.

Vendredi 12 avril au siège de Saint-Sernin, les comptes présentés en assemblée générale, établis sur la base des valeurs liquidatives par anticipation, ont affiché une baisse de résultat de l’exercice 2023 (1,7 million d’euros) de près de 266% malgré toutes les provisions faites. « C’est la vision la plus pessimiste et prudente possible pour 2023 », a expliqué Louis-Pierre Pargoire, expert-comptable. Tout résultat positif arrivant durant la période de liquidation n’étant pas pris en compte dans ce résultat.

Un contexte économique difficile pour la filière

Cette dissolution ne s’inscrit pas dans le cadre « d’erreurs de gestion », a déclaré Daniel Vernol, qui présidait Vivacoop depuis plus d’une vingtaine d’années, mais dans le difficile contexte économique de l’arboriculture. Ces dernières années la coopérative avait mis en place divers projets afin de dynamiser son activité. La création de la Sarl Village des producteurs, disposant de magasins à Aubenas et à Ruoms, a permis d’améliorer la distribution des produits de la coopérative, mais d’autres projets n’ont pas rencontré autant de succès. L’atelier Plantes à parfum, aromatiques et médicinales (Ppam) a attiré que très peu de producteurs et a été confronté rapidement à un marché complexe marqué par une surproduction et une chute des prix.

Opérationnel depuis 2018 sur le site de Saint-Sernin, l'atelier de transformation de châtaignes, fruits et légumes (Vivatransfo) avait concentré quant à lui beaucoup d’investissement et d’espoir pour la coopérative. « Il serait arrivé rapidement à un point d’équilibre, car il y a un besoin sur le territoire, le personnel était aujourd’hui compétent, mais on a eu de gros déboires sur la commercialisation avec des personnes qui ne sont pas restées », ajoute Daniel Vernol. « La seule chose que je souhaite, c’est qu’on ne soit pas obligé de le démanteler, qu’une entreprise ou une collectivité engagée dans l’approvisionnement en circuits courts le reprenne. L’outil existe, il suffit de le faire fonctionner. »

Gestion de l’entreprise, vente des biens…

« Soixante-quinze années de travail collectif prennent fin aujourd’hui, qui vont emmener des complications à plusieurs niveaux, pour le personnel qui va être licencié et pour les producteurs qui vont devoir se réorganiser », s’est exprimé, ému, Daniel Vernol, saluant l’anticipation des décisions et l’implication des salariés de Vivacoop.

« Nous allons essayer de valoriser au mieux le patrimoine immobilier de la coopérative. Une fois la liquidation finalisée, on procédera à la restitution des parts sociales. Nous ferons en sorte que cela intervienne le plus vite possible mais ça risque de prendre du temps. » Un patrimoine immobilier qui regroupe quatre sites, à Rosières, Les Vans, Aubenas et le plus important à Saint-Sernin. Des échanges avec la communauté de communes du Bassin d’Aubenas sont en cours pour la vente de ce dernier site, mais rien n’est fait. « Autrement nous le scinderons en deux, en trois. Pour ça, nous avons des demandes. »

L’activité du Village des producteurs devrait se maintenir, le conseil d’administration de Vivacoop ayant validé la mise en vente de la Sarl au directeur de la coopérative, Stéphane Allix, désireux de poursuivre son activité dans le domaine agricole, notamment au sein de « cet outil qu’il connaît bien et est à même de faire tourner », a indiqué Daniel Vernol.

« Conserver un bout de collectif et d’unité »

Pour la centaine de producteurs de châtaignes qui apportaient leur production à la coopérative, « nous devons trouver des solutions », veille Daniel Vernol, inquiet face à l’absence d’outil collectif en Sud Ardèche. Il a mentionné la possibilité de reverser ses parts sociales par dévolution à une autre coopérative ou structure collective, évoquant la création de la Sica du Vivarais par un groupe de jeunes producteurs adhérents à Vivacoop (voir ci-contre). « J’espère de tout mon cœur que quelque chose se crée derrière pour conserver un bout de collectif et d’unité, un autre groupement, de taille beaucoup plus modeste mais qui soit fonctionnel et apporte le service aux producteurs. Et surtout pour éviter que les apporteurs, qui étaient jusqu’à présent coopérateurs, ne se divisent ce qui pourrait donner une concurrence moins marquée puisque les quelques expéditeurs privés tiendront la totalité du marché. »

A.L.

Sica du Vivarais : une structure collective créée en Sud Ardèche
Parmi les producteurs engagés dans le conseil d’administration de la Sica du Vivarais, figurent (ici de gauche à droite) Élodie Court (Juvinas), Thierry et Thomas Raoux (Aubenas), Samuel Bonin (Valgorge) comme secrétaire, Gaëtan Vernol (Saint-Étienne-de-Boulogne), Vincent Mouterde (Chassiers) qui co-préside la Sica avec Simon Canive (Prunet), puis Laurent et Emmanuel Channac (Casteljau). À noter également la présence d'Olivier Barathier (Juvinas), Noémie Haro (Vesseaux) et Benoît Breysse (Prades). ©AAA_AL
CHÂTAIGNE

Sica du Vivarais : une structure collective créée en Sud Ardèche

Anciens adhérents à Vivacoop, de jeunes producteurs se sont regroupés (Sica1 du Vivarais) dans l’ambition de maintenir une structure collective pour la châtaigne. 

Comme un passage de relais, une douzaine de castanéiculteurs, anciens adhérents à Vivacoop, viennent de créer la Sica1 du Vivarais : « Nous avons travaillé tout l’hiver sur ce projet, à l’initiative de Daniel Vernol qui, en annonçant la fin de la coopérative, avait sollicité en direct les producteurs susceptibles d’être intéressés pour donner une suite sur la châtaigne », explique le secrétaire de la jeune Sica du Vivarais, Samuel Bonin, castanéiculteur, éleveur ovin et caprin à Valgorge.

Des points de collecte maintenus pour la prochaine campagne

Face aux nombreux producteurs prêts à rejoindre à nouveau une structure collective, un groupe a travaillé sur le montage de ce projet : « Nous avons débroussaillé le terrain, réfléchi à ce que nous souhaitions faire, chercher à savoir comment commercialiser, avec qui travailler… » Et la semaine précédant la dissolution de Vivacoop, les statuts de la Sica du Vivarais ont été déposés. Co-présidée par Vincent Mouterde (Chassiers) et Simon Canive (Prunet), cette structure a pour ambition de commercialiser des fruits mais « nous ne travaillerons que sur la châtaigne au début », précise Samuel Bonin. Des prestataires, déjà engagés dans la filière, ont exprimé leur intérêt pour commercialiser leur future production. Dans cette perspective, « des points de collecte seront maintenus à Rosières et à Saint-Sernin pour la prochaine campagne », poursuit-il.

« On y va pas à pas »

La Sica du Vivarais s’inscrit en filage de la coopérative Vivacoop : « L’idée est de récupérer au moins une partie de la dévolution de patrimoine de la coopérative pour travailler sur l’acquisition de bâtiments, de matériel… », explique Samuel Bonin. « Cette année, les délais sont courts, on va monter quelque chose de simple qui va fonctionner. Pour la suite, nous avons des idées de développement pour travailler sur quelque chose de collectif, avec pourquoi pas du matériel de récolte, de conditionnement, éventuellement de la commercialisation, nous ne savons pas trop, c’est à construire. On y va pas à pas. »

Des réunions seront organisées d’ici fin mai, pour réunir tous les anciens adhérents à Vivacoop mais aussi les producteurs intéressés à s’associer à cette nouvelle structure collective, « plus légère qu’une coopérative ».

A.L.

1. Société d'intérêt collectif agricole.

Cette dissolution ne s’inscrit pas dans le cadre « d’erreurs de gestion », a déclaré Daniel Vernol, qui présidait Vivacoop depuis plus d’une vingtaine d’années, mais dans le difficile contexte économique de l’arboriculture. ©AAA_AL