Comment favoriser la résilience des châtaigniers à la sécheresse?

CHATAIGNE / Pour lutter contre la chaleur et le manque d'eau, Jean-Marie Lapierre irrigue une partie de ses vergers de châtaigniers, à Prunet... Mais pas seulement ! Taille, choix variétal, amendements aux sols...  Cet ancien éleveur ovin met en œuvre toutes les conditions pour favoriser une meilleure résilience des arbres.

Jean-Marie Lapierre est castanéiculteur à Prunet.
Jean-Marie Lapierre est castanéiculteur à Prunet

Pour beaucoup de castanéiculteurs, la campagne s'annonce cette année encore difficile, suite aux fortes températures et à l'absence de pluies durant l'été. Mais à Prunet, chez Jean-Marie Lapierre, les branches chargées de bogues annoncent des fruits plus nombreux que prévu. Sur ces 12 ha de châtaigniers situés entre 400 et 550 m d'altitude, majoritairement en bouches rouges, 6 ha environ sont irrigués. « Grâce à un système de béalières, l'eau de trois ruisseaux irrigue les terrains par dénivelé. Pour la partie basse, j'arrose par aspersion grâce à un lac collinaire. Les 6 ha de vergers non-irrigués sont implantés sur des sols profonds, dans lesquels le système racinaire peut s'implanter jusqu'à 20 m.

Cette année J.P. Lapierre a utilisé environ 10 000 m3 d'eau pour irriguer ses vergers, qui sont relativement jeunes - entre 40 et 50 ans pour la majeure partie des arbres - . « L'irrigation est avant tout importante pour aider les jeunes châtaigniers à s'implanter. Il poursuit : Je n'arrose pas les arbres indistinctement, mais selon les besoins que je devine grâce à l'observation ».

Tailler pour favoriser la régulation de l'arbre

Le castanéiculteur prunétain fournit également un travail de taille important et minutieux. « Je ne laisse pas une branche sèche. Quand j'observe un arbre qui souffre de la chaleur, durant l'été, j'enlève les sommités et les fruits. Une fois délesté, l'arbre peut ainsi concentrer ses forces sur le bois et se reposer. » Une opération selon lui cruciale : « Arroser ne suffit pas. Plus que le manque d'eau, la chaleur fait du mal : cet été, elle a épuisé les châtaigniers, dont les feuilles ont été littéralement grillées par le soleil. Il ajoute : Je ne fais qu'aider les châtaigniers, qui activent par eux-même leur système de régulation en lâchant des feuilles et des bogues notamment. Et de citer les anciens : Pour que les châtaignes soient grosses, l'arbre doit défeuiller trois fois ! »

Pour favoriser la résistance au vent et limiter les casses, il taille les arbres en boules, les branches serrées, sans laisser les hauteurs se développer. Pour ses plantations, il privilégie par ailleurs les parcelles exposées au levant plutôt qu'au couchant.

châtaigne bouche rouge

Améliorer la structure des sols par des amendements naturels

Jean-Marie Lapierre a également banni le brûlage, et se contente de broyer les branches, qu'il étale sur les sols au pied des châtaigniers. « Je tonds l'herbe assez haut pour y emprisonner les feuilles mortes » et ainsi former, avec les bogues et le broyat, un paillage naturel. Il supprime également les genêts et autres végétaux qui pourraient faire concurrence au châtaignier.

En production bio et AOP, il apporte des amendements à la terre afin de la nourrir et de favoriser la résilience des châtaigniers. « Chaque année, avant les pluies de printemps, j'apporte des activateurs biologiques aux sols qui aident à la décomposition des matières organiques et permettent une meilleure assimilation. Cela évite le tassement des sols, permet de recréer un espace pour le système racinaire, et renforce le système de défense des arbres. » Depuis qu'il apporte ces activateurs biologiques, composés de minéraux, Jean-Marie Lapierre a observé une différence : « Auparavant, lorsque j'arrosais, l'eau ruisselait. Aujourd'hui, elle est immédiatement absorbée. »

Il effectue également un chaulage tous les cinq ans pour corriger l'acidité des sols, avec parcimonie toutefois.

La châtaigneraie de Jean-Marie Lapierre à Prunet

Une travail de longue haleine

La châtaigne étant sa seule production, Jean-Marie Lapierre y consacre tout son temps : « Je suis tout le temps dans les vergers, j'observe énormément les arbres. Je m'en occupe comme je m'occupais des moutons. » Un travail payant, puisqu'il présage une bonne récolte et des fruits sains. Le castanéiculteur a cependant connu bien des années difficiles : « En châtaigne, on ne récolte les fruits de notre travail que sur le long terme. »

 

Mylène Coste

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