« Notre préoccupation : pouvoir continuer demain à produire de la châtaigne d'Ardèche »

Daniel Vernol, président du syndicat de défense de la châtaigne d'Ardèche (SDCA) et castanéiculteur, dresse un premier bilan de la campagne 2019.

Daniel Vernol, président du syndicat de défense de la châtaigne d'Ardèche (SDCA)
Daniel Vernol, président du syndicat de défense de la châtaigne d'Ardèche (SDCA)

Comment qualifier cette campagne 2019 ?

Daniel Vernol : « C'est encore tôt pour donner des chiffres, mais la production de châtaignes d'Ardèche devrait se situer autour des 2 000 t, loin des 5 000 t que nous pourrions potentiellement produire. C'est donc une petite récolte, très hétérogène selon les secteurs : le Sud-Ardèche a particulièrement souffert de la sécheresse et du stress hydrique, et la maladie de l'encre s'y est fortement développée, provoquant d'importantes mortalités. Il semblerait que les vergers plus en altitude aient moins souffert, mais des pertes de récolte y sont toutefois observées. Les quelques orages, fin septembre et début octobre, ont toutefois limité les dégâts. Globalement, on observe entre 30 et 80 % de pertes selon les secteurs, jusqu'à 100 % pour les zones touchées par la grêle. On aimerait pouvoir qualifier ces pertes d'exceptionnelles, mais elles ont été récurrentes ces dernières années. C'est très inquiétant pour l'avenir. »

Quelles sont les solutions pour faire face au réchauffement climatique ?

D.V. : « Dans l'immédiat, l'urgence est de pouvoir stocker de l'eau en hiver. Même si le châtaignier est résistant aux chaleurs et au manque d'eau durant l'été, il faut pouvoir arroser fin août et début septembre, en cas de sécheresse, au moment où les fruits grossissent. À plus long terme, il nous faut trouver des solutions contre la maladie de l'encre. Nous avons su nous débarrasser du cynips, il nous faut aujourd'hui trouver un porte-greffe résistant à l'encre et adapté à nos terrains et à nos variétés ardéchoises. C'est un travail de recherche que nous avons démarré, mais qui prendra du temps. »

Craigniez-vous la concurrence des autres régions productrices, en France et en Europe ?

D.V. : « Dans le Sud-Ouest de la France (notamment Dordogne, Corrèze, Périgord, Lot-et-Garonne NDLR), de nombreux vergers ont été plantés et entrent aujourd'hui en production. Ce sont des vergers irrigués, qui n'ont pas de difficultés à pallier à la sécheresse. Le Portugal a également connu de grosses vagues de plantations ces dernières années, et a dépassé l'Italie ou encore l'Espagne en terme de production. Je ne crois pas cependant que nous devons avoir peur de cette concurrence : nous avons une vraie reconnaissance avec l'AOP, et les transformateurs sont en demande. La véritable préoccupation, c'est de pouvoir continuer demain à produire de la châtaigne d'Ardèche malgré les changements climatiques. C'est un véritable défi. »

 

Propos recueillis par Mylène Coste

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