QUESTIONS À
« Les consommateurs sont en demande de produits bio, les laiteries aussi ! »

Gérald Rouzet, président de l’organisation professionnelle (OP) « Union des producteurs de lait de montagne cévenole » qui réunit une soixantaine de producteurs et les laiteries Rissoan, Carrier et la Fromagerie du Vivarais.

« Les consommateurs sont en demande de produits bio, les laiteries aussi ! »
Gérald Rouzet, président de l’organisation professionnelle (OP) « Union des producteurs de lait de montagne cévenole », est éleveur à Sagnes-et-Goudoulet et travaille avec la laiterie Carrier.

Comment est organisée l’Union des producteurs de lait de montagne cévenole ? Quels sont ses objectifs ?

Gérald Rouzet : Cette organisation professionnelle a été créée en 2016, conjointement avec les organisations de producteurs des laiteries Rissoan basée à Luc en Lozère, Carrier à Vals-les-Bains et la Fromagerie du Vivarais à Désaignes. Elle regroupe une soixantaine d’éleveurs, qui représentent l’équivalent de plus de 10,21 millions de litres de lait par an. Cette OP permet de négocier le prix du lait avec les laiteries en toute légalité, et de donner la possibilité aux producteurs d’être en prise directe avec leur propre laiterie pour négocier leurs prix. Les laiteries de montagne bénéficient d’une bonne valorisation donc elles rémunèrent un peu mieux les producteurs que ce qui se fait au niveau national. »

Comment se porte l’élevage laitier de montagne ?

G.R. : « La conjoncture n’est pas mauvaise en ce moment mais elle n’est pas suffisamment élevée pour attirer des jeunes à s’installer en élevage laitier. Il y a eu très peu d’installations récemment sur nos secteurs de montagne. Le nombre de producteurs laitiers présents sur le plateau a énormément baissé depuis une dizaine d’années, particulièrement sur le secteur du Mont Gerbier. Autour de Coucouron, les exploitations se maintiennent un peu mieux. Cette situation pousse les laiteries à élargir leur secteur de collecte, aller chercher du lait là où il y en a. Sur le conventionnel, la situation s’est un peu améliorée avec une augmentation de 5€ les 1000 litres de lait chaque année depuis 2018 mais elle reste encore insuffisante pour les producteurs. Le lait bio, quant à lui, bénéficie de meilleurs prix. »

Le développement du lait bio pourrait-il dynamiser la filière laitière du département ?

G.R. : « C’est ce que nous espérons car le lait bio bénéficie de prix de vente plus élevés. C’est un marché porteur. Les consommateurs sont en demande de produits bio, les laiteries aussi ! La laiterie Carrier a fait beaucoup d’efforts sur ce point via sa nouvelle marque bio « Eulalie des Monts d’Ardèche » (voir ci-contre) et propose des prix intéressants pour le lait bio cette année : 500€ les 1000 litres de lait bio contre 355€ en conventionnel. Pour les exploitations de montagne qui n’ont jamais été des élevages très intensifs où il n’y a que des prairies naturelles, le passage en agriculture biologique n’induit pas de grands changements de pratiques, mise à part l’achat de céréales bio pour les compléments alimentaires. Les quantités de lait ne diminuent pas, voire augmentent légèrement, d’après les retours d’expérience que nous pouvons avoir. Certains producteurs n’osent pas sauter le pas mais je pense que le bio offre des perspectives intéressantes par rapport au conventionnel. Il permet de valoriser nos spécificités et pourrait favoriser des installations. »

Quelle autre actualité marque l’élevage laitier de montagne actuellement ? 

G.R. : « Les dérèglements climatiques sont nos plus gros soucis pour l’avenir. Nous utilisons nos prairies et ressources fourragères du mieux possible, tant que la météo nous le permet, mais nourrir les animaux devient de plus en plus compliqué. Les aléas climatiques se cumulent : le manque d’eau durant l’été, le trop d’eau durant l’hiver, du vent ou du froid quand il ne faut pas… Les animaux paissent de moins en moins longtemps et nous devons faire de plus en plus de foin pour les nourrir. Même en les laissant dehors, il faut compléter leurs rations pour obtenir assez de lait en été. Les stocks de fourrage ne sont pas toujours suffisants selon les années. Depuis 3 à 4 ans, il faut toujours en acheter un peu. Nous avons l’impression de tendre vers un processus où les producteurs vont avoir besoin de plus en plus de surfaces pour moins d’animaux. »

Propos recueillis par A.L.

À lire également :

Les éleveurs de la laiterie Carrier veulent redynamiser la filière

"La filière lait bio offre de vraies perspectives"

À chaque laiterie sa stratégie : laiterie Carrier

Image