En Ardèche, depuis 2016, un groupe Dephy est constitué autour de douze viticulteurs et suivi par Amandine Fauriat, de la chambre d'agriculture de l'Ardèche.

Dephy : des expérimentations sur les vignobles
Depuis 10 ans, Olivier Clape, tente de réduire les traitements sur son vignoble de 9 hectares, dont 7 en coteaux. ©AAA

Depuis 2016, la première phase du dispositif Dephy s'est concentrée sur la réduction du désherbage chimique et le développement de techniques adaptées aux fortes pentes, pour répondre aux contraintes de nombreux viticulteurs en vallée du Rhône. Paillage, enherbement, engrais verts, plusieurs techniques ont été adoptées par plusieurs membres du groupe. « Sur toutes les exploitations engagées, seules deux ont encore recours au désherbant », se réjouit Amandine Fauriat, technicienne à la chambre d’agriculture de l’Ardèche et animatrice de ce groupe Dephy. Ces alternatives peuvent toutefois être plus compliquées à mettre en place selon les parcelles, « il y a certains endroits où le travail du sol reste nécessaire », précise la conseillère.

Cuivre et soufre, un usage raisonnné

Depuis 2022, une nouvelle période a débuté (2022-2026) : il s'agit, cette fois, d'expérimenter des techniques pour renforcer la plante et de limiter l'usage de produits nocifs pour l'environnement. « Pour l'instant, je travaille sur la réduction du cuivre », illustre Olivier Clape, viticulteur à Cornas et membre du groupe Dephy. Après plusieurs années d’expérimentation sur son domaine de 9 hectares, le viticulteur a désormais abandonné les produits phyto de synthèse et il applique une logique de traitement raisonné du cuivre et du soufre, selon la pression sanitaire. « En 2022, je n’ai utilisé que 30 grammes de cuivre, mais c’était une année sèche. En 2021, année très humide, j’ai dû en utiliser 900 grammes », détaille-t-il. En 2023, le viticulteur a commencé la saison sans cuivre. Il a finalement été obligé de se résoudre à en utiliser au vu de la très forte présence de mildiou. Pour lui, il est aussi important d’accepter qu’en bio, il y aura des tâches dues au mildiou (bien qu’il n’ait pas souhaité labelliser son vignoble en agriculture biologique). « Pour le black-rot, c’est plus compliqué à gérer, explique-t-il. J’ai eu besoin de retourner au soufre en continuant bien sûr le traitement au cuivre. Mais pour cette maladie, il n’y a, pour l’instant, pas de lutte suffisamment efficace en bio… Si on en laisse sur une parcelle, on retrouve la maladie l’année suivante. » Le black-rot est d’autant plus difficile à gérer qu’il est moins visible que d’autres problèmes sanitaires. 

Cette réflexion autour de la réduction des produits de synthèse a aussi amené Olivier Clape à s’interroger sur son sol : « On sait que des maladies comme le mildiou ou l’oïdium sont en dormance sur le sol. Pourquoi ne pas aller voir de ce côté-là ? Certaines bactéries ou champignons pourraient peut-être entrer en concurrence avec ces parasites ? » Ces dernières années, le viticulteur a fait plusieurs tentatives pour changer sa manière d’entretenir le sol. « Pour ce qui est des couverts végétaux, dans les coteaux c’est compliqué à mettre en œuvre. J’ai aussi paillé en ajoutant de la matière organique. Au plat, ça marche, mais ce n’est pas non plus une solution pour les coteaux. » Parmi les autres solutions testées dans son vignoble : le paillage en laine de mouton. Le sedum a aussi été une autre idée du viticulteur, mais le résultat est mitigé : « C’est une plante qui craint le piétinement », conclut-il. Parmi ces essais de couverts, aucun n’a finalement été appliqué sur la totalité du domaine.

« Il n'y a pas une recette »

D'ici à 2026, Olivier Clape et les autres membres du groupe Dephy sont bien décidés à tester différentes alternatives. Progressivement, les techniques efficaces peuvent être généralisées à l'échelle du vignoble et même au-delà. « L'objectif, c'est que le secteur puisse s'approprier certaines méthodes validées par ces groupes, souligne Amandine Fauriat. Mais c'est sûr qu'on ne pourra pas tout appliquer tel quel, cela dépend des vignes, des parcelles, des sols... et même des vignerons ! Il n'y a pas une recette. » Une chose est sûre : « La réduction et l'optimisation des doses fonctionnent, ce sont des méthodes reconnues, conclut Amandine Fauriat. Mais pas n'importe où et n'importe comment ! »

P.D.-D.

Dephy : qu'est-ce que c'est ?

Partout en France, le réseau Ferme Dephy regroupe plusieurs milliers d'agriculteurs qui travaillent à la réduction de traitements phytosanitaires et d'engrais minéraux. Des expérimentations sont menées sur le terrain, à l'initiative des agriculteurs, et les données sont recueillies par des techniciens qui se déplacent dans les exploitations. Ces résultats sont ensuite communiqués au sein du réseau Dephy pour élargir la connaissance des alternatives aux phytos. Ce dispositif a également pour ambition de favoriser la transition et d'encourager les agriculteurs qui s'inscrivent dans cette dynamique.