Les 30 ans de l’Agneau de l’Adret, c’est une occasion pour les acteurs qui ont contribué à la création de cette filière régionale, de se réunir afin de mettre à l’honneur, le travail accompli depuis les débuts, au service du rayonnement de tout un territoire.

L’Agneau de l’Adret fête ses 30 ans et les 10 ans du rabel rouge
Les acteurs réunis pour fêter les 30 ans de l’Agneau de L’Adret.

« Au début des années 1990, les agneaux anglais et néo-zélandais sont importés en grands volumes en France, fallait se démarquer pour survivre », relate Bruno Damiens, éleveur de brebis à Champis et fraîchement retraité de sa fonction de président de l’association de promotion de l’Agneau de l’Adret. Alors en 1993, tous les professionnels du milieu ovin de la région Auvergne-Rhône-Alpes se réunissent avec la même volonté : s’engager à produire une viande d’agneau d’une qualité irréprochable, afin de rallier éleveurs et consommateurs. Le nom de l’Adret (versant exposé au soleil, en montagne) résonne pour tous, et fut choisi comme figure de proue de la revalorisation de l’agneau français dans les assiettes. S’en est suivi en 1994, la création du label en CCP1, (1ère CCP accordée en viande d’agneau en 1994).

Une reconnaissance en label rouge

En 2013, l’Agneau de l’Adret monte en gamme avec la reconnaissance de son cahier des charges label rouge. Une viande plus qualitative, tendre, moins grasse, car l’agneau est élevé sous la mère. « On retrouve surtout une régularité dans le goût, car c’est important d’avoir un produit régulier pour le boucher et les consommateurs, d’où l’intérêt d’avoir un large territoire, car le volume permet de choisir », détaille Eric Greffe-Fonteymond, éleveur de 400 brebis en Isère et nouveau président de l’association de promotion de l’Agneau de l’Adret.

La vente en grande distribution est privilégiée : « C’est le plus gros marché de distribution. Dans le commerce, 70 à 75 % de la viande est classifiée en Adret. Le reste, est vendu en agneau standard français. Dans la vallée du Rhône, il y avait une carence de label rouge, seulement 11 en France. On vend aussi beaucoup dans l’Est de La France «, précise Bruno Damiens.

Faire face aux difficultés actuelles

Si l’Agneau de l’Adret, reste une marque très sollicité, il n’est des difficultés qu’on ne peut cacher. En 2022, la consommation a baissé. François Monge, président de la coopérative Agneau du Soleil, qui promeut entre autres la marque, constate : « En 2023, il y a eu une diminution des ventes d’environ 10 % sur toute la France ».

« Comme tous les autres produits haut de gamme, on a souffert du Covid et du pouvoir d’achat en berne », renchérit le président de l’Agneau de l’Adret. « La production est en dents de scie. Sur 2022, il y a une baisse de la demande en label rouge au profit de produits plus standards sur d’autres viandes, c’est un détournement des consommateurs », s’inquiète l’éleveur isérois.

Pour Bruno Damiens, « les consommations ne se tournent pas forcément sur une autre viande : ils en consomment moins ». On pourrait alors s’attendre à ce que les consommateurs, davantage informés au sujet de l’impact écologique de la viande et au bien-être animal, se tournent vers une consommation raisonnée, mais de qualité, en faisant la part belle aux viandes labellisées. Cependant, pour l’éleveur de Champis, « il existe un lobbying contre les viandes en général ». Pour preuve, le tout nouveau retraité de la présidence, indique que « les groupements du nord ont perdu des magasins. Il faut trouver de nouveaux marchés. Nous vendons très bien en GMS. En boucherie, c’est de l’ordre de 20 % sur la totalité des ventes. Il y a une concurrence entre les viandes désormais ».

Le nouveau et l’ancien président ont tous deux la même vision pour le futur de la marque. « Nous allons travailler le produit en label rouge, en développant des produits préparés, comme par exemple des boulettes d’agneau ». Bruno Damiens ajoute : « La viande d’agneau a besoin d’être transformée. Nous devons avoir une politique de reconquête des consommateurs. Par exemple, en faisant des interventions dans des lycées hôteliers ».

Pour aller plus loin, Eric Greffe-Fonteymond souhaite également appuyer le développement de la marque à travers la communication : « Il faut travailler sur l’ancrage territorial, remettre de l’humain, montrer qui on est derrière ce label ».

L’occasion justement avec cet anniversaire, de resserrer les liens entre les différents acteurs :  de l’éleveur jusqu’au consommateur.

Marine Martin

1. Certificat de conformité produit.
Zoom sur le cahier des charges du label rouge

Zoom sur le cahier des charges du label rouge

Bruno Damiens, spécialiste, détaille avec précision la marche à suivre : « Les éleveurs suivent un cahier des charges strict. Les agneaux sont élevés sous la mère, il est interdit de donner le biberon. Il y a un suivi assidu de l’âge, de la naissance, âge de l’abattage afin d’avoir une traçabilité. Nous avons un panel de race assez large, car on travaille avec tout l’Auvergne-Rhône-Alpes. Il y a environ 20 races pour les femelles et 15 du côté des mâles. Les agneaux sont sevrés à 60 jours et l’abattage intervient entre 60 à 90 jours. La seule dérogation existante est à l’automne, lorsque les agneaux reviennent de pâturage, ils peuvent être abattus jusqu’à 200 jours. Le poids de la carcasse doit se situer entre 14 et 21 kg, le poids est extrêmement suivi, pour éviter le gras non-nécessaire. Il y a un classement : une grille Europ1 et les agneaux doivent se situer entre R et U et sur les 4 propositions, l’agneau doit être dans le premier, second ou troisième concernant le gras ». Le producteur doit donc suivre le cahier des charges, mais aussi évoluer et se corriger éventuellement pour suivre le label rouge. « L’éleveur peut ainsi améliorer l’alimentation, nerf de la guerre, qui régit si l’agneau peut être labellisé ou pas, mais aussi l’âge de l'abbatage afin d'atteindre le cahier des charges. Enfin, il y a des contrôles par la coopérative Agneau Soleil et 10 % des élevages sont contrôlés aléatoirement par le bureau Véritas », conclut l'éleveur ardéchois. En récompense de ce travail minutieux et assidu, la marque Agneau de l’Adret géré par l’Inao a obtenu les médailles d’or et d’argent lors de sa première participation au Salon de l’agriculture en 2020. En 2022, la marque a été gratifiée de la médaille d’argent et en 2023, elle est repartie avec les médailles d’argent et de bronze.

1. Grille communautaire de classement des carcasses, la référence en abattoir.

La coopérative Agneau Soleil

La coopérative Agneau Soleil regroupe 550 éleveurs, 160 000 agneaux et 200 000 brebis sous deux labels : L’Adret et l’Agneau de Sisteron, ainsi que la production bio. Ces trois catégories représentent 60 % de la production, le reste est vendu en viande standard.

L'Agneau de l'Adret en quelques chiffres

62% de la production est née et élevée en Auvergne-Rhône-Alpes

68% des élevages sont situés en zone de montagne

55% de l’aliment distribué aux animaux provient de l’exploitation

75% des agneaux sont labellisés label rouge

L’Ardèche est le premier département producteur d’Agneau de l’Adret, avec 70 éleveurs

Un lieu d'anniversaire choisit avec soin

Un anniversaire célébré à la Maison des Vins & du Tourisme de Saint Péray. Un choix de lieu tout sauf anodin, puisque la volonté était de faire le lien entre le vin et l’agneau, terroir de « caractère » pour le premier et territoire âpre pour l’autre. « Ce sont deux terroirs qui vont ensemble, l’essentiel est de mettre en avant le fil commun : l’éleveur et le viticulteur, pour montrer qu’il y a de l’humain derrière toute production et qu’ensemble, on entretient le territoire », estime Eric Greffe-Fonteymond.

De gauche à droite : Paul Ronzon, François Monge, Pierre olivier Chambeyron et Bruno Damiens, les anciens présidents de l'Agneau de l'Adret, et Eric Greffe-Fonteymond qui a pris la présidence le 11 mai 2023.